Syrie : malgré le cessez-le-feu, "l'accès aux soins n'est pas garanti", selon Médecins du Monde
En Syrie, un cessez-le-feu est entré en vigueur jeudi à 00h mais il ne permet pas l'accès aux soins pour tous, déplore Joël Weiler, directeur des urgences de Médecins du Monde.
Un cessez-le-feu est entré en vigueur jeudi 29 décembre à 00h en Syrie. Une initiative dont la Turquie et la Russie sont à l'origine. Mais des tirs ont été entendus ces dernières heures. Il n'y a pas encore de "cessez-le-feu global en Syrie", constate le directeur des urgences à Médecins du Monde, Joël Weiler, sur franceinfo au micro de Nicolas Teillard vendredi.
franceinfo : Est-ce que le cessez-le-feu facilite le travail de Médecins du Monde en Syrie ?
Joël Weiler : Il faut voir ce que l'on met derrière ce terme. Ce n'est pas un cessez-le-feu global sur la Syrie. Le cessez-le-feu est entre les forces gouvernementales et les rebelles dits "modérés". En tout cas, cet accord exclut très clairement (le groupe) Etat islamique, le front Al Nosra, et un paquet de parties prenantes en Syrie. L'accès humanitaire est extrêmement limité, que ce soit du côté gouvernementale ou non gouvernementale. Le cessez-le-feu n'a pas particulièrement amélioré nos conditions de travail. On continue à opérer à l'intérieur de la Syrie mais c'est très compliqué.
Reste-t-il encore des lieux de soins ?
Les hôpitaux et les personnels soignants ont été visés depuis le début du conflit. Environ 760 personnels médicaux ont été tués depuis 2011. A peu près 120 structures sanitaires ont été ciblées sur la dernière année. Il reste des hôpitaux de fortune. Médecins du Monde monte des cliniques mobiles, fait des soins sous tentes mais plus de la moitié des structures a été rasée dans le pays. On a beaucoup parlé d'Alep, mais le conflit est un peu partout sur le territoire. Il y a des zones plus faciles d'accès, mais il n'y a pas d'endroits où il est facile de travailler.
Quelle est la situation humanitaire sur place ?
On est dans une catastrophe humanitaire absolue. Plus de la moitié de la population a été déplacée. La Syrie comptait 22 millions d'habitants, et on estime entre 11 et 13 millions de Syriens qui, au cours des six dernières années, ont dû quitter leur lieu de vie. Cinq millions sont à l'extérieur mais il y en a aussi plus de huit millions à l'intérieur qui sont réfugiés le long des frontières, dans des zones plus ou moins sûres. La Turquie a accueilli quasiment trois millions de réfugiés syriens.
Avez-vous des relais au sein de la société syrienne ?
Oui. Plus de la moitié, voire les trois-quarts de nos actions passent par des initiatives syriennes, par la société civile syrienne, par des ONG syriennes. On essaye d'être, même si c'est naïf, dans la Syrie de demain, dans la reconstruction de la Syrie qui passera par les Syriens. On intervient car il y a un déficit d'accès aux soins mais on ne va pas suppléer au ministère de la Santé syrien. C'est une réponse qui doit être collective, qui doit garantir l'accès aux soins à tout le monde, ce qui n'est pas le cas aujourd’hui et c'est l'une des limites du cessez-le-feu.
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