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Environnement : en Moselle, un projet d'exploitation de gaz de couche suscite l'inquiétude

Dans une tribune publiée mercredi sur franceinfo, une soixantaine d'élus demandent l'arrêt du projet d'exploitation de gaz de couche en Moselle. Le gouvernement doit se prononcer dans les prochains mois sur une demande de permis, déposée en 2018.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le site de La Française de l'énergie, une société qui a déposé un permis d'exploitation du gaz de couche, de Lachambre (Moselle), le 16 octobre 2017. (MAXPPP)

En pleine COP26, le sujet est inflammable. Le gouvernement va devoir répondre, dans les prochains mois, à une demande de permis d'exploitation de gaz de couche en Moselle, déposée en 2018 par la Française de l'énergie et qui suscite une forte opposition localement. "Comment comprendre que l'on autorise, en 2021, l'exploitation d'une nouvelle source d'hydrocarbures alors que notre pays doit s'engager dans la sortie de sa dépendance aux énergies fossiles ?", s'interrogent 66 élus – députés, sénateurs, eurodéputés, maires – dans une tribune publiée mercredi 10 novembre sur franceinfo. Ce gaz, du méthane emprisonné dans des veines de charbon non exploitées, est une énergie émettrice de gaz à effet de serre, moteur du réchauffement climatique.

Alors que les conséquences – dôme de chaleur au Canada, inondations en Allemagne et en Belgique, incendies dans le Var – de la crise climatique sont de plus en plus visibles, les déclarations appelant à sortir des énergies fossiles pour limiter la casse se multiplient au niveau international. "Il n'y a pas besoin d'investissements dans de nouvelles sources d'énergie fossile dans notre scénario de neutralité carbone", a déclaré l'Agence internationale de l'énergie (AIE) dans un rapport historique en mai (PDF en anglais).

"Notre addiction aux énergies fossiles pousse l'humanité au bord du gouffre. Nous avons un terrible choix à faire : soit nous y mettons un terme, soit elle nous perdra", a lancé le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres lors de l'ouverture de la COP26 à Glasgow. Lors de ce sommet, une vingtaine de pays – mais pas la France – se sont accordés pour cesser le financement à l'étranger de projets d'énergies fossiles sans techniques de capture de carbone.

"C'est une aberration"

Un contexte brandi par les opposants au projet, des élus signataires de la tribune à l'Association pour la protection de l'environnement local 57 (Apel57). "C'est une aberration. Des scientifiques alertent et affirment unanimement qu'il faut arrêter les énergies fossiles, il n'y a plus de débat, estime Anaëlle Lantonnois, de l'Apel57. Face à tout cela, nous avons beaucoup d'annonces et rien de concret (...) Il y a un double discours" du gouvernement. En 2017, le projet avait échappé à la loi Hulot sur la fin de l'exploitation des hydrocarbures.

Elle rappelle qu'à l'origine, le gaz visé par la Française de l'énergie (LFE) "ne risque pas de se retrouver dans l'atmosphère" et de réchauffer le climat si le projet n'est pas mené à bien. Une différence notable avec la captation dans les Hauts-de-France, par la même entreprise, du méthane qui s'échappe des anciennes mines de charbon depuis la fin de l'exploitation. Anaëlle Lantonnois s'inquiète également d'éventuelles fuites de méthane, du risque de pollution de la nappe phréatique dans cette région où elle affleure et de l'artificialisation des sols engendrée par la construction des puits. 

Le périmètre de la demande d'exploitation déposée par La Française de l'énergie couvre 200 km². (APEL57)

Du gaz "produit localement, dans les meilleures conditions environnementales possibles"

De son côté, l'entreprise met en avant l'avis favorable des commissaires enquêteurs qui ont mené l'enquête publique (PDF) et de 28 des 40 communes concernées par le périmètre de 200 km2 du permis, l'absence de pollution pendant la phase de recherche, sa bonne santé financière ("tous nos rapports financiers sont disponibles sur notre site web") et sa méthode de forage ("verticale, comparable à un forage d'eau potable"). "Entre 2050 et aujourd'hui, nous allons continuer à consommer beaucoup de gaz", argumente Julien Moulin, PDG de la Française de l'énergie. "Alors autant qu'il soit produit localement, dans les meilleures conditions environnementales possibles (...) C'est inacceptable d'être dépendant des Qataris et des Russes".

Selon ses calculs, les gisements de gaz de couche pourraient couvrir "quelques pourcentages" de la consommation annuelle française. L'entrepreneur, qui dirige une PME de 20 personnes et de 10 millions d'euros de chiffre d'affaires, vante aussi ses projets d'utiliser ce méthane pour faire de l'hydrogène ou son partenariat avec l'université de Lorraine pour expérimenter le stockage de gaz à effet de serre dans le sous-sol. Après la publication de la tribune sur franceinfo.fr, l'association des communes minières de France et le district urbain de Faulquemont (Moselle) ont fait parvenir un texte pour soutenir LFE. "La valorisation d'énergies locales en circuit court doit être encouragée sur l'ensemble de nos territoires. C'est un moyen éprouvé et efficace de réduire l'empreinte carbone de l'énergie utilisée et d'augmenter la résilience de nos régions", estiment-ils. Reste à savoir si ces arguments vont convaincre l'Etat. Contacté par franceinfo, le ministère de la Transition écologique n'a pas répondu à nos sollicitations.

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