En Tunisie, l'opposante Abir Moussi, emprisonnée depuis l'automne 2023, dépose sa candidature à la présidentielle
Le parcours s'annonce semé d'embûches. L'opposante farouche au président Kaïs Saïed en Tunisie, Abir Moussi, emprisonnée depuis l'automne 2023, a déposé samedi 3 août sa candidature à la présidentielle du 6 octobre prochain par l'intermédiaire de ses avocats, selon des médias locaux. Six membres du comité de défense de la cheffe du Parti destourien libre, qui se revendique de l'héritage des autocrates Habib Bourguiba et Zine el Abidine Ben Ali, ont soumis son dossier à l'autorité électorale Isie, selon la radio Mosaïque FM.
Les postulants ont jusqu'à mardi 6 août, 17 heures GMT (19 heures, heure de Paris) pour candidater. Les critères d'acceptation sont draconiens : il faut le parrainage de 10 parlementaires ou 40 présidents de collectivités locales, largement acquis à Kaïs Saïed, ou de 10 000 électeurs à raison d'au moins 500 signatures par circonscription, un nombre difficile à recueillir, d'après les experts.
Une trentaine d'ONG dénoncent une autorité électorale ayant "perdu son indépendance"
Virulente critique à la fois du président et du parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha, Abir Moussi, une ancienne députée de 49 ans, avait été arrêtée le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel de Carthage, alors que, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de Kaïs Saïed. Ce dernier a été élu démocratiquement en 2019, mais a fomenté un coup de force il y a trois ans pour briguer un deuxième mandat. Depuis son arrestation, Abir Moussi fait l'objet d'accusations graves, dont celles "d'attentat ayant pour but de changer la forme du gouvernement". Elle est soupçonnée d'avoir voulu rétablir un régime similaire à celui de Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du "printemps arabe".
D'autres figures de l'opposition en détention, comme Issam Chebbi et Ghazi Chaouachi, accusés de complot contre l'Etat, avaient annoncé leur intention de postuler à la présidentielle, mais ils ont jeté l'éponge, faute d'avoir obtenu une procuration spéciale pour être représentés pendant la procédure. Mercredi, une dizaine de prétendants sérieux ont dénoncé dans un communiqué des entraves à leur liberté de se présenter.
Une trentaine d'ONG, incluant la Ligue tunisienne des droits de l'Homme, ont aussi fustigé jeudi des "arrestations arbitraires" de candidats, une autorité électorale ayant "perdu son indépendance" et "une monopolisation de l'espace public", avec "l'utilisation des ressources de l'Etat pour favoriser un candidat au détriment des autres".
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