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Est de la RDC : les islamistes des ADF sèment la terreur à Béni

C'est la première fois que les Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe armé affilié à l'organisation Etat islamique, visent une église dans la ville du Nord-Kivu.

Article rédigé par Eléonore Abou Ez
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Deux enfants devant l'église catholique Emmanuel Butsili à Béni, le 27 juin 2021, après l'explosion d'une bombe de fabrication artisanale, juste une heure avant la tenue d'une cérémonie de confirmation. (SEBASTIEN KITSA MUSAYI / AFP)

L'activité s’est arrêtée cette semaine pendant 48h à Béni, une ville de la province de Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Ecoles, églises, boutiques et marchés sont restés fermés au lendemain d’une série d’attaques à la bombe dont une a visé un lieu de culte. Les Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe armé aux actions ultra violentes, sont mises en cause dans ces attaques.

Que s'est-il passé ?

Dimanche 27 juin, un attentat a terrorisé les Congolais de Béni. Très tôt le matin, une bombe artisanale placée à l’intérieur d’une église catholique a explosé et fait deux blessés. Le bilan aurait pu être beaucoup plus lourd. La déflagration a eu lieu peu avant une importante cérémonie de confirmation réunissant de nombreux enfants.

Le soir-même, un homme a été tué par l'engin explosif qu’il détenait. Le "kamikaze" a été identifié par les autorités comme un membre des ADF, l’un des groupes armés les plus violents du Nord-Kivu. Le cycle de violences ne s’arrête pas là. Une dizaine de civils ont par ailleurs été massacrés lors d’une autre attaque aux environs de Béni.

"Nous marchons la peur au ventre dans les rues de Béni. Partout où on se trouve, on est en danger de mort. Avec ces explosions et des gens porteurs des bombes, sortir de sa maison revient à prendre des risques"

Jeanine Kashauri, infirmière à Béni

à l'AFP

Quel est le contexte ?

Béni et ses environs sont la cible depuis 2013 du groupe des Forces démocratiques alliées (ADF), responsable d’une série de massacres qui ont fait plus de 6 000 morts, selon un décompte de l’épiscopat congolais.

Le président Félix Tshisekedi a décrété début mai 2021 l’état de siège dans le Nord-Kivu et l'Ituri, deux provinces de l’est de la RDC afin de "mettre rapidement fin à l’insécurité qui décime quotidiennement nos compatriotes", selon le porte-parole du gouvernement. Cette mesure, qui se traduit par un transfert du pouvoir des gouverneurs civils à celui des militaires, semble à ce stade toute relative face au groupe ADF qui poursuit et intensifie ses actions meurtrières.

Qui sont les ADF ?

Il est difficile de définir exactement ce que sont les ADF, groupe armé implanté dans l'est de la RDC depuis 25 ans. Composé au départ de rebelles musulmans ougandais, les ADF ne mènent plus d’attaques contre l’Ouganda voisin et se sont transformés en mouvement islamiste violent. Sous la direction de l’Ougandais Seka Musa Baluku, la milice ADF terrorise depuis 2013 des civils dans la région de Béni.

Fin 2019, l’armée congolaise a lancé des opérations contre leurs fiefs pour les en déloger, sans réussir à mettre fin aux violences. Les miliciens se sont juste dispersés et ont étendu leur zone d’attaques en agissant par petits groupes, comme le souligne un récent rapport des Nations unies.

Une nouvelle menace terroriste ?

Ces hommes armés, qui vivent de trafic divers, se veulent proches de l’organisation Etat islamique. Dès avril 2019, Daech a revendiqué certaines actions commises par les ADF. L’ONU se méfie de ce groupe ultra violent dont les attaques peuvent constituer des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. Un rapport (lien en anglais) publié en juin dernier met en garde contre la prolifération des engins explosifs dans le nord-est du Congo, notamment dans les zones opérationnelles des ADF, où ces armes sont utilisées à "des fins tactiques" et non en tant qu'"outil terroriste". Washington a placé les ADF parmi les "groupes terroristes" affiliés à l’organisation Etat islamique, mais l’ONU n’établit pas encore de liens directs avec Daech.

En attendant, la fréquence des attaques augmente à Béni. Une région marquée depuis des années par les massacres, les violations des droits, la peur et l'impunité.

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