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Sahel: pourquoi l'Algérie dit non à Macron sur la force conjointe du G5

Plusieurs jours après le passage express du président français à Alger, le 6 décembre 2017, des médias algériens et maliens ont commencé à distiller sur les réseaux sociaux des informations sur l’objectif et ce qu’ils appellent l’échec de ce déplacement.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Le chef d'état-major algérien, Ahmed Gaïd Salah, également vice-ministre de la Défense, aux funérailles du général à la retraite Atailia, au cimetière El Alia d'Alger, le 10 décembre 2017 (Billal Bensalem/NurPhoto)

Après sa visite de courtoisie au président Abdelaziz Bouteflika, Emmanuel Macron a rencontré à la résidence présidentielle de Zeralda le chef d’état-major de l’ANP (Armée Nationale Populaire), Ahmed Gaïd Salah.

Alger refuse de participer au G5 pour des raisons constitutionnelles
Selon le site Algérie patriotique, rapportant lui-même des informations de l’agence Erem News basée à Abou Dhabi, au cours de cet aparté d’une heure, le plus long de la visite, les deux hommes se sont entretenus sur la situation sécuritaire au Sahel.
 
Préparée en amont dans la plus grande discrétion par des officiers de la DGSE, cette rencontre devait permettre au chef de l’Etat français de tenter de convaincre l’homme qui occupe également le poste de vice-ministre de la Défense, de participer à la force du G5 Sahel.
 
Une offre à laquelle les autorités algériennes avaient répondu par la négative. «Les responsables ont expliqué au président français que la Constitution algérienne interdisait à l’armée de mener des opérations à l’extérieur des frontières du pays», a précisé l’agence Erem News.
 
Toutefois, toujours selon la même source, Emmanuel Macron serait reparti avec la promesse que l’Algérie allait renforcer sa coopération en matière d’échange de renseignements avec ses partenaires de la région.
 
Ahmed Gaïd Salah aurait, selon Algérie patriotique, confirmé à son interlocuteur qu’aucun soldat algérien ne sera dépêché au Sahel pour combattre les groupes terroristes.
 
«De nombreuses sources rappellent à ce propos que l’Algérie aide déjà beaucoup les Français dans leur lutte contre le terrorisme au Sahel. Sans le soutien logistique de l’ANP, les opérations Serval et Barkhane auraient eu du mal à porter leurs fruits», explique le site.

Les priorités du général Ahmed Gaïd Salah sont ailleurs 
De son côté, le site Algérie Part avance une autre raison pour laquelle l’Algérie, «première puissance militaire de la région, préfère rester à l’extérieur de la force dite du G5, qui regroupe le Niger, le Mali, la Mauritanie, le Tchad et le Burkina Faso». Pour le chef d’état-major, les priorités sont ailleurs, estime Algérie part.

«Les militaires algériens ont insisté auprès de leurs interlocuteurs français sur le renforcement des groupes armés djihadistes qui sont soutenus, de plus en plus souvent par des narcotrafiquants», et pour Alger, «le phénomène serait toléré, voire encouragé, par le pouvoir marocain».
«Autant d’accusations graves qui mettent évidemment Paris, au mieux avec Rabat, très mal à l’aise», commente le site.
 
Un autre facteur des réticences d’Alger est évoqué, lui, par le site algeriatimes.net. Sous le titre Malgré les pressions, Macron échoue à convaincre l’Algérie de se joindre à la coalition du Sahel, Mohamed Touati, un expert sécuritaire algérien, explique que «la décision de créer une force militaire est une initiative française pour rapatrier ses troupes présentes au Nord-Mali depuis quatre ans et dix mois». Raison pour laquelle selon lui «l’Algérie ne voit aucune nécessité à participer à une telle force».

La participation de la France et de conseillers américains rendent celle de l'Algérie impossible 
Dans la foulée, Mohamed Touati rappelle que «l’Algérie est liée par des accords militaires avec trois des cinq Etats concernés par la nouvelle initiative sécuritaire».
 
Et de citer l’accord de création du Comité d’état-major opérationnel conjoint (Cemoc) signé entre l’Algérie, la Mauritanie, le Niger et le Mali, en juillet 2010 à Tamanrasset, pour combattre le terrorisme et les autres formes d’insécurité. Un comité qui n’aura toutefois existé que de nom, constate le site Mali Actu.net.
 
Enfin, selon un autre expert cité par algeriatimes.net, «il aurait été possible pour l’Algérie de participer à l’initiative française avec comme condition de ne pas envoyer de troupes à l’extérieur, et de se contenter d’un soutien logistique, en armes et en formation», mais la participation militaire directe de la France et la présence de conseillers militaires américains ont rendu une participation algérienne impossible.

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