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Afghanistan : le jour où les talibans sont entrés dans Kaboul

A l'issue d'une offensive éclair, les insurgés ont atteint la capitale, dimanche. Cette journée annonce le retour au pouvoir du mouvement islamiste radical, vingt ans après en avoir été chassé.

Article rédigé par franceinfo
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Un hélicoptère américain évacue le personnel de l'ambassade des Etats-Unis à Kaboul, le 15 août 2021. (WAKIL KOHSAR / AFP)

Les talibans ont atteint Kaboul, dimanche 15 août. En tout juste dix jours d'une offensive éclair à travers l'Afghanistan, les insurgés se sont assuré le contrôle du territoire. Leur entrée dans la capitale est le symbole de leur victoire militaire totale sur l'armée et le gouvernement afghan. Le même jour, la population a appris que son président, Ashraf Ghani, avait quitté le pays. Quant aux ambassades occidentales, elles s'activent pour évacuer leurs ressortissants au plus vite.

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Franceinfo revient sur cette journée, qui annonce le retour au pouvoir du mouvement islamiste radical, vingt ans après en avoir été chassé par une coalitation internationale emmenée par les Etats-Unis.

Le drapeau taliban flotte dans Kaboul

Dimanche matin, les talibans sont aux portes de la capitale afghane. Mais un porte-parole du mouvement islamiste fait savoir sur Twitter que les combattants ont reçu l'ordre de ne pas entrer dans Kaboul. En tout début d'après-midi, une journaliste du réseau américain de télévision PBS filme cependant depuis son hôtel un groupe d'hommes tenant un drapeau taliban. Ils marchent en chantant en direction du palais présidentiel. Ils ne portent apparemment pas d'armes, selon la reporter sur place. Les talibans sont entrés dans la capitale afghane, affirme de son côté Liz Sly, correspondante du Washington Post (contenu en anglais).

Dans l'après-midi, la nouvelle tombe : le président afghan, Ashraf Ghani, a quitté le pays. Son ancien rival et vice-président Abdullah Abdullah, chef du Haut Conseil pour la réconciliation nationale, l'annonce dans une vidéo publiée sur sa page Facebook. La veille encore, Ashraf Ghani déclarait pourtant vouloir négocier pour obtenir une transition pacifique du pouvoir.

Dans la foulée, un porte-parole des talibans met en ligne un nouveau communiqué. Cette fois, les combattants islamistes ont reçu l'ordre de pénétrer dans Kaboul, afin "d'assurer l'ordre" dans les quartiers "désertés par la police". En fin d'après-midi, leur présence en armes est confirmée. Un journaliste américain de la télévision NBC témoigne sur Twitter (contenu en anglais) avoir vu des combattants talibans armés dans les rues de Kaboul. "J'imagine que beaucoup d'autres vont arriver dans les heures qui viennent", prédit-il.

Des portraits de femmes sont effacés des rues

Au fil de la journée, Kaboul change déjà peu à peu de physionomie, comme le montre cette opération pour effacer des images féminines sur les murs de la capitale, rapportée sur Twitter par un journaliste de la télévision locale.

Plusieurs milliers d'Afghans ayant travaillé pour les Américains essaient également de quitter le pays le plus vite possible, par peur des représailles. Un journaliste de la chaîne américaine de télévision NBC publie sur Twitter une photo d'Afghans remplissant les formulaires pour tenter d'obtenir un visa pour les Etats-Unis.

Au total, le Pentagone estime à quelque 30 000 le nombre de personnes qui devront être évacuées d'ici le 31 août, date fixée par le président Joe Biden pour le retrait total des forces américaines.

Les Occidentaux évacuent leurs ambassades

Comme durant la journée de samedi, les hélicoptères américains continuent dimanche leurs incessantes rotations entre l'ambassade américaine, gigantesque complexe situé dans la "zone verte" ultrafortifiée, au centre de la capitale, et l'aéroport, désormais seule voie de sortie du pays. C'est "la fin", conclut un journaliste du Wall Street Journal en tweetant cette photo de l'évacuation du personnel de l'ambassade des Etats-Unis à Kaboul, sous la protection de soldats américains.

Mais c'est un autre cliché qui frappe les esprits, abondamment relayé sur Twitter, notamment par Liz Sly. La photo d'un hélicoptère s'élevant dans le ciel de Kaboul au-dessus de l'ambassade américaine. L'image a rappelé celles du départ précipité des Américains au moment de la chute de la capitale vietnamienne en 1975, lors de la guerre du Vietnam. "Ceci n'est pas Saïgon", affirme pourtant dans le même temps sur CNN le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, en référence à ce souvenir encore douloureux pour les Etats-Unis.

Plusieurs autres pays occidentaux agissent également pour réduire au strict minimum leur présence en Afghanistan. Les autorités danoises et allemandes annoncent dimanche que tous leurs expatriés ont été transférés à l'aéroport de Kaboul. Ceux du Canada ont déjà quitté le pays, précise Ottawa. De son côté, l'Allemagne déplace dimanche son personnel diplomatique dans l'aéroport de Kaboul, avant une évacuation prévue lundi. 

L'ambassadeur de France à Kaboul, David Martinon, tweete, lui, une vidéo de son équipe évacuant la "zone verte". L'ambassade tricolore, elle aussi, est déménagée à l'aéroport, tandis que des renforts militaires et des moyens aériens sont dépêchés aux Emirats arabes unis en prévision de l'évacuation des derniers ressortissants français encore en Afghanistan.

Dimanche soir, les talibans confirment leur présence dans onze districts de la ville. Ils y poursuivent leur progression. Trois cadres talibans déclarent à l'AFP que les combattants sont désormais maîtres du palais présidentiel. Dans une rue de la capitale, un reporter filme des talibans juchés sur un Humvee, un véhicule de l'armée américaine.

A la nuit tombée, sur le tarmac de l'aéroport de Kaboul, les évacuations continuent. Un journaliste qui filme la scène évoque un "chaos absolu".

Désormais exilé dans un endroit inconnu, le président afghan Ashraf Ghani finit par expliquer avoir fui son pays pour éviter un "bain de sang". "Les talibans ont gagné (...) et sont à présent responsables de l'honneur, de la possession et de l'autopréservation de leur pays", écrit-il dans un message sur Facebook. Au même moment, la chaîne Al-Jazeera diffuse des images de combattants islamistes au sein du palais présidentiel.

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