Cinq questions sur l'enquête du Défenseur des droits sur les contrôles au faciès
Les jeunes hommes "perçus comme noirs ou arabes" ont vingt fois plus de probabilités d'être contrôlés, selon une enquête réalisée par le Défenseur des droits. Les associations ne sont pas surprises.
C’est un rapport de 45 pages qui rappelle que le contrôle au faciès est toujours une réalité en France. Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a publié, vendredi 20 janvier, les résultats d'une enquête menée au début de l’année 2016 auprès d’un échantillon représentatif de plus de 5 117 personnes en France métropolitaine, une première à l’échelle nationale. Franceinfo en résume les principaux points à travers cinq questions.
Quelles sont les conclusions de l’enquête ?
D’après les travaux menés l'an dernier par le Défenseur des droits, les jeunes Noirs ou Arabes ont vingt fois plus de probabilités d'être contrôlés par la police. En clair, 80% des personnes correspondant au profil de "jeune homme perçu comme noir ou arabe" déclarent avoir été contrôlées durant les cinq dernières années. Elles ne sont que 16% dans le reste des personnes interrogées. Des chiffres qui renforcent l’idée de contrôles "au faciès".
L'enquête révèle également "des relations plus dégradées" entre les forces de l'ordre et les jeunes hommes issus des minorités visibles. Ils déclarent avoir été davantage tutoyés (40% contre 16% de l'ensemble), davantage insultés (21% contre 7% de l'ensemble) et davantage brutalisés (20% contre 8% de l'ensemble) lors du dernier contrôle qu'ils ont vécu.
Comment réagissent les associations ?
Le collectif Stop le contrôle au faciès n'est pas surpris par ces résultats. "Les années passent et rien ne change, regrette son porte-parole Nassim Lachelache, joint par franceinfo. Cela fait maintenant plus de cinq ans qu'on dénonce ces abus à coups de tracts, d'opérations coups de poing, de rapport. Mais la situation est toujours la même."
D'ailleurs, Nassim Lachelache a décidé de ne solliciter aucun candidat à la présidentielle cette année, "trop déçu" par François Hollande. "Lors de sa campagne en 2012, il avait promis de mettre en place la traçabilité des contrôles d'identité. Mais il n'a pas tenu parole. C'était juste une manière de séduire les jeunes de banlieue. On ne nous la fera pas deux fois."
Qu'est-ce que la traçabilité ?
Il s’agit en fait de contrôler les contrôles. Dans la grande majorité des cas, il n'y a aujourd'hui aucune trace lorsque des policiers effectuent un contrôle d'identité. La traçabilité obligerait le policier à donner à la personne contrôlée un récépissé. L’idée, défendue par une partie de la gauche, a été abandonnée en juin 2016 par la commission des finances de l'Assemblée nationale. Trop cher, avait-elle invoqué à l’époque.
Que recommande le Défenseur des droits ?
Jacques Toubon préconise une nouvelle fois la mise en place d'une traçabilité des contrôles d'identité. Car son absence "empêche [de] déterminer précisément les contours [des contrôles] ou d’évaluer [leur] efficacité", regrette le Défenseur des droits dans les colonnes du Monde. Cette traçabilité permettrait aux personnes s'estimant victimes de discriminations ou de manquements à la déontologie de déposer des recours.
Il souhaite également "être associé à l'expérimentation, prévue par la prochaine loi relative à l'égalité et à la citoyenneté, de l'enregistrement audiovisuel systématique de chaque contrôle d'identité".
Que doit faire le Conseil constitutionnel ?
Mardi 24 janvier, le Conseil constitutionnel doit se prononcer sur une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la question des contrôles d'identité discriminatoires. Selon Le Monde, plusieurs associations soutiennent cette action. Parmi elles, le Gisti (Groupe d'information et de soutien des immigrés), le Syndicat de la magistrature, mais aussi le Syndicat des avocats de France.
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