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Ce que l'on sait de la mort d'une femme enceinte attaquée par des chiens dans une forêt de l'Aisne

L'autopsie a permis d'établir que la mort d'Elisa Pilarski avait "pour origine une hémorragie consécutive à plusieurs morsures de chiens aux membres supérieurs et inférieurs ainsi qu'à la tête".

Article rédigé par franceinfo
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La forêt de Retz (Aisne), où le corps d'Elisa Pilarski a été retrouvé par son compagnon le 16 novembre 2019. (MAXPPP)

Que s'est-il passé, samedi 16 novembre, dans la forêt de Retz (Aisne) ? Elisa Pilarski, jeune femme de 29 ans, y a été retrouvée morte, victime d'une attaque de chiens, dans des circonstances encore troubles, et alors qu'une chasse à courre était organisée à proximité. Le parquet de Soissons a annoncé, mercredi 20 novembre, l'ouverture d'une information judiciaire. Voici ce que l'on sait de ce fait divers.

Qui est la victime ?

Originaire de Rebenacq (Pyrénées-Atlantiques), Elisa Pilarski était âgée de 29 ans. Elle partageait avec son compagnon Christophe, rencontré lors d'un concours canin, une passion pour les animaux, écrit Le ParisienLe couple possédait d'ailleurs cinq chiens de race american staffordshire, dont les photos s'affichent par dizaines sur le profil Facebook de la jeune femme.

Celle-ci, férue d'équitation, était enceinte de 6 mois. Le couple projetait d'ailleurs de "redescendre dans quelques jours dans les Pyrénées, où Elisa avait prévu d'accoucher", détaille le quotidien francilien.

Samedi, en milieu de journée, Elisa Pilarski s'est rendue seule à Saint-Pierre-Aigle, en bordure de la forêt de Retz, pour y promener un de ses chiens, Curtis. C'est là que son corps, marqué par des morsures canines, a été retrouvé par son compagnon aux alentours de 15 heures.

Que s'est-il passé ?

C'est la question qui obsède les enquêteurs. D'après Le Parisien, la jeune femme a d'abord posté à 12h16 un message sur Facebook racontant avoir eu une altercation avec le propriétaire d'un "malinois pas attaché", qui lui aurait foncé dessus, sans que l'on sache précisément si cet événement a eu lieu avant ou après son arrivée dans la forêt.

Christophe, qui travaillait ce jour-là à l'aéroport de Roissy, situé à environ 70 km de la forêt, a de son côté raconté aux autorités avoir été contacté par sa compagne peu après 13 heures. Paniquée, elle lui aurait alors "signalé la présence de chiens menaçants", selon le parquet, avant de lui demander de la rejoindre au plus vite. Cet élément intéresse particulièrement les enquêteurs, car plusieurs dizaines de chiens participaient à une chasse à courre à proximité des lieux.

Christophe a raconté à France 3 avoir cherché partout sa compagne une fois arrivé sur place. "J'ai retrouvé une partie de ses affaires d'abord, un gilet, une écharpe", explique-t-il. Il sillonne le bois et décide d'appeler leur chien, Curtis. "Je l'ai entendu et j'ai pu suivre ses aboiements, poursuit-il. C'est à ce moment-là que j'ai vu une meute, ils étaient peut-être une trentaine, ils sont venus vers moi, mais ils n'avaient pas l'air méchants." Quelques minutes plus tard, Christophe retrouve son chien stoïque, près de ce qu'il pense être un tronc d'arbre.

J'ai descendu le précipice, je me suis approché et je me suis rendu compte que le tronc d'arbre, c'était le ventre de ma femme. Ma femme a été dévorée.

Christophe, le concubin de la victime

à France 3

Prévenus, des riverains ont ensuite appelé la police.

Qu'a révélé l'autopsie ?

L'autopsie réalisée lundi a permis d'établir que la mort d'Elisa Pilarski avait "pour origine une hémorragie consécutive à plusieurs morsures de chiens aux membres supérieurs et inférieurs ainsi qu'à la tête", a indiqué le procureur de Soissons, Frédéric Trinh, dans un communiqué. Des prélèvements ADN ont été effectués sur 67 chiens : cinq appartenant au couple et 62 chiens "ayant participé à [la] chasse à courre (...) organisée à proximité", ont précisé les autorités. Il s'agit désormais "d'identifier le ou les chiens mordeurs", ajoute le parquet, précisant que les morsures sont à la fois "ante mortem" et "post mortem".

Une information judiciaire a été ouverte contre X pour "homicide involontaire par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement résultant de l'agression commise par des chiens". Fait notable, elle a été confiée à la section de recherche d'Amiens (Somme) et non à la gendarmerie locale. Une décision que le parquet a expliquée à franceinfo par le souhait d'éviter toute collusion : un lieutenant-colonel de la gendarmerie de l'Aisne, Jean-Charles Métras, était en effet présent parmi les chasseurs à la courre.

France 3 Hauts-de-France ajoute que le propriétaire du chien malinois avec lequel la victime a raconté avoir eu une altercation "n'a pas été identifié et donc n'a pas pu être entendu". Il est actuellement recherché.

Comment se défendent les chasseurs ?

Comme le rapporte Le Parisienles 62 chiens qui ont participé à la chasse à courre sont ceux de l'association Le Rallye de la passion. D'habitude, cet équipage de chasse à courre ne se rend en forêt "qu'en semaine et le dimanche". Il aurait bénéficié, d'après le quotidien francilien, d'une dérogation à l'occasion de la Saint-Hubert, le patron des chasseurs. 

De son côté, la société de vénerie, représentante des chasseurs à courre, et son président Pierre de Roualle contacté par franceinfo, nient toute responsabilité dans la mort d'Elisa Pilarski. Selon elle, "le décès aurait eu lieu entre 13 heures et 13h30, avant que la meute ne commence à chasser"Dans un communiqué publié mardi soir, elle assure qu'"au cours des 18 000 journées de chasse à courre organisées chaque année à travers 70 départements, jamais aucun accident corporel humain impliquant des chiens de vénerie n'a été relevé", et qu'en l'état des investigations, "rien ne démontre l'implication des chiens de chasse dans le décès de cette femme".

Jeudi soir, cette société de vénerie a affirmé qu'aucun des chiens n'était impliqué. Elisa Pilarski "promenait son chien Curtis, un American Staff, un chien de combat (...), dont on ne peut imaginer qu'il ait laissé sa maîtresse se faire dévorer sans la défendre! Or, des vétérinaires mandatés par les gendarmes ont inspecté les 62 chiens de l'équipage et aucun ne présentait de traces de morsure", a déclaré  à l'AFP Antoine Gallon, directeur de la communication de la société de vénerie. Le maître d'équipage de cette chasse, Sébastien Van den Berghe, "possède 62 chiens; 21 étaient à la chasse, 41 n'y étaient pas. Tous ont été auscultés", a insisté Antoine Gallon, ce qui "disculpe totalement la chasse à courre", a-t-il affirmé.

Selon cette organisation, les meutes de chasse à courre comptent en France plus de 30 000 chiens, répartis dans 390 équipages. "Ces chiens sont dressés pour chasser un animal particulier et obéir en toute circonstance à l'homme", indique-t-elle.

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