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Témoignages Affaire Daval : "C’est nous qui avons pris perpétuité", confient les parents d’Alexia

Le procès de Jonathann Daval, accusé du meurtre de sa femme Alexia en octobre 2017, débutera lundi 16 novembre. Entretien avec les parents de la victime.

Article rédigé par David Di Giacomo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Les parents d'Alexia Daval, Isabelle et Jean-Pierre Fouillot, dans leur salon. (DAVID DIGIACOMO / RADIO FRANCE)

Les parents d’Alexia Daval témoignent jeudi 12 novembre sur franceinfo alors que le procès de Jonathann Daval s’ouvre lundi devant la cour d’assises de Vesoul (Haute-Saône). Isabelle Fouillot, la mère d’Alexia, dit attendre de ce procès "qu’on mette le mot coupable" sur Jonathann Daval pour le meurtre de son épouse en octobre 2017. "Mais ça ne changera pas notre douleur à nous, ajoute-t-elle. C’est nous qui avons pris le plus cher. C’est nous qui avons pris perpétuité. C’est Alexia qui n’est plus là."

>> Regardez "Envoyé spécial" du 12 novembre : Jonathann Daval, le suspect aux deux visages

Les parents d’Alexia Daval sont encore sous le choc d’avoir été trompés par Jonathann Daval, qui a joué le veuf éploré pendant trois mois avant de reconnaître avoir frappé et étranglé sa femme. Il est par la suite revenu sur ses aveux et parle alors d'un complot familial. "On n’a jamais rien vu venir, c’est ce qu’on se reproche moi et mon épouse", regrette le père d’Alexia, Jean-Pierre Fouillot.

franceinfo : Que pensez-vous de Jonathann Daval, votre gendre, aujourd'hui accusé du meurtre de votre fille Alexia ?

Isabelle Fouillot : Au début, c'est un garçon qu'on a aimé, puis, au fil du temps, on a découvert un personnage qu'on ne connaissait pas. On se rend compte que ce personnage a menti à tout le monde, à notre famille, à la France entière. Je ne sais pas s'il a menti à sa famille. Il a divers visages et on était loin de le connaître. Il n'a pas dû aimer Alexia ni nous aimer, avec tout ce qu'il nous a fait en nous accusant de meurtre et en tuant sa femme. Il ne faut pas qu'on me parle d'amour. 

Qu'est-ce que vous attendez de ce procès devant la cour d'assises de Vesoul ?

Isabelle Fouillot : Qu'on mette le mot coupable, ça c'est sûr. Mais, ça ne changera pas notre douleur. C'est nous qui avons pris le plus cher, c'est nous qui avons pris perpétuité. C'est ça qui me fait mal, c'est Alexia qui n'est plus là. On va au cimetière sans arrêt. Et Alexia, j'ai besoin de la faire exister, autrement j'aurai tout perdu. 

Alexia me manque terriblement. Il ne se passe pas une journée sans qu'on pleure.

Isabelle Fouillot

à franceinfo

Jean-Pierre Fouillot : On dit que l'amour rend aveugle. Mais c'est vrai qu'on était en plein dans le système. On n'a jamais rien vu venir, c'est ce qu'on se reproche, moi et mon épouse. On aurait voulu qu’il y ait un effet déclencheur sur des phrases, des événements.... mais non, jamais, jamais. On n'a rien décelé de tous ses mensonges, aussi bien avant le drame qu'après. C'est surtout après ces trois mois qui ont suivi le drame que Jonathann nous a menés dans un bateau incroyable.

Pendant ces trois mois qui ont suivi la mort d'Alexia, Jonathann Daval venait souvent chez vous. Vous étiez alors très proches de lui ?

Jean-Pierre Fouillot : Oui, il était avec nous, tous les soirs. Il pleurait avec nous, et disait "Alexia me manque". Jonathann, il agissait comme un vrai mari éploré.

Isabelle Fouillot : Il nous envoyait des messages d'amour tous les soirs quand il rentrait et qu’il partait : "Je vous aime, maman". Des messages d'amour. Nous, on y croyait. C'est vrai que Jonathann, s'il n'avait pas été arrêté, il serait encore là avec nous.

Il voulait rester le fils auprès de nous, sans doute. Il voulait remplacer Alexia. Ça fait froid dans le dos. Heureusement que tout ça est fini parce que je n'ose même pas imaginer la suite.

Isabelle Fouillot

Jean-Pierre Fouillot :  On se demande, comment il était capable d'agissements aussi pervers, qui nous ont fait autant de mal.

Ensuite votre gendre est arrêté. Il avoue le meurtre, mais il revient sur ses aveux. Il parle alors d'un complot familial. Il dit qu'Alexia a été tuée dans votre maison, et que vous avez caché tout ça...

Jean-Pierre Fouillot :  Là, c'est rocambolesque. Dans un premier temps, on n'y croit pas. Non seulement on n'y croit pas, mais on ne comprend pas ce qu'on nous dit, dans le bureau du juge. On se regarde, on avait presque envie d'en rire au départ, mais on s'est tout de suite rendu compte qu'il fallait prendre ça au sérieux.

Comment vous vous expliquez que cette affaire ait été autant suivie par les médias ?

Isabelle Fouillot : C'était au deuxième jour de la disparition d'Alexia. Je pense que c’est le mensonge qui faisait croire à un meurtre de joggeuse. C'est vrai que ça résonne beaucoup dans la tête des gens. Et aprè, Alexia, c'est une jeune fille pétillante et pleine de vie. Je pense que tout le monde s'identifie à Alexia. Toutes les lettres que j'ai reçues... Beaucoup de gens s'identifient à notre famille, des gens simples, de famille moyenne. Je pense que l'identification, elle est là.

Jonathann Daval, on le rappelle, reste présumé innocent et sera jugé à partir de lundi pour le meurtre de son épouse. Si on oublie tous ces rebondissements, pour vous, c'est finalement le procès d'un féminicide ?

Isabelle Fouillot : Bien sûr, oui. C'est ce que je dis à chaque fois, c'est une histoire récurrente : les violences faites aux femmes, c'est toujours la femme qui l'a cherché. Mais voilà, moi, je suis la maman d'Alexia et il faut que les mentalités évoluent à ce sujet-là. Une femme ne demande pas à mourir sous les coups de son compagnon. Ce n'est quand même pas normal dans nos sociétés ! Alexia aurait sans doute voulu divorcer, se séparer, puis refaire sa vie avec quelqu'un d'autre. C'était comme si Alexia, c'était sa propriété. Il a décidé de la tuer ! Je pense que dans l'esprit des garçons, il va falloir faire évoluer ce sentiment de propriété. Si ça peut servir à d'autres histoires, tant mieux. Mais nous, on n'a rien vu venir, c'est ça notre drame.

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