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Violences après la mort de Nahel : comment se faire indemniser en cas de dégâts ou de vols ?

Au moins 5 800 véhicules ont été incendiés et environ 1 100 bâtiments ont été brûlés ou dégradés, selon le ministère de l'Intérieur. Franceinfo vous explique les démarches à effectuer pour les victimes des émeutes.
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La vitrine d'une boutique de vêtements brisée, à Saint-Etienne (Loire), le 30 juin 2023. (REMY PERRIN / MAXPPP)

Après les nuits d'émeutes en réaction à la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué lors d'un contrôle de police à Nanterre, l'heure est au constat pour les commerces visés par des pillages et des dégradations et les particuliers dont les voitures ont été brûlées. Le ministère de l'Intérieur a recensé, mardi 4 juillet, plus de 5 800 véhicules incendiés et 1 100 bâtiments brûlés ou dégradés. Rien qu'à Marseille, "quasiment 400 commerces" ont été vandalisés, selon le président de la chambre de commerce et d'industrie

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Pour l'heure, la fédération France Assureurs a recensé "5 800 sinistres déclarés". Face à cette situation, Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, a appelé samedi les assureurs à "faire preuve de la plus grande simplicité dans le traitement des procédures". Quelles sont les conditions pour être indemnisé ? Quelles sont les démarches à réaliser ? Franceinfo fait le point.

Tout dépend du contrat des particuliers

Pour être protégé par votre assurance en cas d'incendie ou de dégâts sur votre voiture, vous devez avoir souscrit à une garantie "incendie" ou à une garantie "dommages" – des protections facultatives. Les contrats d'assurance auto "tous risques", qui sont les plus complets, ouvrent également le droit à une indemnisation.

En revanche, si vous avez souscrit à contrat d'assurance automobile "au tiers", limité à la seule "responsabilité civile", celui-ci ne vous couvre que pour les dommages causés aux autres. "Les dommages subis par votre véhicule incendié ne pourront donc pas être indemnisés à ce titre", écrit France Assureurs sur son site.

Pour être indemnisés, "les assurés doivent immédiatement déposer plainte auprès des autorités de police" et déclarer les dommages à leur assureur "dans les cinq jours" à compter du jour où vous avez constaté le sinistre, détaille France Assureurs. La fédération appelle toutefois les assureurs à prolonger exceptionnellement ce délai de déclaration "jusqu'à 30 jours". Interrogé par franceinfo, Olivier Moustacakis, cofondateur du comparateur en ligne d'assurances Assurland.com, conseille de prendre en priorité contact avec son assureur, même si l'ampleur des destructions n'est pas encore précisément connue.

"Le plus important, c'est de prévenir immédiatement l'assureur pour qu'il enregistre votre déclaration de sinistre. Un simple coup de téléphone peut suffire."

Olivier Moustacakis, cofondateur du comparateur en ligne Assurland

à franceinfo

Un expert professionnel sera ensuite désigné par votre assureur pour évaluer le montant des dommages. Dans la plupart des cas, cette évaluation "a lieu dans la semaine ou la quinzaine qui suit la déclaration de sinistre", selon France Assureurs. Le montant de l'indemnisation dépendra de la valeur de votre véhicule, mais aussi de la franchise prévue par votre contrat, précise Service-Public.fr.

Les commerçants sont généralement couverts

Pour les professionnels, les dommages matériels subis par un commerce sont pris en charge par la garantie "émeutes et mouvements populaires", selon France Assureurs, qui ajoute que "la quasi-totalité" des contrats couvrant les commerces prévoient cette garantie. "C'est une garantie assez standard" chez les professionnels, qui bénéficient le plus souvent d'une assurance multirisque, confirme Olivier Moustacakis. Comme les particuliers, les professionnels doivent porter plainte et déclarer le sinistre auprès de leur assureur. "Cette déclaration doit se faire le plus rapidement possible", met en garde France Assureurs, le plus souvent dans un délai de cinq jours.

Concernant le montant d'indemnisation en cas de pillage, il dépend du "prix des produits volés, dans la limite des plafonds souscrits et des franchises appliquées et selon les conditions prévues par votre contrat", précise Generali sur son site. Il en va de même pour les dégradations dans le magasin. Pour aider les commerçants, Bruno Le Maire a demandé aux assureurs de "réduire au maximum les franchises" qu'elles appliquent. "Tout dépend de votre capacité de négociation avec votre assureur", mais en théorie, "la franchise est un élément constitutif du contrat" et peut donc difficilement être revue à la baisse, tempère cependant Olivier Moustacakis.

Les commerçants peuvent par ailleurs souscrire à une garantie "perte d'exploitation". Elle permet d'indemniser la perte de chiffre d'affaires, "si un magasin est contraint de fermer pendant quelques semaines, le temps que des travaux soient faits pour réhabiliter la vitrine ou réparer les dommages liés à un incendie par exemple", illustre Olivier Moustacakis. Le montant de cette indemnisation est généralement calculé en prenant pour référence le chiffre d'affaires de l'année précédente sur la même période. Toutefois, seule "la moitié" des commerçants et des entreprises a souscrit à cette protection, estime France Assureurs dans Le Parisien.

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a par ailleurs enjoint les assureurs à "indemniser rapidement les professionnels victimes des émeutes", dans "des délais qui doivent se chiffrer en jours et pas en semaines". D'ordinaire, le temps de traiter le dossier et de mandater un expert pour venir constater les dégâts, le délai d'indemnisation est de l'ordre de "quelques semaines", rappelle Olivier Moustacakis. France Assureurs a invité les compagnies d'assurance à "accélérer le processus d'indemnisation" en priorisant les expertises des "cas les plus sensibles" et à "faciliter le versement d'acomptes pour faire face aux situations les plus difficiles".

Des recours sont possibles auprès de l'Etat

Pour les victimes, particuliers comme professionnels, dont les dommages ne sont pas couverts par l'assurance, il est possible de se tourner vers la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions. Elle permet de percevoir une indemnisation, qui reste néanmoins plafonnée à 4 601 euros, et versée sous conditions de ressources.

Pour en bénéficier, les revenus annuels d'une personne seule ne doivent pas dépasser 18 404 euros, selon le barème publié sur le site du ministère de l'Intérieur. Par ailleurs, dans le cas d'une voiture incendiée, celle-ci doit au moins être assurée au minimum légal, c'est-à-dire "au tiers", et il est nécessaire de présenter le certificat de passage au contrôle technique "si le véhicule a plus de quatre ans", détaille France Assureurs.

En cas de dégâts matériels liés à des "violences urbaines", vous pouvez enfin vous tourner vers l'Etat en présentant votre réclamation à la préfecture, poursuit la fédération. L'article L. 211-10 du Code de la Sécurité intérieure prévoit en effet que "l'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis (...) par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens". La demande doit être examinée par un tribunal administratif. "C'est une procédure qui peut être assez longue", prévient toutefois Olivier Moustacakis.

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