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Défaillances mécaniques, vitesse trop élevée... Un expert liste les hypothèses après l'accident de Puisseguin

L'expert Christophe Ledon analyse les circonstances de l'accident, le plus meurtrier depuis 30 ans, à partir de ce que l'on sait.

Article rédigé par Violaine Jaussent - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Une vue aérienne de la collision frontale entre un bus et un camion qui a fait au moins 43 morts à Puisseguin (Gironde), le 23 octobre 2015. (REGIS DUVIGNAU / REUTERS)

Le drame a provoqué une vive émotion. Une collision entre un bus et un camion a fait 43 morts et quatre blessés graves, vendredi 23 octobre, à Puisseguin (Gironde). L'accident s'est produit à la sortie du village, au bord d'une forêt, sur une route départementale "très sinueuse" avec "une enfilade de virages serrés". Les deux véhicules se sont embrasés aussitôt, selon les pompiers.

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Pour tenter de comprendre comment le choc a pu se produire, francetv info a interrogé Christophe Ledon, expert en accidentologie. En attendant l'avancée de l'enquête, il évoque plusieurs hypothèses.

Francetv info : Comment expliquer que les deux véhicules se soient embrasés si rapidement ?

Christophe Ledon : Je ne peux pas répondre précisément, mais un départ de feu peut se produire à l'issue d'un choc, lorsqu'un véhicule percute le réservoir de carburant d'un autre. Sur la vue aérienne de l'accident, on ne voit pas clairement si c'est le cas. Il faut donc rester prudent, ne pas interpréter hâtivement. Je ne me suis pas rendu sur place, je donne des éléments à partir des images filmées d'un hélicoptère et diffusées dans les médias.

Sur une voiture, le réservoir de carburant est souvent situé à l'arrière, donc en cas de collision frontale, l'incendie est rare. Mais sur un camion c'est différent. Celui-ci est composé d'un tracteur avec une cabine, où se trouve le poste de conduite, et d'un châssis, où se pose la remorque. Le réservoir est situé sur le châssis, derrière la cabine. Cette dernière a été percutée. Un incendie a donc pu démarrer, surtout s'il était en travers de la route. Son réservoir est plus facilement exposé. Mais encore une fois, ce sont des hypothèses, à confirmer ou infirmer. Seule l'enquête pourra faire la lumière sur la question.

Effectivement, le chauffeur du bus a expliqué "qu'il s'est trouvé face à un camion en portefeuille" qu'il n'a pas pu éviter. Comment ce camion, un grumier qui roulait à vide, a-t-il pu se retrouver en travers de la route ?

Si un camion va trop vite, il peut se retrouver "en portefeuille". Cela signifie que la remorque se replie contre le tracteur. Quand la vitesse n'est pas adaptée à l'entrée de la courbe, la cabine et son conducteur vont dans un sens et la remorque de l'autre.

Ce n'est pas la seule hypothèse. Un freinage violent peut provoquer un déséquilibre. Le tracteur ralentit, mais la remorque à l'arrière ne ralentit pas autant. Elle va donc pousser sur l'avant du camion et créer la mise en travers du véhicule.

Toutefois, la mise en travers n'est pas avérée. Le camion a pu simplement se déporter sur la route, pour une raison X ou Y. Une défaillance mécanique a aussi pu survenir : freins défectueux, suspension à revoir... L'examen complet du véhicule nous apprendra si c'était le cas.

L'accident a eu lieu sur une partie de la RD 17, dont le revêtement a été refait en 2011 et la signalisation horizontale en 2012. Est-ce que cela change quelque chose ?

Non. Ce n'est pas parce qu'elle est refaite que cela réduit le risque d'accident. Un meilleur revêtement n'améliore que le confort de conduite. Si le rayon de courbure est trop serré par rapport à la vitesse autorisée, il y aura toujours des accidents. La route peut être jugée bonne par des automobilistes, mais pas adaptée pour des camions. Est-ce vraiment un lieu pour les poids lourds ? C'est la question à se poser, je pense. On peut aussi se demander si le chauffeur était perdu, si son GPS lui avait indiqué cette route pour aller plus vite...

Et maintenant, comment l'enquête va-t-elle être menée ? Comment les experts peuvent-ils savoir si l'un des véhicules roulait trop vite ?

La phase actuelle, c'est l'enquête de flagrance. Les gendarmes sont en train de figer la scène. Ils établissent le procès-verbal avec la scène de l'accident, le plan et les témoignages recueillis. Puis une information judiciaire va être ouverte, et un juge d'instruction saisi de l'enquête. C'est lui qui va désigner un expert.

La vitesse des véhicules sera déterminée grâce à des chronotachygraphes, des appareils qui enregistrent l'allure sur des véhicules utilitaires. Ils peuvent être en papier ou numériques. Mais ils doivent surtout être en état pour être exploités. Ils peuvent avoir brûlé dans le cas de cet accident. Sinon, la vitesse peut se calculer avec le crash-test. Les traces des pneus peuvent aussi apporter des précisions. L'enquête est donc déterminante.

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