Résultats des législatives 2024 : on vous explique pourquoi il faut prendre les projections en sièges avec des pincettes

Les instituts de sondage estiment que le Rassemblement national pourrait obtenir une majorité relative voire absolue à l'issue du second tour. Mais ces projections ne tiennent pas compte des éventuels désistements et des consignes de vote.
Article rédigé par franceinfo
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Un électeur vote pour le premier tour des élections législatives, le 30 juin 2024, à Forcalquier (Alpes-de-Haute-Provence). (LOUAI BARAKAT / HANS LUCAS / AFP)

A 20 heures, dimanche 30 juin, un hémicycle dominé par la couleur bleu marine s'est dessiné sur les écrans de télévision des différentes chaînes de télévision. En l'état, les différentes projections des instituts de sondage anticipent une large majorité relative du Rassemblement national, voire une courte majorité absolue. Selon la projection Ipsos-Talan pour France Télévisions, Radio France, France 24, RFI et LCP réalisée sur la base des résultats du premier tour, le RN et ses alliés pourraient disposer de 230 à 280 députés, soit bien plus que lors de la précédente législature (88 députés). Le Nouveau Front populaire, lui, n'aurait qu'entre 125 à 165 sièges. 

Mais ces projections en sièges fournies hier, au soir du premier tour, sont à prendre avec une grande prudence. Les fourchettes fournies par les instituts de sondage sont le résultat d'une combinaison complexe, avec une prise en compte des situations locales et l'application d'un coefficient lié aux résultats passés dans le territoire.

Mais tous les sondeurs reconnaissent les limites de ces chiffres livrés dès le soir du premier tour. "C'est comme si le soir du premier tour de la présidentielle, on essayait de donner le score du deuxième tour", explique Jérôme Fourquet, directeur du département opinion de l'Ifop, dans Le Monde. Le sondeur ajoute qu'il existe une "pression médiatique et politique très forte pour qu'il y ait des projections en sièges", malgré la fiabilité relative de ces projections. 

Il est d'usage d'être très précautionneux dans le maniement des sondages, mais en matière de projection en sièges, il faut donc redoubler de vigilance. "Un tel exercice ne présente pas les mêmes encadrements méthodologiques que les sondages et demeure tributaire d'un grand nombre de paramètres, souvent propres à chacune des 577 circonscriptions", met aussi en garde la commission des sondages.

Des contextes particuliers dans chaque circonscription

A ce stade, les projections en siège ne prennent pas en compte les dynamiques d'entre-deux-tours à l'échelle locale dans chacune des circonscriptions. Elles ont été réalisées avant l'annonce des potentiels désistements, alors même que le premier tour a accouché de 306 triangulaires et de quatre quadrangulaires. A titre de comparaison, il n'y avait eu que huit triangulaires en 2022.

Au cours de la soirée électorale, les consignes des différents blocs politiques ont été égrenées. Les responsables des partis de gauche ont demandé à leurs candidats arrivés en troisième position de se désister quand les candidats du Rassemblement national sont arrivés en tête. Le camp présidentiel hésite encore entre une position analogue et un principe de "ni RN, ni LFI", exprimé notamment par l'ancien Premier ministre Edouard Philippe. Enfin, Les Républicains ont refusé de donner des consignes de vote.

Pour affiner la projection, le comportement des différents candidats sur le terrain doit être observé. Ils peuvent choisir de se maintenir malgré les appels au désistement. Certains ont déjà annoncé le retrait de leur candidature, comme la macroniste Albane Branlant dans la 1re circonscription de la Somme, où François Ruffin fait face à la poussée du RN, ou les ministres Sabrina Agresti-Roubache et Marie Guévenoux, qui sont arrivées en troisième position. A l'inverse, certains candidats font de la résistance, comme Graig Monetti (Horizons), qui a choisi de maintenir sa candidature, malgré sa troisième place, derrière Eric Ciotti (LR-RN) et Olivier Salerno (LFI).

Un report de voix défavorable à l'extrême droite ?

Au-delà des candidats, les consignes de vote sont-elles suivies par les électeurs ? Le "front républicain" qui a longtemps existé pour faire barrage à l'extrême droite s'est largement fissuré ces dernières années, à l'image de la position prise dimanche soir par Les Républicains. La gauche radicale est désormais également perçue comme une menace. Parmi les électeurs, au sein de ceux qui votent avant tout pour "faire barrage", 52% le font pour contrer le RN, quand 36% le font pour faire barrage au Nouveau Front populaire, selon une récente enquête Ipsos pour Radio France. Par ailleurs, l'alliance de gauche est rejetée par 63% des personnes interrogées.

Pour autant, les retraits de certaines candidatures devraient tout de même avoir un impact sur les résultats. "Même si les électeurs ne suivent pas les consignes mécaniquement de leurs responsables politiques, on aura un effet qui jouera plutôt en défaveur du RN", a commenté Brice Teinturier, le directeur général délégué d'Ipsos, sur France Inter. "Ces retraits peuvent faire perdre entre 20, 30 circonscriptions, voire un peu plus, au Rassemblement national", a-t-il ajouté sur France 2. Selon le politologue, à l'heure actuelle, le RN s'oriente donc vers "une majorité relative" plutôt qu'une majorité absolue.

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