Élections européennes : les candidats d'Outre-mer pas toujours bien positionnés dans les listes nationales
Le nouveau mode de scrutin français prévoit que chaque parti doit présenter une seule liste pour tout le territoire. Les Ultra-marins s'inquiètent des conséquences sur leur représentativité.
"Quand vous voyez la faible population en Guyane, personne ne va mettre un Guyanais en position éligible." Louis-Joseph Manscour, député européen d'Outre-mer, est amer. Les partis politiques avaient jusqu'au vendredi 3 mai au soir pour déposer leur liste de candidats aux élections européennes, qui se déroulent le 26 mai. La nouveauté en France pour ces élections réside dans le passage à une circonscription unique. Fini les huit circonscriptions : désormais, chaque parti présente une seule liste qui est la même sur tout le territoire français. Pour les territoires ultra-marins, la représentativité n'est pas toujours au rendez-vous.
Des candidats mieux placés dans les partis bien classés
Si l'on jette un œil aux listes des partis les plus traditionnels, il est souvent difficile de trouver des candidats d'Outre-mer. Ainsi, l'alliance PS-Place publique n'en compte aucun dans les premiers noms dévoilés. Les Patriotes et Debout la France ne présentent qu'un ultra-marin chacun. Le mouvement de Florian Philippot l'a relégué en fin de liste, à la 55e place. Du côté des Républicains, le premier nom est en 20e position, le candidat n'est donc a priori pas éligible, à l'image d'Europe-Ecologie Les Verts qui positionne son premier candidat ultra-marin en 19e position. Même configuration du côté de Génération-s, où Alain Bénard, Réunionnais, n'est que 23e.
Les partis les mieux classés dans les sondages ont, eux, placé des citoyens d'Outre-mer en plus haute position. Ainsi, Stéphane Bijoux est en 10e place de la liste Renaissance, le mouvement initié par La République en marche. Trois autres candidats figurent sur la liste, aux 24e, 34e et 37e rangs. Le Rassemblement national a choisi Maxette Pirbakas pour être en 12e place et positionne trois autres personnes en 25e, 60e et 61e position. Younous Omarjee, actuel député européen de la circonscription d'Outre-mer, figure en 4e place de la liste de La France insoumise.
C'est un mode de scrutin mis en place par le président de la République parce qu'il n'a pas de représentants en région
Louis-Joseph Manscour, député européen d'Outre-merà franceinfo
Celui qui appartient au Parti socialiste estime qu'il s'agit de "calculs politiciens qui ne profitent pas aux citoyens de nos territoires". Et craint un désintérêt encore plus fort pour ces élections : "Vous aurez non pas 10% de participation en Guyane mais seulement 5%", avertit le Martiniquais. "Les gens n'iront pas voter parce qu'ils n'ont pas le sentiment d'être représentés." Il estime que les représentants d'Outre-mer sont essentiels au Parlement européen. "Comment voulez-vous faire comprendre aux ultra-marins que l'Europe est leur quotidien sans député européen pour leur en parler ?" "C'est l'opportunité de ramener les régions ultrapériphériques au centre du débat européen", répond Stéphane Bijoux, candidat réunionnais sur la liste Renaissance.
"Ceux qui nous ont critiqué en disant qu'il n'y aurait plus de parlementaires ultra-marins au Parlement européen se sont trompés", poursuit Stéphane Séjourné, directeur de campagne de Renaissance. "On a pris ces citoyens en compte dans la composition de notre liste et on a même fait plus en mettant deux personnes en position éligible", assure-t-il. Pas sûr cependant que Max Orville, 24e sur la liste, accède à l'hémicycle. Même son de cloche du côté d'EELV : "Nous avons deux ultra-marins qui ne sont pas en bas de liste. Ils sont pris en compte", affirme un cadre du parti. Et Stéphane Séjourné d'asséner : "C'est à chaque liste de prendre ses responsabilités."
Le projet avant les candidats
Même s'il est possible que le prochain Parlement européen compte autant d'ultra-marins que lors de cette mandature (voire plus), Louis-Joseph Manscour craint que l'équilibre entre les différents territoires ne soit plus respecté, avec une surreprésentation de ceux situés dans l'océan Indien. "Stéphane Bijoux ne sera pas territorialisé, il aura vocation à représenter l'ensemble des ultra-marins", promet Stéphane Séjourné, quand EELV jure que "nos députés européens défendent les ultra-marins comme ils défendent les autres". Le parti écologiste se dit par ailleurs convaincu que ce ne sont pas les candidats qui importent. "Ce qui compte, c'est le projet et comment on va défendre ces territoires. Pour cela, on n'a pas besoin de mettre quelqu'un du coin, on n'est pas du tout dans ce calcul électoral."
Le Rassemblement national, lui, veut mettre en avant une forte orientation envers les Outre-mer. Deux candidats sont en position éligible, dont Eric Minardi, polynésien, qui se situe à la limite d'entrer au Parlement de Strasbourg d'après les derniers sondages. Le choix de ce candidat est délibéré : "Nous avons prévu dans notre programme, en commençant par la Polynésie français et la Nouvelle Calédonie, de consulter ces territoires afin de savoir s'ils souhaitent avoir ce statut de région ultrapériphérique", écrit en réponse à nos questions André Rougé, candidat RN et ancien collaborateur ministériel pour l'Outre-mer. Les trois autres candidats ultra-marins de la liste "ont été choisis en fonction de leur origine départementale". Pas sûr que cela suffise à redorer le blason d'un scrutin largement boudé il y a cinq ans, avec une participation moyenne de 17% dans les Outre-mer.
Du côté des Républicains et de l'alliance PS-Place publique résonne un silence gêné. Aucune réponse n'a été apportée à nos sollicitations. Rien de vraiment surprenant au vu des listes proposées par ces deux partis et de la place réservée aux ultra-marins dans celles-ci.
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