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"En 2015 on était des héros, maintenant on est des moins-que-rien" : mobilisé depuis quatre mois, un CRS raconte

Le mouvement des "gilets jaunes" a bouleversé la vie quotidienne des CRS qui se sentent de plus en plus rejetés. 

Article rédigé par David Di Giacomo, franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des CRS pendant une manifestation des "gilets jaunes" le 16 février 2019 à Bordeaux.  (NICOLAS TUCAT / AFP)

Plus de 60 000 policiers et gendarmes sont mobilisés samedi 20 avril, pour encadrer une nouvelle journée d'action des "gilets jaunes". Le ministre de l'Intérieur affirme que des casseurs seront à nouveau au rendez-vous, en particulier à Paris. Déployés tous les week-ends, les CRS et les gendarmes mobiles sont mis à rude épreuve depuis le début du mouvement. Depuis six mois, leur quotidien a complètement changé.

>> VIDEO. "Nous avons subi des jets d'acide" : un CRS raconte les affrontements en marge des manifestations des "gilets jaunes" à Paris

Déferlement de violence

"C'est vrai que maintenant, la vie d'une compagnie ne tourne qu'autour des 'gilets jaunes', oui", affirme Jessy Castane, brigadier-chef d'une compagnie basée dans l'Yonne et mobilisé à 16 reprises sur les manifestations du samedi. "Ça a un impact psychologique sur les collègues", raconte-t-il.

On a du mal à comprendre ce déferlement de violence vis-à-vis de nous. En 2015 on nous offrait des fleurs, on nous embrassait, on nous applaudissait, on était des héros, maintenant on a l'impression qu'on est des moins-que-rien, qu'on est les rebuts de la société, donc ça nous touche

Jessy Castane, CRS

à franceinfo

En vingt ans de carrière, Jessy Castane n'avait jamais vécu une journée aussi violente que celle du 1er décembre à Paris. "Ça a été plus de 11 heures de combats de rue, purs et simples", explique-t-il. Des CRS de moins en moins sereins quand ils sont en mission.

Psychose et inquiétude

Exemple cette semaine, alors qu'ils sécurisaient les abords de la cathédrale Notre-Dame. "On a vu une centaine de 'gilets jaunes' se diriger vers nous, mais en fait c'était des cyclo-touristes qui avaient déposé leur vélo un peu plus loin et qui venaient à pieds faire des photo de la cathédrale", note Jessy Castane. "On ne dit pas qu'on a la psychose mais dès qu'on voit un groupe de 15/20 personnes en gilets jaunes, tout de suite on se pose la question de savoir si ce sont des manifestants et s'ils vont faire une action, et c'est ça que je trouve dommage." 

La vie de famille aussi, n'est plus du tout la même depuis le début du mouvement des "gilets jaunes". À 45 ans, Jessy Castane ne passe plus beaucoup de temps avec ses deux filles.

Quand on leur dit qu'on est là le week-end et que finalement à 23 heures on est appelé, on voit la déception dans leurs regards et on ne peut plus rien prévoir, ce n'est plus possible

Jessy Castane, CRS

à franceinfo

Servir, c'est la devise des CRS, et pour lui, malgré les difficultés, pas question de faire autre chose : "C'est le métier que j'ai toujours voulu faire et que je ferai jusqu'à la fin de ma carrière, j'irai jusqu'au bout", affirme-t-il. 

Quand il n'est pas sur le terrain, Jessy Castane rencontre ses collègues, avec sa casquette de délégué syndical de l'UNSA Police. Des CRS épuisés, inquiets aussi par la vague de suicides qui touche la police, et qui ne voient toujours pas venir la fin du mouvement des "gilets jaunes".

Le portrait de Jessy Castane, CRS mobilisé depuis quatre mois, par David Di Giacomo

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