Pouvoir d'achat : redevance, nationalisation d'EDF, carburants... Ce que contient le projet de loi de finances rectificative adopté en première lecture à l'Assemblée
Les sénateurs doivent encore voter le projet de loi qui doit aider les consommateurs à faire face à l'inflation et à la hausse des prix de l'énergie.
Une nouvelle série de mesures aux conséquences directes pour le portefeuille des Français. Les députés ont voté en première lecture, dans la nuit du mardi 26 au mercredi 27 juillet, le projet de loi de finances rectificative. Ce deuxième volet du "paquet pouvoir d'achat" complète les mesures déjà votées quelques jours auparavant dans le projet de loi d'urgence pour le pouvoir d'achat. Voici les principales mesures adoptées avant l'examen du Sénat.
La fin de la redevance audiovisuelle
Les députés ont voté la suppression de la redevance qui finance l'audiovisuel public. Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, cette mesure a été votée avec les voix de la majorité, des Républicains et du Rassemblement national. Elle a en revanche suscité l'inquiétude dans les rangs de la Nupes, qui a voté contre à l'unanimité.
Lors de cette séance souvent agitée, le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, a exprimé son attachement à "un audiovisuel public fort", tout en qualifiant d'"obsolète" cette redevance basée sur la possession d'un téléviseur à l'heure des tablettes et autres smartphones. Pour Iñaki Echaniz (PS), cette suppression est une "mauvaise idée" qui va nuire à un financement stable. Alexis Corbière (LFI) a souligné que garantir "l'indépendance de l'audiovisuel public est une condition de la démocratie".
La ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, a en revanche fait valoir que "ce n'est pas la redevance qui garantit l'indépendance" mais l'Arcom (ex-CSA), l'instance qui nomme les dirigeants de l'audiovisuel public. Des amendements de la majorité et de LR ont été adoptés pour affecter "une fraction" de la TVA, pour un montant d'environ 3,7 milliards d'euros, dans le but de répondre aux inquiétudes sur le financement de ce secteur.
Le rehaussement du plafond des heures supplémentaires défiscalisées
Une mesure votée par l'Assemblée nationale prévoit que les heures supplémentaires seront, cette année, défiscalisées jusqu’à 7 500 euros, contre 5 000 euros auparavant. Cette mesure ne concerne que les revenus de l’année 2022. "Nous voulons que le travail paie et paie mieux", a justifié le rapporteur du texte Mathieu Lefèvre (Renaissance).
La députée LR Isabelle Valentin proposait même "une défiscalisation complète des heures supplémentaires", sans plafond donc, mais son amendement a été rejeté. A l'inverse, les députés de la Nupes se sont exprimés contre le passage de 5 000 à 7 500 euros. "Dans notre pays, il y a une intensification du travail (...) il ne faut pas user le corps des salariés !" a déclaré la députée écologiste Sophie Taillé-Polian.
La conversion des RTT en salaire
Un amendement adopté par les députés permettra également aux salariés de se faire payer leurs RTT non utilisées. Les travailleurs pourront ainsi convertir ces journées de repos en salaire. Cette fois, l'amendement n’était pas déposé par le groupe Renaissance mais par Les Républicains. La majorité présidentielle a donné un avis favorable au texte, comme un symbole de la promesse affichée du gouvernement de "faire des compromis". Comme pour la défiscalisation des heures supplémentaires, un plafond a été fixé à 7 500 euros par an pour la monétisation des RTT.
Une compensation de 120 millions d'euros pour les départements
Une surprise à l'Assemblée. Les députés ont voté cette mesure à 120 millions d’euros qui prévoit que l’Etat compense la revalorisation du RSA aux départements, contre l'avis du gouvernement. L'amendement a été adopté par les députés LR, RN, Nupes et… Horizons, pourtant membre de la majorité présidentielle. C'est la première fois que ces alliés de la majorité marquaient leur différence.
La remise carburant
Samedi, le gouvernement a acté un compromis avec Les Républicains pour la poursuite de la remise carburant : la mesure, à préciser par décret, passera de 18 à 30 centimes d'euros en septembre et en octobre, puis à 10 centimes en novembre et décembre. Le patron des députés LR, Olivier Marleix, s'est dit satisfait de ce "bras de fer positif avec le gouvernement".
Les députés ont voté également un doublement de l'aide défiscalisée que peuvent verser les entreprises aux salariés pour couvrir leurs frais de carburant, en relevant le plafond de 200 à 400 euros.
La nationalisation d'EDF
Comme attendu, les députés ont approuvé le financement par l'Etat de la renationalisation à 100% d'EDF, une opération à 9,7 milliards d'euros destinée à sortir le groupe de production et de fourniture d'électricité de son ornière financière et industrielle. Les députés ont adopté ces crédits pour 2022 par 209 voix contre 156.
Dans l'hémicycle, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a surtout insisté sur la "relance du programme nucléaire en France", avec six nouveaux réacteurs EPR. "Le nucléaire a terriblement souffert d'un abandon industriel ces dernières années", a-t-il ajouté dans une ambiance chahutée. Ecologistes et LFI ont voté contre en fustigeant le "tout-nucléaire". Ils ont demandé, comme d'autres, un "grand débat devant la représentation nationale sur l'avenir énergétique de la France". Le RN s'y est aussi opposé.
La revalorisation du point d'indice des fonctionnaires
Le paquet de mesures pour le pouvoir d'achat prévoyait aussi la hausse de 3,5% de la valeur du point d'indice des fonctionnaires, qui sert de base à leur rémunération. Elle a été votée comme prévu, car la mesure fait consensus. Mais ce vote ne fait qu'acter le financement de la revalorisation du point d'indice, comme l'explique le site Vie publique.fr. De fait, le dégel de 3,5% du point d'indice a été annoncé fin juin par le ministre de la Fonction publique, Stanislas Guérini. Le décret est paru le 8 juillet au Journal officiel, avec un effet rétroactif au 1er juillet.
La poursuite du bouclier tarifaire sur l'énergie
En outre, le budget rectificatif comprend la poursuite du bouclier tarifaire sur l'énergie, mis en place fin 2021. Ce dispositif permet de plafonner la hausse des factures d'électricité à 4% et de geler les prix du gaz à leur niveau d'octobre 2021. Il est prévu qu'il soit prolongé durant toute l'année 2022. Bruno Le Maire a confirmé en plus que "d'ici la fin de l'année 2023, nous mettrons fin aux tarifs réglementés [du gaz] pour être en conformité avec les règles européennes".
Lundi, les députés avaient déjà approuvé 230 millions d'euros pour les foyers se chauffant au fioul, contre l'avis de l'exécutif, qui privilégiait, lui, une aide de 50 millions d'euros.
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