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Le plan de relance à 100 milliards d'euros se fera-t-il vraiment sans hausse d'impôts ?

"Il n'y aura pas de hausse d'impôts", a assuré Jean Castex. Le plan de relance présenté par le Premier ministre comporte d'ailleurs une baisse des impôts de production des entreprises. La crise du Covid-19 a toutefois conduit la majorité à maintenir une taxe plus longtemps que prévu : la CRDS.

Article rédigé par Benoît Zagdoun
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le Premier ministre, Jean Castex, lors de la présentation de son plan de relance, le 3 septembre 2020, à Paris. (LUDOVIC MARIN / AFP)

L'exécutif le répète depuis des mois : il n'aura pas recours à des hausses d'impôts pour financer son plan de relance de 100 milliards d'euros sur deux ans, destiné à sortir l'économie française de la crise engendrée par la pandémie de Covid-19. "Il n'y aura pas de hausse d'impôts", a encore assuré le Premier ministre, Jean Castex, jeudi 3 septembre, pendant la présentation du plan baptisé "France Relance". "Nous ne financerons pas ces dépenses en augmentant les impôts", avançait déjà Emmanuel Macron le 14 juin. Disent-ils vrai ou "fake" ?

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Non seulement aucune hausse d'impôts n'est inscrite au menu, mais une baisse figure même au programme, d'après les principales mesures dévoilées avant la présentation officielle du plan de relance. Le gouvernement compte offrir aux entreprises une réduction de 20 milliards d'euros de leurs impôts de production sur les deux prochaines années. France Industrie, qui regroupe 62 grandes entreprises industrielles françaises, réclamait de longue date au gouvernement la suppression de ces impôts de production, comme le relatait Le Monde, fin 2019. Cette mesure bénéficiera à 42% aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), à 32% aux PME et à 26% aux grandes entreprises, selon le gouvernement.

Un cadeau aux entreprises au détriment des collectivités locales

Dans le détail, le gouvernement entend procéder à une "division par deux" de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), a expliqué le chef du gouvernement, lors de l'université d'été du Medef, le 26 août. Cette cotisation a rapporté 18,8 milliards en 2019, d'après le Sénat. Toutes les entreprises réalisant plus de 500 000 euros de valeur ajoutée en sont redevables. Son taux progressif fluctue entre 0,5% et 1,5%. Son allègement passera par la suppression de la part de cette taxe qui revient actuellement aux régions, soit 6,8 milliards d'euros, chiffre la Banque des Territoires. Un peu moins de la moitié donc.

Autres impôts de production : les impôts fonciers pesant sur les sites industriels seront eux aussi réduits de moitié. La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) payée par le secteur industriel devrait, elle, baisser de 1,75 milliard d'euros. Et la cotisation foncière des entreprises (CFE) de 1,54 milliard d'euros, détaille la Banque des Territoires.

L'Association des maires de France (AMF) s'est indignée dans un communiqué de ces pertes de recettes annoncées pour les communes. D'autant que ces pertes s'ajoutent à la suppression progressive de la taxe d'habitation, évaluée à par l'AMF à un trou de 23 milliards d'euros.

La CRDS prolongée pour neuf ans au moins

Si le plan de relance ne prévoit aucune hausse d'impôts directs, la crise du Covid-19 a, elle, déjà conduit la majorité à maintenir une cotisation qui devait bientôt disparaître. Les Français vont continuer à payer la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) jusqu'en 2033. Et ce, afin d'éponger le coût social de l'épidémie de Covid-19. Cette disposition est inscrite dans les projets de loi sur la dette sociale, adoptés par le Parlement le 23 juillet.

La CRDS, une taxe de 0,5% prélevée à la source sur la plupart des revenus, a été créée en 1996, afin de combler "le trou de la Sécu". D'abord prévue pour 13 ans, elle a déjà été prolongée jusqu'en 2024. La crise sanitaire et les dépenses de santé engendrées ont changé la donne. Car la CRDS alimente la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades). En 2018, elle lui a rapporté 7,4 milliards, d'après le Sénat.

Cette caisse vient d'hériter de 136 milliards d'euros de dette supplémentaire avec la crise du Covid-19. Cette somme englobe les déficits passés (31 milliards), mais aussi ceux attendus pour l'année en cours (52 milliards) et les trois suivantes (40 milliards), ainsi qu'un tiers du passif des hôpitaux (13 milliards). Certains élus voient dans le prolongement de la CRDS une augmentation d'impôts qui ne dit pas son nom, contraire à l'engagement d'Emmanuel Macron de ne pas alourdir la fiscalité.

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