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Mathias Echène, Français détenu à Bali depuis deux ans : "Chaque jour, j'ai espoir que ce soit le dernier en prison"

Manque de soins, grève de la faim et inaction des autorités locales : deux ans après son incarcération, l'ex-trader alerte sur son état de santé et ses conditions de détention en Indonésie.

Article rédigé par franceinfo - Propos recueillis par Noémie Leclercq
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Mathias Echène, chef d'entreprise de 49 ans originaire de Rodez, dans une vidéo qu'il a fait parvenir en avril 2019 depuis le centre de détention de Denpasar, à Bali (Indonésie).  (MATHIAS ECHENE / FRANCE 3)

Il y a deux ans et deux jours, le 29 juillet 2017, Mathias Echène était arrêté à l'aéroport de Bali, en Indonésie. Depuis, ce Français de 39 ans est détenu dans des conditions difficiles et n'a pas revu sa famille. Cet ex-trader s'était installé dans l'île indonésienne en 2006, avec sa femme et ses enfants, pour développer un projet de promoteur immobilier. Il a été accusé de surfacturation par des investisseurs et des poursuites, pénales et civiles, ont été engagées contre lui à Hong Kong et Bali.

Un mandat d'arrêt international, délivré en 2013, puis une notice rouge Interpol, émise à partir de 2014, ont fait de Mathias Echène et sa femme des "fugitifs recherchés à l'échelle internationale", jusqu'à l'arrestation du Français trois ans plus tard.

Depuis, un bras de fer s'est entamé, avec d'un côté les avocats du détenu et les autorités françaises et, de l'autre, les tribunaux balinais et hongkongais. Deux ans après son incarcération, Mathias Echène a accepté de répondre aux questions de franceinfo depuis sa cellule du centre de détention de Denpasar, à Bali. Malgré son épuisement, il s'est exprimé avec clarté et dignité. 

Franceinfo : Comment vivez-vous votre détention ? 

Mathias Echène : Du point de vue hygiène et nourriture, les conditions sont déplorables. Je n'ai pas accès à l'eau potable librement, et les repas, servis trois fois par jour, sont innommables. Les sept premiers mois de ma détention, j'étais dans un centre de rétention provisoire. Une cellule minuscule, normalement faite pour y rester deux mois au maximum. J'ai depuis été transféré dans une autre prison, où je peux payer une cellule individuelle un peu plus confortable. Et heureusement, sur le plan relationnel, cela se passe bien avec les autres détenus : il n'y a aucune agression, aucune violence. Cela me paraît assez exceptionnel pour une prison, d'autant plus quand elle est surpeuplée. Le problème majeur, c'est l'absence totale de prise en charge médicale.

Votre état de santé s'est-il dégradé ces deux dernières années ? 

Avant mon arrestation, en 2017, j'étais suivi pour un problème d'arthrose. Mon opération était programmée pour novembre de cette même année. Lors de mon incarcération, j'ai demandé à être hospitalisé pour cela. Mon besoin de prothèse a été confirmé par le médecin, qui préconisait une opération en France. Les autorités pénitentiaires locales ont ignoré cette recommandation et se sont contentées de me donner des anti-douleurs. Jusqu'à récemment, je prenais de la morphine. Mais comme il n'y en a plus à l'infirmerie, ils m'ont proposé de la méthadone ou de la marijuana... Des drogues illégales à Bali et pour la possession desquelles certains co-détenus sont emprisonnés. Lorsque j'étais plus jeune, on m'a également détecté une malformation cardiaque, et j'aurais dû me faire poser un défibrillateur à l'approche de la cinquantaine. Mais encore une fois, les autorités indonésiennes n'ont rien voulu entendre. Je suis juste tenu de me présenter une fois par jour à l'infirmerie depuis que j'ai entamé une grève de la faim le 1er avril 2019, étant donné que j'ai perdu plus de 20 kilos.

Malgré vos soucis de santé, vous avez pris la décision d'entamer une grève de la faim ?

Oui, même si je l'ai arrêtée à plusieurs reprises, lorsque je sentais que j'allais flancher. Mais dès que j'aurai repris un peu de forces, d'ici quelques jours, je vais recommencer, et essayer d'aller plus loin. Jusqu'au coma s'il le faut. Parce que je ne vois pas d'issue alors que le procès en exequatur (lorsque l'application en France d'un jugement étranger est demandée) en France m'a été favorable, et qu'il y a une multitude d'irrégularités et de négligences des tribunaux balinais et hongkongais. Une pétition en ligne a récolté plus de 1 700 signatures, le maire de Rodez (Aveyron), dont je suis originaire, a déposé une motion pour ma libération. Mon avocate, Clémence Witt, qui assure ma défense aux côtés de Victor Champey, a soumis un recours à l'ONU, qui devrait être étudié à partir du 13 août. Malgré tout, on a essayé de me faire changer ma déclaration sur mes conditions de détention auprès des Nations unies. Le chef de la prison a été convoqué à Jakarta pour mon cas, et, furieux, il m'a demandé de signer un document en indonésien, langue que je ne parle pas. Heureusement, j'ai refusé. Les autorités françaises m'assurent la protection consulaire, mais je n'ai aucun calendrier côté Indonésie. Je suis innocent et espère quotidiennement ma libération. C'est terrible car chaque jour, j'ai espoir que ce soit le dernier en prison et loin de mes enfants. 

Quel est votre état d'esprit désormais ? Avez-vous un message à faire passer aux autorités ? 

Ce que je souhaite, c'est que des autorités compétentes examinent mon affaire. Ma vie a été brisée à cause d'un litige commercial, uniquement parce que l'un de mes accusateurs est un milliardaire proche du pouvoir hongkongais. Aujourd'hui, seul le président indonésien a le pouvoir de me faire rentrer dans mon pays. Je n'ai commis aucun crime. J'en appelle au président Emmanuel Macron. Je sais que les autorités françaises sont à l'écoute. Je veux rentrer chez moi et retrouver mes trois enfants. La dernière fois que je les ai vus, c'était lors de l'arrestation, il y a deux ans et deux jours. On communique par messagerie mais c'est très dur d'être présent pour ses enfants lorsqu'on ne les voit pas. Après deux rentrées scolaires où j'ai été absent, j'aimerais pouvoir être là pour celle de 2019. 

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