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Orlando : la communauté gay entre crainte et détermination

Cinq jours après la tuerie qui a frappé Orlando, faisant 49 morts et 53 blessés dans une boîte de nuit gay, la communauté LGBT panse ses plaies et tente de faire face à ses peurs. Reportage.
Article rédigé par Benjamin Illy
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (A Orlando, drapeaux américains et de la communauté gay cohabitent, en berne © Radio france - Benjamin Illy)

A Orlando, la communauté gay s'épanouit depuis des années, sans subir d'hostilité. La ville de Floride est tolérante, particulièrement "gay-friendly" selon Rob Domenico, l’un des responsables du centre LGBT. "Ici, vit l’une des rares communauté dans le monde ou j’ai le sentiment que nous ne sommes pas touchés par le gay bashing, par des ondes négatives". Mais depuis la tuerie qui a frappé une boîte de nuit gay, dans la nuit de samedi à dimanche, les choses ne sont plus aussi simples. Cette attaque terroriste, homophobe a fait 49 morts et 53 blessés

  (Les hommages aux victimes se multiplient dans Orlando © Radio France - Benjamin Illy)

Une communauté LGBT choquée

Pour Rob Domenico, le carnage commis par Omar Mateen pourrait avoir de lourdes conséquences sur les jeunes homosexuels d’Orlando, tentés de se renfermer sur eux-mêmes. "D’autant que la majorité de ceux qui ont été tués dans l’attaque, étaient de très jeunes homosexuels,  des garçons et des filles" explique le responsable du centre LGBT. Potentiellement, ces jeunes le cachaient encore à leurs parents."

"C’est un choc pour nous tous. Et vous l’avez entendu aux infos, le suspect faisait des rencontres dans le milieu homo. Il a sans doute refoulé son homosexualité. C’est horrible d’en arriver là." Rob Domenico

Des jeunes pour qui assumer sa sexualité va devenir de plus en plus compliqué. "Je pense que beaucoup de jeunes qui avaient finalement décidé de sortir du placard, d’être enfin eux-mêmes vont avoir peur et vont retourner dans le placard malheureusement. Mais c’est notre boulot c’est que ça n’arrive pas". Le centre LGBT d'Orlando est d'ailleurs submergé par les dons spontanés destinés aux proches des victimes, et par les nouveaux volontaires. L’association en comptait 150 avant le drame, aujourd’hui ils sont plus de 5.000.

  (Rob Domenico, l'un des responsables du centre LGBT d'Orlando © Radio France - Benjamin Illy)

"Je pense que Orlando n’est pas devenu sinistre, au contraire cette ville est plus forte !" 

Ce n’est pas la foule des grands jours au StoneWall , l’un des nombreux club gay, bi, et lesbien d’Orlando. Les verres sont pleins, la musique résonne, mais dans un coin de la tête la tristesse est là. Alisha, bientôt 29 ans, les cheveux coiffés à l'iroquoise, est persuadée qu'il ne faut rien lâcher, rien. "On s’est battus ensemble et j’espère que tout ça va nous donner l’opportunité de montrer que les homosexuels ne se résument pas au monde de la nuit."

"Nous sommes des êtres humains, nous avons une vie, une culture, du travail." Alisha

"Je veux pouvoir tenir la main de ma petite amie et marcher dans la rue ! se rassure-t-elle. Après ce qu’il s’est passé, je veux pouvoir embrasser ma copine en public et je vais certainement pas m’arrêter après cette tragédie."

Du recueillement, pas de résilience

L’incompréhension s’exprime chaque nuit au cœur de la ville durant de longues veillées. Devant le Philipps Center, l’équivalent de la place de la République à Paris, se dresse le mémorial. Les fleurs, les bougies, les mots s'entassent. Les promesses d’amour et de lendemain meilleurs aussi.

  (Anthony, 22 ans, devant le mémorial © Radio France - Benjamin Illy)

On y rencontre Anthony, 22 ans, homosexuel et habitué du Pulse, la boîte de nuit visée dans la nuit de samedi à dimanche dernier. "Le Pulse a été le premier club gay dans lequel je suis allé. C’est le premier endroit où je me suis senti à l’aise, où j’ai pu embrasser un homme en public, où j’ai pu être moi-même."

"Depuis cette attaque, j’ai peur. Je me sens en insécurité à Orlando, ma maison où je n’avais jamais imaginé qu’on pourrait assassiner des jeunes en public. Je le sais maintenant (...) 49 personnes sont mortes là-bas parce qu’il s’agissait de jeunes membres de la communauté LGBT." Anthony

  (Moment de recueillement devant le Philipps Center © Radio France - Benjamin Illy)

Pour Anthony, le caractère profondément homophobe de cet acte n'est d'ailleurs pas assez évoqué. "Si vous écoutez les médias comme CNN, ils se focalisent essentiellement sur la "radicalisation" d’Omar Mateen, sur le terrorisme islamiste. Ils ne parlent pas de l’histoire de ce club gay qui a été créé pour honorer la mémoire du frère de la propriétaire mort du Sida. Un club créé pour offrir un abri à la communauté LGBT".

Reportage : "Si quelqu’un me déteste parce que je suis gay, je peux rien faire pour changer ça" Anthony

 

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