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De LGBT à LGBTQIA+ : on vous explique l'évolution du sigle qui décrit la diversité des identités de genre et orientations sexuelles

Lesbienne, gay, bisexuel, trans, queer, intersex, asexuel... Alors que de nombreuses marches des fiertés défilent ce mois-ci en France, le choix des mots varie d'un collectif organisateur à l'autre. franceinfo vous propose un lexique, commenté par une linguiste et des militants.
Article rédigé par Valentine Joubin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Un drapeau brandi pas des manifestants lors de la pride du Népal à Kathmandou, le 11 juin 2022. (NARENDRA SHRESTHA / EPA)

LGBT+, LGBTQ+, LGBTQIA+... En ce mois de juin, mois des fiertés, différents sigles plus ou moins longs fleurissent sur les réseaux sociaux, dans les médias et sur les banderoles des prides ou marches des fiertés. Ces nombreux défilés organisés un peu partout en France, notamment à Paris samedi 24 juin, défendent la diversité des orientations sexuelles et des identités de genre. Mais que signifient ces lettres et pourquoi y-a-t-il autant de variations ? Franceinfo vous propose un lexique, forcément non exhaustif, que vous pouvez consulter directement en déroulant cet article.

"On peut ajouter des lettres à l'infini"

Le sigle LGBT a commencé à être utilisé, dans les années 1990, dans le monde anglo-saxon par les organisations souhaitant défendre les droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, et transgenres. En France, il faut attendre le début des années 2000 pour que les interassociatives lesbienne et gay (LG) ajoutent le B et le T à leur acronyme, la World Pride de Rome ayant joué un rôle d'accélérateur, selon le chercheur italien Massimo Prearo. Ces dernières années ont vu l'apparition des lettres Q (queer), I (intersex) et plus rarement A (asexuel) mais il est "très difficile de dater, parce que ce n'est pas homogène", explique Mireille Elchacar, professeur de linguistique à l'Université Téluq au Québec.

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Autrice d'une étude sur les appellations de genre et d'identité sexuelle, elle observe que "pour les groupes militants, c'est important que ce ne soit pas uniforme justement pour pouvoir s'adapter à toutes les situations. L'avantage de ce sigle, c'est qu'on peut ajouter des lettres ou des symboles à l'infini, ce qui permet de n'oublier personne". Et même si ce sigle n'est pas toujours pratique - par exemple pour créer des adjectifs - ce sont, constate la chercheuse, les "préoccupations identitaires" et "la volonté d'inclusion" qui l'emporte.

Voici un lexique non exhaustif que franceinfo a réalisé à l'aide du Robert, du Larousse et de l'usito (le dictionnaire de l'office québécois de la langue française, souvent plus complet) :

L. comme lesbienne : une femme qui est attirée émotionnellement et/ou sexuellement par une autre femme.

G. comme Gay : désigne à la fois un homme qui est attiré émotionnellement et/ou sexuellement par un autre homme et une personne homosexuelle quel que soit son genre.

B. comme bisexuel ou bisexuelle : personne qui est attirée sexuellement et/ou émotionnellement par une personne du même sexe ou de sexe opposé.

T. comme trans : personne qui a une identité de genre différente de son genre assigné à la naissance, "qu'elle modifie ou non son expression de genre ou son corps pour les faire concorder avec cette identité", précise l'usito québécois.

Q. pour queer : se dit d’une personne dont l’orientation ou l’identité sexuelle ne correspond pas au modèle social hétéronormé (Le Robert), qui ne s'identifie à aucune catégorie relative à son orientation sexuelle et à son identité de genre (dictionnaire québécois usito). "Queer, était au départ une insulte en anglais, pour parler péjorativement des personnes homosexuelles, rappelle la professeur de linguistique Mireille Elchacar. C'est donc cette volonté de faire le retournement du stigmate, une façon de retrouver un certain pouvoir après avoir été mis à l'écart". "Aujourd'hui, ça veut tout simplement dire 'qui n'entre dans aucune des cases, qui ne veut pas se faire nommer par une seule dénomination'. Et donc on a un flou qui plaît aux personnes qui veulent l'utiliser."

Le Q peut aussi parfois faire référence au terme "questionning" (questionnement) qui, selon le lexique de l'association internationale Rainbow Project, "décrit la situation d’une personne qui n’est pas certaine de son orientation sexuelle".

I. comme intersex : personne qui a les caractéristiques physiques appartenant à la fois au sexe féminin et au sexe masculin.

A. comme asexuel ou asexuelle : personne qui ne ressent pas ou qui ressent très peu de désir sexuel. "Une personne asexuelle peut avoir une orientation amoureuse, précise l'usito québécois. Elle peut donc, par exemple, être dans une relation amoureuse, mais ne pas ressentir le désir d'avoir des relations sexuelles avec son ou sa partenaire."

Le A peut aussi parfois désigner le terme aromantique, une personne qui ne ressent pas ou qui ressent très peu d'attirance amoureuse pour autrui mais qui peut ressentir du désir sexuel. Ou renvoyer au mot allié, c'est à dire quelqu'un qui n'est pas LGBT+ mais qui milite pour la défense des droits des personnes concernées.

Le + : "Il a tendance à vouloir dire qu'on peut se reconnaître dans d'autres identités. Et on peut faire évoluer ses identités au cours de sa vie. Rien n'est figé", résume Matthieu Gatipon Bachette, ex porte-parole de l'Inter-LGBT. "On essaie d'avoir le spectre complet et là ça permet de n'oublier personne", ajoute Mireille Elchacar.

Être inclusif et parler "à Madame Michu"

"Un militant, il est dans l'innovation sémantique et il fait évoluer des concepts, estime Matthieu Gatipon-Bachette, porte-parole de la Marche des fiertés parisienne. Si vous ne les faites pas évoluer, quelque part vous invisibilisez des personnes." Pour autant, la manifestation a choisi de s'en tenir au sigle LGBT+. L'ajout d'une lettre doit être approuvé par l'ensemble des associations organisatrices, justifie Matthieu Gatipon-Bachette. Du syndicat du travail sexuel aux policiers LGBT, en passant par des organisations de loisir, "il faut mettre les gens d'accord, il faut leur expliquer, faire de la pédagogie. Vous avez des associations qui sont moins politisées que d'autres." "On bouge plus difficilement que des gens qui sont radicaux", ajoute-t-il.

"Le fait de rajouter par exemple un 'I', c'est mettre en avant des personnes intersexes qui bénéficient de très peu de moyens, des associations, qui bénéficient de très peu de visibilité."

Matthieu Gatipon-Bachette, ex porte-parole de l'inter-LGBT

à franceinfo

Sur les affiches de la Pride des banlieues, qui s'est tenue le 3 juin à Saint-Denis, c'est l'acronyme LGBTQI+ qui a été retenu. La lettre "A" a été écartée par le "cercle politique", raconte Yanis Khames, le porte-parole du collectif, après une discussion sur "la matérialité des violences vécues" par les personnes asexuelles et aromantiques. "Le débat existe. Pour nous il n'est pas central à notre mouvement. Nous souhaitons être les plus inclusifs possible", résume le collectif.

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Pour Matthieu Gatipon-Bachette, l'enjeu est aussi de de ne pas se couper du grand public. L'utilisation du "+", politiquement consensuel, permet ainsi "d'éviter les acronymes à rallonge". "L'ancienne présidente de de l'Inter-LGBT, Aurore Foursy, disait souvent 'Il faut que tu parles comme si tu parlais à Madame Michu qui est au fin fond de la Lozère et LGBT, elle sait pas ce que c'est', se souvient le militant. Il y a aussi une démarche de pédagogie, d'éducation populaire, c'est quelque chose que l'on a beaucoup à cœur."

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