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Emplois familiaux : quatre questions sur les soupçons de "détournements de fonds publics" qui pèsent sur Michel Mercier

Le sénateur MoDem du Rhône, ancien ministre et récemment nommé au Conseil constitutionnel, est mis en cause par "Le Canard enchaîné", qui a révélé qu'il avait employé deux de ses filles en tant qu'assistantes parlementaires.

Article rédigé par franceinfo
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Michel Mercier, alors ministre de la Justice, s'exprime devant des journalistes à Paris, le 29 mars 2012.  (KENZO TRIBOUILLARD / AFP)

Le parquet national financier (PNF) a ordonné une enquête préliminaire sur le sénateur du Rhône Michel Mercier, soupçonné de "détournements de fonds publics" pour avoir employé sa fille en tant qu'assistante parlementaire. Franceinfo fait le point sur ce qu'il faut savoir de cette affaire, déclenchée par une publication du Canard enchaîné.

Qui est Michel Mercier ?

Michel Mercier, 70 ans, est sénateur MoDem du Rhône depuis 2014, après l'avoir été de 1995 à 2009. Maire de Thizy-les-Bourgs depuis janvier 2013, il est aussi membre du Conseil constitutionnel depuis mercredi 2 août 2017, sur proposition du président du Sénat, Gérard Larcher, et en remplacement de Nicole Belloubet, entrée dans le gouvernement Philippe comme garde des Sceaux. 

Membre de la commission de la culture en 2008-2009 puis de la commission des lois de 2012 à 2014, Michel Mercier a été ministre de la Justice de 2010 à 2012, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a présidé le groupe Union centriste au Sénat de 2002 à 2009. 

Pourquoi est-il mis en cause ?

Tout a commencé mercredi 2 août, à la suite de révélations du Canard enchaîné. Dans son édition du jour, l'hebdomadaire satirique affirme que le sénateur du Rhône a employé deux de ses filles en tant qu'assistantes parlementaires. 

L'une, Véronique, a été, de 2003 à 2012, son assistante au Sénat et dans les différents ministères. L'autre, Delphine, embauchée à mi-temps de 2012 à 2014 lorsque Michel Mercier est redevenu sénateur, intéresse particulièrement les enquêteurs. Car selon Le Canard enchaîné, Delphine Mercier vivait à Londres à l'époque. L'hebdomadaire a publié, dans son édition du 2 août, des extraits d'un document d'embauche de la fille du sénateur, qui semblent la domicilier dans la capitale britannique, alors que son lieu de travail était Paris. "Son labeur n'a guère laissé de trace", indique encore le journal, mettant ainsi en doute la réalité de l'emploi occupé par Delphine Mercier. 

Comment Michel Mercier se défend-il ?

"C'est tout à fait exact que j'ai employé une de mes filles d'août 2012 à avril 2014 parce qu'à l'époque je menais des dossiers d'ordre culturel très difficile, a reconnu Michel Mercier, mercredi 2 août, lors de son audition par la commission des lois du Sénat, pour avaliser sa nomination au Conseil constitutionnel. Il n’y a pas de raison de le cacher, en plus ce n’est pas interdit, ce sera interdit quand la loi sera votée." 

Mesure phare de la loi de moralisation de la vie publique voulue par Emmanuel Macron, après une campagne présidentielle marquée par l'affaire Penelope Fillon, l'interdiction des emplois familiaux par les parlementaires n'a, en effet, été votée que le 27 juillet 2017 par l'Assemblée nationale.

Evoquant l'emploi d'une de ses filles comme collaboratrice, Michel Mercier a par ailleurs assuré à ses pairs du Sénat qu'"elle était domiciliée en France. Je l’ai vérifié ce matin, le contrat avait été corrigé avant août 2012 au bureau de l’Agas [l’Association pour la gestion des assistants de sénateurs]. Ce qui a été publié n’a jamais été le contrat qui a été appliqué." Pour répondre aux interrogations portant sur la nature des activités de sa fille, historienne de l'art, Michel Mercier a par ailleurs expliqué que "comme elle était à temps partiel, elle a cherché des emplois ailleurs, pour bien vivre". 

Dans un communiqué, Michel Mercier, qui a sollicité un avocat pour le représenter, a ensuite annoncé qu'il remettrait "les travaux réalisés par [sa] fille Delphine au Sénat afin de démontrer l'effectivité de l'emploi". "Un travail effectif a été réalisé, il n'y a donc pas en l'occurrence d'intention frauduleuse", a-t-il encore souligné dans un autre communiqué. Enfin, Michel Mercier a annoncé qu'il déclarerait à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique "les travaux effectués, le temps travaillé et les salaires perçus attestant ainsi de l'effectivité de l'emploi" de sa fille.

Quelles ont été les conséquences des révélations du "Canard enchaîné" ?

Ces révélations n'ont pas bloqué la nomination de Michel Mercier au Conseil constitutionnel, qui a été confirmée (22 voix pour et 7 contre) à l'issue de son audition par la commission des lois du Sénat, mercredi 2 août. Sa nomination a été publiée jeudi 3 août au Journal officiel.

Toutefois, le parquet national financier (PNF) a ordonné une enquête préliminaire pour vérifier les informations de l'hebdomadaire sur Michel Mercier, a appris franceinfo vendredi 4 août de source proche de l'enquête, confirmant une information du Monde. Cette enquête, "ouverte mercredi", selon l'AFP, vise le chef de "détournements de fonds publics", a indiqué une source proche du dossier à l'AFP, confirmant une information du Monde

Le président du Sénat, Gérard Larcher (Les Républicains), a signé le 2 août le décret de nomination de l’ancien garde des Sceaux au Conseil constitutionnel. Il a transmis, vendredi, au parquet national financier les documents qu'il lui demandait dans le cadre de son enquête préliminaire. En revanche, il lui a refusé l'autorisation d'effectuer une perquisition au Sénat, jugeant la demande du parquet financier "floue, pas précise". 

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