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Fin de vie : l'absence "d'encadrement" est "responsable du mal mourir" français, explique Jean-Louis Touraine

Pour l'ancien député et vice-président de la Fédération hospitalière de France, la priorité est de développer les soins palliatifs. 

Article rédigé par franceinfo
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Jean-Louis Touraine à l'Assemblée nationale, alors rapporteur de la mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, en 2019.  (PHILIPPE LOPEZ / AFP)

L'absence "d'encadrement" est "responsable du mal mourir" français, a estimé mardi 13 septembre Jean-Louis Touraine, ancien député LREM du Rhône et vice-président de la Fédération Hospitalière de France alors que le comité d'éthique juge possible ce mardi une "aide active à mourir" strictement encadrée. Emmanuel Macron a annoncé la création d'une convention citoyenne sur la fin de vie en octobre. L'objectif est d'aboutir à une nouvelle loi en 2023. Selon lui, la priorité est le développement du soin palliatif : "Il faut qu'il soit accessible à tous et non pas à un quart seulement des personnes en fin de vie qui le demande", estime-t-il.

franceinfo : Approuvez-vous la position du Comité d'Éthique ?

Jean-Louis Touraine : Le comité a tout à fait raison de dire qu'il faut un encadrement strict parce que le défaut d'encadrement que nous connaissons actuellement est en partie responsable du "mal mourir" français qui est bien connu. La preuve, c'est que s'il y a des centaines de Français qui vont terminer leur vie en Belgique, en Suisse ou ailleurs parce qu'il y a des conditions améliorées, par contre, il n’y a aucun Belge, aucun Espagnol, aucun Suisse, aucune personne qui vient en France pour terminer ses jours parce qu'on sait qu'on termine mal sa vie. Donc, il faut corriger cela. Et de fait, aujourd'hui, puisqu'il n'y a pas de loi adaptée, d'encadrement suffisant, malheureusement, il se fait des pratiques illicites et donc non contrôlées, comme par exemple des euthanasies clandestines. Il y a des gens qui veulent attendre la mort naturelle. Cela n’est pas toujours respecté, car quelqu'un décide à leur insu quand ils sont en fin de vie, de hâter les choses. À l'inverse, d'autres veulent qu’on les dispense d'une agonie très, très pénible. Et ceux-là ne sont pas entendus non plus.

>> Fin de vie : en Belgique, l’euthanasie s'est banalisée mais reste strictement encadrée

Cela passe par le développement du soin palliatif ?

Il faut qu'il soit accessible à tous et non pas à un quart seulement des personnes en fin de vie qui le demande. Il faut le multiplier par au moins trois. Actuellement,  il y a des départements où il n'y a pas du tout d'accès aux soins palliatifs. Vous vous rendez compte ? Évidemment, quand on a la chance d'habiter Paris, Lyon, ou d'autres grandes villes, on peut arriver à trouver un accompagnement en soins palliatifs, mais la France est un désert à cet égard. Oui, il faut développer les soins palliatifs. Oui, il faut écouter les malades. J'en fais une question de droit du malade.

Le malade en fin de vie a le droit d'être entendu. Il doit faire valoir ses droits.

Jean-Louis Touraine, vice-président de la Fédération Hospitalière de France

sur franceinfo

Déjà, le premier droit, c'est d'être entendu, de pouvoir formuler sa demande. Et s'il est dans un cadre approprié, il peut être mis un terme à son agonie quand elle est très pénible solennellement. Je suis d'accord avec cet encadrement que souhaite le comité d'éthique.

Que pensez-vous de la mise en place de la Convention citoyenne ?

Cela permettra qu'il y ait une large discussion dans la société. Elle est prête. Toutes les enquêtes d'opinion montrent qu'au moins neuf Français sur dix, même d'ailleurs parmi les pratiquants, ceux qui vont à la messe tous les dimanches, par exemple, pour la religion catholique, sont favorables à cette liberté de choix du malade en fin de vie, comme l'a montré le journal La Croix dans son sondage. C'est vrai aussi parmi les médecins, même s'il y a chez les uns et chez les autres un pourcentage de gens qui y sont opposés. Nous devons les respecter. C'est ça le secret. Il faut respecter des points de vue différents. Il y a des personnes plus traditionalistes. Ils méritent d'être respectés, même si c'est la loi de la majorité qui permet de définir le cadre dans lequel cela se fera.

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