Numéro unique pour les urgences : "Mettre tous les œufs dans le même panier n'est pas une bonne idée", prévient la Société française de médecine d'urgence
Agnès Ricard-Hibon, porte-parole de la SFMU, plaide vendredi sur franceinfo pour une modernisation du système des numéros d'urgence après la panne nationale de mercredi.
Après la panne nationale des numéros d'urgence à cause d'un dysfonctionnement de l'opérateur Orange, des voix s'élèvent, notamment à la Fédération des pompiers de France, pour réclamer l'adoption d'un numéro unique de secours, le 112. Agnès Ricard-Hibon, porte-parole de la Société française de médecine d'urgence (SFMU), également cheffe du Samu du Val-d'Oise, ne partage pas cette revendication : "Il faut consolider ce qui marche et le renforcer, le moderniser, mais pas casser ce qui fonctionne", plaide-t-elle vendredi 4 juin sur franceinfo.
franceinfo : Est-ce que tout est revenu à la normale dans votre secteur ce matin ?
Agnès Ricard-Hibon : La situation s'est très nettement améliorée, les appels arrivent au 15 sans difficulté. Néanmoins, nous restons vigilants : on a eu des micro-coupures hier matin. La consigne est que si jamais il y a une difficulté pour joindre le 15, il faut réitérer l'appel puisque ces coupures sont aléatoires et transitoires. Concernant le bilan en Île-de-France, nous n'avons pas noté d'"événements indésirables graves", ce qui dans notre jargon désigne les décès. La majorité des coupures étaient en cours d'échanges téléphoniques, ce qui fait qu'on avait déjà les coordonnées et on pouvait rappeler les personnes. Néanmoins, on sait qu'il y a eu des appels bloqués, et réitérer les appels permettait finalement de nous joindre. En termes de nombre d'appels et de dossiers régulation qui ont été traités, nous n'avons pas le sentiment qu'il y ait eu une baisse, mais cela nécessite des investigations complémentaires. Pour le moment, la situation est revenue à la normale. Il ne faut vraiment pas hésiter à faire le 15 et a réitérer l'appel.
Orange annonce une enquête interne pour essayer de comprendre les causes du dysfonctionnement et présente ses excuses. La Fédération nationale des pompiers de France réclame la création d'un numéro unique d'urgence. Qu'en pensez-vous ?
Mettre tous les oeufs dans le même panier n'est pas une bonne idée, ça nous rend plus vulnérables à des pannes ou à un autre dysfonctionnement. Ce que l'ensemble de la communauté médicale - les urgentistes et la Fédération hospitalière de France - réclame, c'est plutôt deux numéros : un numéro santé et un numéro secours-sécurité. Cela permettrait d'avoir directement accès à des professionnels de santé pour une analyse santé immédiate du besoin, mais aussi de suppléer lorsqu'il des pannes comme celle-là. En cas de difficulté, on pourrait joindre l'un ou l'autre des numéros. Comme les plateformes sont interconnectées et l'interconnexion a très bien fonctionné dans la majorité des territoires, ça permettrait d'assurer une sécurité supplémentaire.
Vous n'êtes pas d'accord avec la Fédération des pompiers qui voudrait un numéro unique, comme le 112 mais à 10 chiffres, le 0 112 112 112 ?
Nous ne sommes pas d'accord avec ça : on ne crée pas un numéro unique uniquement dans l'objectif de sécuriser en cas d'une panne exceptionnelle. Par contre, tous les jours, il faut l'accès direct à des professionnels de santé pour une analyse médicale appropriée, parce que les premiers mots spontanés prononcés par les patients sont extrêmement importants dans l'analyse de la gravité. Il ne faut pas avoir à reposer des questions pour analyser ce besoin, donc il est très important d'avoir cet accès direct aux professionnels par un numéro santé interconnecté. Il y a une très bonne coopération entre le Samu et les pompiers sur le terrain. Il faut consolider ce qui marche et le renforcer, le moderniser, mais pas casser ce qui fonctionne. Et cet accès direct aux professionnels de santé est très important pour la population, qui connaît finalement très bien le numéro 15. Le 15, c'est 30 millions d'appels par an, un appel par seconde qui arrive au Samu.
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