Cet article date de plus de deux ans.

Alors que la vague de Covid-19 due à Omicron reflue, voici ce que l'on sait sur la possibilité de retomber malade

Article rédigé par Vincent Matalon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Un test antigénique révélant une infection par le Sars-CoV-2, le 29 janvier 2022 à Cracovie, en Pologne. (JAKUB PORZYCKI / NURPHOTO / AFP)

Près de 10 millions de Français ont été testés positifs lors du seul mois de janvier. La question du risque de réinfection se pose pour ces personnes.

De plus en plus rares sont ceux à être passés entre les gouttelettes. Depuis le début de l'année, près de 9,2 millions de cas de Covid-19 ont été dépistés en France. Autant de personnes, vaccinées ou non, dont le système immunitaire est entré en contact avec le virus du Sars-CoV-2.

Fort heureusement, dans la plupart des cas, les personnes contaminées sont asymptomatiques ou se rétablissent après quelques journées de symptômes d'une intensité variable. C'est encore plus vrai avec Omicron : devenu majoritaire dans le pays durant l'hiver, ce variant est proportionnellement responsable de moins de passages en réanimation que Delta, son prédécesseur.

Les millions de personnes ayant contracté le Covid-19 ces dernières semaines sont-elles à l'abri d'une nouvelle infection ? Leur système immunitaire est-il mieux armé contre le virus qu'après une simple vaccination ? Franceinfo a posé ces questions à des spécialistes.

Différents types d'anticorps à l'action

Commençons par un petit rappel : les vaccins actuellement autorisés en France ont été élaborés pour apprendre à notre système immunitaire à produire des anticorps chargés de neutraliser la spicule (ou protéine Spike) du Sars-CoV-2, qui joue le rôle de clé d'entrée du virus dans l'organisme. "La vaccination va faire produire à notre système immunitaire des anticorps variés, mais qui ciblent tous différentes parties de la spicule afin d'empêcher le virus d'entrer", explique Sandrine Sarrazin, chargée de recherche Inserm au centre d'immunologie de Marseille-Luminy. Lorsque le virus entre dans l'organisme, le système immunitaire a davantage de pain sur la planche.

"Lorsque vous êtes infecté, votre système immunitaire va réagir non seulement à la protéine Spike, mais aussi à toutes les autres parties du virus, comme par exemple aux autres protéines de l’enveloppe virale telles que l'hémagglutinine-estérase ou encore la protéine M."

Sandrine Sarrazin, chargée de recherche Inserm au centre d'immunologie de Marseille-Luminy

à franceinfo

Hautement transmissible par aérosols, le Sars-CoV-2 met également à l'épreuve les voies respiratoires lors d'une infection. Ce qui entraîne une réponse immunitaire complémentaire de celle engendrée par le vaccin, avance l'épidémiologiste Yves Buisson. "Le virus entre par le nez, la gorge, le larynx, ou les bronches. Cette voie d'entrée par les muqueuses respiratoires va provoquer une réaction immunitaire locale : des cellules spécialisées vont y produire des anticorps muqueux et apporter une protection contre une réinfection par le même virus", complète celui qui préside également la cellule Covid-19 de l'Académie nationale de médecine. Plusieurs chercheurs planchent d'ailleurs sur un vaccin sous forme de spray nasal, qui serait justement capable de bloquer l'entrée du virus par les voies respiratoires.

Des vaccins pour éviter les formes graves

Etre infecté par le coronavirus fait donc produire à notre système immunitaire un éventail d'anticorps plus varié qu'après une vaccination. Mais attendre volontairement de contracter le Covid-19 pour échapper à la vaccination serait un calcul bien hasardeux : la maladie peut laisser des séquelles persistantes (on parle alors de "Covid long") et provoquer un emballement du système immunitaire potentiellement dévastateur pour l'organisme (on évoque alors un "orage de cytokine" ou un "syndrome Pims" chez l'enfant).

Pour éviter ces formes graves, les vaccins actuels restent très efficaces. D'après une étude américaine pré-publiée fin novembre (en anglais), les vaccins à ARN messager – comme ceux de Pfizer-BioNTech et Moderna – ont l'avantage de faire produire par l'organisme un nombre d'anticorps supérieur à celui d'une simple infection (surtout après un rappel). 

Ils provoquent également une autre réponse immunitaire, qui entraîne des cellules appelées lymphocytes T à reconnaître et détruire les cellules contaminées par le Sars-CoV-2. "Une étude récemment publiée dans la revue Cell montre d'ailleurs que ces lymphocites T sont capables de reconnaître tous les variants, depuis Alpha jusqu'à Omicron", relève Olivier Schwartz, responsable de l'unité virus et immunité à l'Institut Pasteur.

Quid de la durée de l'immunité conférée ?

Combien de temps les millions de personnes infectées ces dernières semaines peuvent-elles espérer être à l'abri d'une nouvelle contamination ? Il est encore un peu tôt pour le savoir. En février 2021, la Haute Autorité de santé estimait (PDF) que les personnes dont le système immunitaire avait réagi à une infection par le Covid-19 devaient "être considérées comme protégées pendant au moins trois mois, mais plus probablement six mois". 

"Après avoir été malade, vous êtes en général bien protégé contre une réinfection. La question sera de savoir à quel niveau cette protection s'établira dans trois mois", confirme Claude-Agnès Reynaud, directrice de recherche et immunologiste à l'Institut Necker-Enfants malades.

"Lors des précédentes vagues, on avait pu observer que des anticorps restaient présents plus d'un an après l'infection, même si leur quantité diminuait progressivement."

Olivier Schwartz, responsable de l'unité virus et immunité à l'Institut Pasteur

à franceinfo

La durée de l'immunité conférée par l'infection dépendra aussi de l'émergence ou non dans les prochains mois d'un nouveau variant capable d'échapper à l'immunité acquise par le passé, à la manière d'Omicron à la fin de l'année 2021. En raison d'un grand nombre de mutations présent sur la protéine Spike, ce variant réussit en effet à contourner partiellement la protection conférée par une précédente infection ou par les vaccins, qui ciblent la forme de la spicule rattachée à la souche historique du Covid-19. Il pourrait ainsi être à l'origine de l'augmentation des suspicions de réinfections observée par les autorités sanitaires au Royaume-Uni depuis la mi-décembre.

Ce nouveau variant qui ferait voler en éclats l'immunité conférée par les millions d'infections liées à Omicron pourrait-il être le sous-variant BA.2 ? Interrogé mardi 25 janvier sur le plateau de LCI, le ministre de la Santé a émis cette hypothèse. Olivier Véran a ainsi relevé que plusieurs cas de personnes ayant été infectées par Omicron puis par BA.2 avaient été recensés au Danemark, pays où ce sous-variant est devenu majoritaire.

"C'est un risque que l'on considère, en partie pour comprendre pourquoi il y a cette remontée des cas quotidiens au Danemark. Mais il faudra du temps pour avoir des données", prévient là encore Etienne Simon-Loriere, responsable de l'unité de génomique évolutive des virus à ARN à l'Institut Pasteur, dans les colonnes du Parisien.

Reste à savoir si les millions de personnes touchées par Omicron en France ces dernières semaines sont protégées les variants précédents. La question se pose notamment pour Delta, qui circule encore, quoique très faiblement, sur le territoire. Les travaux scientifiques ne sont pas unanimes à ce sujet : une étude pré-publiée par des chercheurs sud-africains (en anglais) avance que l'infection par Omicron renforcerait l'immunité contre Delta, tandis que des travaux américains (article en anglais), également en prépublication, indiquent qu'un ancien malade touché par Omicron ne verra son immunité renforcée vis-à-vis de Delta qu'en cas de vaccination préalable. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.