On s'y emploie. Lundi 11 mai : comment bien aborder la reprise du travail
Ce lundi 11 mai, c'est jour de retour au travail pour des millions de Français, même si beaucoup vont rester en télétravail. Comment retrouver la motivation après une aussi longue coupure, quand on a parfois le sentiment d'avoir tout oublié ?
Evelyne Stawicki est coach, psychologue du travail, professeur à l'ESCP Europe. Après parfois huit semaines sans avoir du tout travaillé, pour ceux qui sont au chômage partiel depuis le début du confinement, dans quel état d'esprit esprit est-on ?
franceinfo : on connaît bien le blues du dimanche soir, aujourd'hui elle doit être énorme pour beaucoup, cette appréhension de la reprise...
Evelyne Stawicki : une chose est sûre, pour ceux qui sont restés huit semaines sans du tout travailler, il va falloir sortir d'une bulle de protection pour se retrouver projeté brutalement dans la vraie vie, avec tout son cortège d'émotions, et d'émotions contradictoires, à la fois la hâte de retourner travailler, de retrouver les collègues, les clients, et en même temps la peur, l'inquiétude de la promiscuité, du virus, la hâte de reprendre son activité et la crainte de ne plus savoir, de ne plus être capable.
Et puis on va avoir toutes ces questions qui vont devenir encore plus réelles, sur l'avenir de son entreprise, l'avenir de son poste. Donc, ça va être une période qui va être source pour certains de beaucoup d'anxiété.
Cela veut dire que ne pas être au top tout de suite, c'est normal ?
Oui, le chômage, ça n'est pas des vacances, et ça n'est pas parce des salariés n'ont pas travaillé qu'ils n'ont pas été mis à dure épreuve.
Comment faut-il gérer les premières heures, la première journée ?
Il faut déjà accepter de ne pas être performant tout de suite. Dans les lois de gestion du temps, il y en a une qui est fondamentale, que l'on a tendance à oublier, c'est que si on veut gagner du temps, il faut accepter d'en perdre. Et vouloir retrouver tout de suite son rythme d'avant est la meilleure façon de générer du stress, et donc, de la contre performance.
Avec ses collègues, comment renouer les relations ?
Je recommande de bien soigner l'accueil des salariés qui reviennent travailler après une très longue absence. Justement parce rien ne va se produire comme avant. On peut organiser un café d'accueil, en prenant bien soin de respecter les distances, en disséminant dans l'entreprise café et croissants, c'est un message symbolique qui va signifier le plaisir à se retrouver. On peut afficher un message d'accueil sur le poste de travail, envoyer un mail ou une vidéo. Nous prenons tous soin de notre santé, nous devons tout autant prendre soin de nos relations.
Les managers, en particulier, comment doivent-ils s'y prendre ?
Certaines personnes, pendant ces huit semaines de chômage, n'ont pas eu la moindre nouvelle de leur manager, et ça c'est vraiment dommageable. Les managers fantômes en situation de crise perdent durablement la confiance de leurs équipes. Cela veut dire qu'ils se sont discrédités, en cas de problème on ne peut pas compter sur eux.
Dans cette reprise, le rôle du manager va être important. Il y a trois types de manager. Celui qui va vouloir foncer parce qu'il va falloir rattraper, pense-t-il, deux mois de manque de chiffre d'affaires, alors on fonce, on ne se pose pas de question, fini les vacances. Il y a celui qui va nier le réel, qui va faire comme si de rien n'était, qui va reprendre les choses là où on les a laissées.
Ces postures ne sont pas recommandées. Ce que je recommande c'est de donner du sens et de prendre un temps d'accueil où on va se retrouver, essayer de comprendre ce qu'il s'est passé, essayer de comprendre que cette période nous a permis de réinventer une forme de travail qui a été parfois formidable.
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