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Coronavirus : "Liberté, égalité, sécurité sont une triplette indissociable", insiste Jacques Toubon, le défenseur des Droits

Selon lui, les mesures de confinement ne sont pas contraires aux droits. Il plaide cependant pour un droit à la cantine pour les plus précaires. Il rappelle que le repas de midi constitue "l'essentiel de la nourriture" pour certains enfants.

Article rédigé par franceinfo - avec France Bleu Paris
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Jacques Toubon, le Défenseur des droits, le 6 septembre 2019 à Paris. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)

Jacques Toubon, le Défenseur des droits, indique lundi 20 avril sur France Bleu Paris que les mesures de confinement sont compatibles avec l'État de droit. "Les mesures qui consistent à restreindre les libertés pour obtenir [...] le recul et la fin de la pandémie [...] doivent être simplement nécessaires, proportionnées et elles doivent être exceptionnelles et temporaires. Et dans l'état actuel des choses, c'est le cas", justifie-t-il. "Liberté, égalité, sécurité sont une triplette indissociable, met en garde Jacques Toubon : il faut assurer la sécurité sanitaire pour tous, c'est notre objectif fondamental, mais il ne faut pas mettre en cause liberté et égalité."

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Le Défenseur des droits pointe également du doigt des inégalités "exacerbées par le confinement", notamment pour les familles précaires dont les enfants ne peuvent plus aller à la cantine depuis la fermeture des établissements scolaires. Ils sont "privés" selon lui d'une "nourriture équilibrée et diététique".

franceinfo : l'état d'urgence sanitaire est-il compatible avec l'État de droit ?

Jacques Toubon : Oui, bien entendu, puisque l'état d'urgence, c'est une enclave exceptionnelle et temporaire dans notre État de droit. Et il faut naturellement, c'est cela qui est essentiel, que ça le reste. Les mesures qui consistent à restreindre les libertés pour obtenir un résultat en termes de santé publique, c'est-à-dire le recul et la fin de la pandémie, doivent être simplement nécessaires, proportionnées et elles doivent être exceptionnelles et temporaires. Et dans l'état actuel des choses, c'est le cas. Elles doivent être respectueuses des principes qui sont les nôtres : liberté et égalité. C'est une question que j'ai soulevée depuis le début. Il ne faut pas traiter différemment certaines personnes parce que ce serait de la stigmatisation et juridiquement de la discrimination. J'ai été très satisfait de voir que le président de la République a renoncé, notamment, à ce qui avait été envisagé en ce qui concerne les personnes âgées ou malades, en invoquant la nécessité de ne pas discriminer. Liberté, égalité, sécurité sont une triplette indissociable : il faut assurer la sécurité sanitaire pour tous, c'est notre objectif fondamental, mais il ne faut pas mettre en cause liberté et égalité. Dans les mesures de déconfinement, prochainement, c'est l'une des questions qui devra être envisagée. Par exemple : comment est-ce que l'on traite loyalement, même si c'est différemment, les élèves dans le déconfinement des écoles ?

Y a-t-il rupture d'accès à l'éducation avec les écoles fermées ?

L'accès au numérique n'est pas assuré de manière égale pour tous. Il y a, le gouvernement l'a dit, 13 millions de personnes qui ont des difficultés. Mais s'agissant des enfants et des élèves, le ministère de l'Éducation nationale a donné des pourcentages qui vont de 5 à 10%. Peu importe que ce soit ça ou que ce soit plus, il est clair que les inégalités, sur ce plan, sont exacerbées par le confinement. Il est clair que les enfants, dont le repas de midi à la cantine était l'essentiel de la nourriture, une nourriture équilibrée diététique, en sont aujourd'hui privés. Du point de vue de la vie quotidienne, de la santé de ces enfants, il y a une situation qu'il faut redresser. Personnellement, je pense que dans les réouvertures des écoles et des collèges, la première question qu'il faudrait envisager, c'est comment fait-on accéder de nouveau tous les enfants à égalité, y compris les enfants des familles les plus précaires, à une nourriture collective telle qu'elle était donnée auparavant par les cantines.

Vous demandez un droit à la cantine ?

Nous le demandons depuis longtemps. Nous avons fait beaucoup de propositions, nous avons fait un rapport l'année dernière sur ce sujet. Il y a beaucoup de parlementaires qui l'ont proposé. Un texte a été voté, il y a quelques années à la diligence d'un député francilien Roger-Gérard Schwartzenberg, qui est allé dans ce sens. Mais il n'y a pas encore aujourd'hui pour les communes d'obligation de créer des cantines et d'ouvrir les cantines à tous. Cette situation dramatique aujourd'hui montre bien que c'est le sens dans lequel il faut aller.

L'égalité entre tous, entre toutes les situations, les plus précaires et les plus vulnérables, ce n'est pas des grands mots, des grandes mesures : c'est dans la vie de tous les jours.

Jacques Toubon, défenseur des Droits

à France Bleu Paris

C'est pour cela que l'on s'est battu par exemple pour faire en sorte que les grands magasins n'empêchent pas les mamans seules qui venaient avec des enfants de rentrer avec leur fille ou leur garçon.

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