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Coronavirus : le rebond de l'épidémie à Pékin inquiète-t-il les autorités sanitaires françaises ?

Au moins 158 personnes ont été contaminées par le Covid-19 depuis la semaine dernière à Pékin, suscitant l'inquiétude en Chine. De leur côté, les autorités françaises disent suivre attentivement cette situation.

Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Des membres de l'équipe Beijing Blue Sky Rescue procèdent à la désinfection du marché de gros de Yuegezhuang à Pékin, en Chine, le 16 juin 2020.  (CHEN ZHONGHAO / XINHUA / AFP)

Ecoles de nouveau fermées, vols annulés, quartiers placés en quarantaine... La ville de Pékin est en train de se reconfiner après une résurgence de cas de Covid-19 ces derniers jours. Selon un récent bilan annoncé jeudi 18 juin, au moins 158 personnes ont été testées positives depuis la semaine dernière dans la mégapole chinoise, qui avait été relativement épargnée jusque-là par la crise sanitaire. Ce rebond épidémique, qualifié d'"extrêmement grave" par les autorités locales, inquiète-t-il les autorités françaises ?

Alors que la France est entrée dans la phase 3 de son déconfinement, notamment avec la réouverture totale des écoles et collèges à partir du 22 juin, ce nouveau foyer en Chine, berceau de la pandémie avec l'apparition des premiers cas à Wuhan fin 2019, est surveillé de près par Paris. Il fait "l'objet d’une analyse constante à travers les réseaux épidémiologiques et diplomatiques", indique à franceinfo la Direction générale de la santé (DGS). "Cette analyse permet de nourrir à la fois la compréhension des conditions de reprise épidémique ainsi que les éventuelles mesures spécifiques à en déduire pour la gestion de la situation sanitaire", précise-t-on.

"Cela montre bien que même si on est rassuré en Europe, on a un virus qui continue à circuler dans le monde et qui reviendra chez nous. Il faut profiter de cette période d'accalmie pour se préparer", glisse un membre du comité scientifique sur le Covid-19.

Une deuxième vague en Chine ?

Selon nos informations, ce comité devrait communiquer en fin de la semaine avec un "double message" : "Profitons de la période pour respirer, mais ayons en tête ce qui pourrait se passer en octobre/novembre." "Ne pas se préparer à une deuxième vague serait une faute majeure", a souligné le patron de la DGS, Jérôme Salomon, lors de son audition par la commission d'enquête sur la gestion de l'épidémie par les autorités françaises, lundi.

Mais peut-on parler d'ores et déjà de "deuxième vague" en Chine ? Le groupe Covid-19 de l'Académie nationale de médecine, qui a tenu une conférence de presse par visioconférence mardi 17 juin, invite à la prudence.

Il est trop tôt pour parler de seconde vague. C'est un rebond épidémique local qui doit inciter le monde entier à la vigilance.

Yves Buisson, président du groupe Covid-19 de l'Académie nationale de médecine

"A Pékin, il s'agit plutôt d'une première vague d’infections", pointe sa consœur Christine Rouzioux, professeure de virologie à l'université Paris-Descartes, évoquant une possible évolution du virus depuis l'épisode de Wuhan.

Selon les autorités locales, le virus a notamment été détecté au vaste marché de Xinfadi, dans le sud de la capitale, plus précisément sur des planches servant à découper du saumon de Norvège. Néanmoins, experts norvégiens et chinois s'accordent à dire qu'il est peu probable que ce poisson ait été un vecteur de la maladie."Cela a pu provenir d'une personne contaminée", a reconnu à la télévision l'épidémiologiste en chef du Centre de contrôle et de prévention des maladies en Chine, Wu Zunyou.

"Il y a déjà de nouveaux clusters en France"

"Les zones urbaines denses sont particulièrement à risque", observe le professeur Gérard Dubois, membre de l'Académie nationale de médecine. La mairie de Pékin a déjà confiné près de 30 zones résidentielles et exhorté ses 21 millions d'habitants à éviter les voyages "non essentiels" en dehors de la ville.

Faut-il s'attendre à revivre la même situation dans les grands centres urbains français ? A l'heure actuelle, les mouvements de population entre la Chine et l'Europe sont quasi nuls, mais la circulation des personnes repart à l'intérieur du Vieux Continent, avec la réouverture des frontières. "On sait que ce sont malheureusement des choses qui peuvent arriver, observe auprès de franceinfo Yazdan Yazdanpanah, chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital Bichat. Il y a déjà de nouveaux clusters en France. On peut dire que c’est une mauvaise nouvelle ou une bonne nouvelle, car cela signifie que l'on surveille bien."

Les membres de l'Académie nationale de médecine se rejoignent sur un point : la question n'est pas de savoir si la France sera confrontée à une résurgence de cas mais quand et de quelle ampleur.

Mi-août, septembre, décembre ? Il va nous revenir dessus mais il n'est pas certain que la vague soit plus petite ou plus grande.

Gérard Dubois, membre de l'Académie nationale de médecine

Le microbiologiste Patrick Berche, également membre de l'Académie nationale de médecine, se veut néanmoins optimiste : "Ça risque de continuer à bas bruit pendant tout l’été. Il peut y avoir une résurgence de cas, mais il y a d’une part l’éducation de la population aux gestes barrière et d'autre part une certaine immunité", estime-t-il, évoquant la possibilité d'une immunité croisée avec d'autres coronavirus.

En Chine, des experts cités dans les médias officiels assurent de leur côté que la situation à Pékin est différente de celle vécue en début d'année à Wuhan, coupée pendant plus de deux mois du reste du pays. Selon ces spécialistes, les cas à Pékin sont localisés et la source de cette nouvelle vague de contaminations a été rapidement repérée, permettant aux autorités de maîtriser plus facilement la situation. Cependant, les provinces du Hebei, du Liaoning, du Sichuan et du Zhejiang ont toutes signalé de nouveaux cas de contamination liés au marché de Xinfadi, amenant certains exécutifs régionaux à imposer des quarantaines aux visiteurs en provenance de Pékin.

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