Covid-19 : ne pas reconfiner le pays est "un pari" qui "nous coûte très cher en termes de vies", estime le professeur Gilbert Deray

Un Conseil de défense sanitaire se tient ce mercredi pour faire le point sur l'évolution de la pandémie de Covid-19 en France. Dunkerque poursuit son confinement le week-end et l'Île-de-France dépasse le seuil de 1 000 patients en réanimation. Le gouvernement n'envisage pas de nouvelles restrictions sanitaires, mais pas non plus d'allègement des contraintes déjà en place. Pour Gilbert Deray, professeur à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, interrogé par franceinfo, le fait que le gouvernement a décidé de ne surtout pas reconfiner complètement le pays est "un pari" qui "nous coûte très cher".

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franceinfo : Que pensez-vous de la situation de statu quo du gouvernement ?

Gilbert Deray : Je ne la comprends pas en tant que médecin. Sur le plan sanitaire, on a érigé le confinement en tant que grand méchant loup. On ne peut pas en parler et surtout, il ne faut pas confiner nous dit-on. Le problème, c'est que la situation en Île-de-France, elle est évidemment catastrophique, plus de 1 000 patients en réanimation c'est du jamais vu depuis novembre. Et puis la courbe d'incidence est exactement la même que dans les Hauts-de-France. Il n'y a strictement aucune différence. Donc la logique pure aurait voulu que l'on prenne d'autres mesures il y a des semaines. Mais nous sommes piégés parce qu'on a décidé que plus jamais on ne refermerait le pays, ce qui clairement sur le plan sanitaire est une erreur. Et je voudrais rappeler que quand vous regardez de l'extérieur les pays qui l'ont fait proprement depuis maintenant un an : Australie, Nouvelle-Zélande, Asie, s'en portent très bien.

Il fallait selon vous reconfiner toute la France ?

Oui, très clairement. Et je voudrais également dire que personne n'a pu montrer et c'est même l'inverse, qu'un confinement total court entre 4 et 8 semaines est moins bien que ce que nous subissons depuis 6 mois. Et quand je dis "moins bien", c'est évidemment mieux sur le plan sanitaire, mais c'est clairement mieux, quand on voit les autres pays qui l'ont fait, sur le plan économique, sociétal, psychologique.

Cette stratégie du confinement n'est pas privilégiée par le gouvernement ?

Non, puisque depuis novembre dernier, et même septembre dernier, il a été mis en mantra qu'il ne fallait pas faire un confinement. Donc effectivement, une fois que l'on est parti dans cette voie-là contre l'avis de tous les médecins et scientifiques en tout cas de la majorité du Conseil scientifique, eh bien maintenant on est piégé dans ce pari-là. Mais il nous coûte très cher en termes de vies, et il nous coûte très cher également en termes de lassitude. Le pays n'en peut plus. On ne peut pas tenir comme ça pendant 9 mois, 12 mois, car nous ne sommes pas libres. Nous sommes confinés à 80%, 90%.

Quid des effets psychologiques d'un confinement total ?

Je ne suis pas d'accord là-dessus. Faisons une comparaison simple : en Asie, en Nouvelle-Zélande, et il y en a d'autres, ils ont appliqué des mesures très dures pour le "zéro Covid" et ils se portent beaucoup mieux que nous. Vous avez vu le Grand Prix de Melbourne avec 30 000 personnes ? Les plages d'Australie et de Nouvelle-Zélande ? L'activité économique de ces pays ? C'était la bonne solution. Et maintenant, quand vous prenez Israël, la Grande-Bretagne qui sont en train de sortir avec d'une part un confinement dur, c'est ce qu'il fallait faire en janvier, et d'autre part la vaccination massive, on a la solution de sortie. Et dire que ce n'est pas bien de confiner totalement parce que ce n'est pas bien sur le plan psychologique, bien sûr que ce n'est pas bien, mais est-ce que c'est mieux de rester 12 mois avec un confinement partiel ? Non. C'est pire.