"C’est dur mais on n’a pas le choix" : les familles sans ordinateur inquiètes de devoir faire l'école à la maison
Dans les foyers où les équipements informatiques ne sont pas nombreux, la fermeture des établissements scolaires risque d'être difficile à vivre.
Dernière sonnerie dans la cour de cette école classée REP en Seine-Saint-Denis, vendredi 13 mars, avant plusieurs semaines. Les enfants ont bien compris qu'ils n'y remettraient pas les pieds tout de suite, après l'annonce de la fermeture, à partir de lundi 16 mars et "jusqu'à nouvel ordre", des crèches, des établissements scolaires et universités, pour tenter de stopper l'épidémie de coronavirus covid-19.
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Mamadou, 9 ans, a fait du tri dans son casier. Il repart avec des devoirs donnés par son enseignante. "Elle nous a donné des tables de multiplication parce qu’après, quand on va reprendre l’école, quand le coronavirus sera parti, après on va apprendre les divisions et il faut qu’on apprenne absolument nos tables de multiplication jusqu’à neuf", explique-t-il.
Samira est venue chercher ses quatre enfants. Elle est mère au foyer et c'est elle qui va assurer les cours pendant la fermeture de l'école. "Je vais aider pour leurs devoirs et j’ai regardé avec le directeur et leur maîtresse s’il y a un programme qu’on puisse faire à distance. On va chercher sur internet si on trouve quelque chose", témoigne cette mère de famille. Samira a internet sur son téléphone portable mais n'a pas d'ordinateur. Elle se demande si elle ne va devoir en acheter un, même si elle doit payer en trois fois.
S'il faut par exemple que j’achète un ordinateur, je n’hésiterais pas, il faut que j’avance, pour mes enfants.
Samira, une mère de familleà franceinfo
Autre solution envisagée par Madina : des réunions avec d'autres mamans et leurs enfants. "Je vais voir avec les autres mamans, on va essayer de faire un petit groupe entre nous et on va voir, affirme-t-elle. On a le numéro de la maîtresse aussi, on peut la contacter. C’est dur mais on n’a pas le choix, malheureusement."
La fracture numérique, une réalité
C'est dur, et c'est bien ce qui inquiète les professeurs. Le ministre de l'Éducation nationale met en avant le recours aux classes virtuelles, mais comment faire dans les départements les plus touchés par la fracture numérique, comme en Seine-Saint-Denis ? C'est une réalité qui n'a pas été prise en compte, selon Sylvie, l'une des enseignantes.
Quand j’ai entendu pour la première fois parler du numérique, je me suis dit : ‘moi, la moitié de ma classe n’a pas d’ordinateur’ !
Sylvie, enseignanteà franceinfo
"J'en ai reparlé ce matin, et des élèves ont levé la main, un peu paniqués, en me disant ‘maîtresse, on fait comment ? On n’a pas d’ordinateur, on a à peine les téléphones’… C’est un peu compliqué, on ne sait pas quoi faire", souffle l'enseignante.
Hors de question de creuser les inégalités avec la fermeture des écoles, c'est ce que pointe du doigt Karim, le directeur de l'école. "Y aura-t-il la possibilité de donner des rendez-vous pour effectivement continuer à avoir un contact humain avec des familles avec lesquelles de toute façon nous n’aurons pas de contact numérique ? Et on le sait déjà", rétorque-t-il. Sans consignes claires, ni solutions adaptées, les élèves de cette école auront dans un premier temps une liste d'exercices à faire chez eux.
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