Cet article date de plus d'un an.

Infographies La fermeture des petites maternités, un phénomène qui dure en France

L’avenir est de plus en plus incertain pour la maternité des Lilas, en Seine-Saint-Denis. Il doit se préciser en décembre prochain mais la fin des accouchements sur le site paraît inéluctable. La fermeture de cet établissement s’inscrirait alors dans la tendance en France qui tend à réduire le nombre de petites maternités depuis les années 1970.
Article rédigé par franceinfo - Aurore Richard
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Mobilisation contre la fermeture de la maternité du Blanc en 2018. (GAELLE FONTENIT / RADIOFRANCE)

La maternité des Lilas, en Seine-Saint-Denis, ne devrait plus en être une bien longtemps. L’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France prévoit une nouvelle réunion en décembre 2023 pour "finaliser" le projet. Le site des Lilas doit devenir un centre de santé pour femmes où l’endométriose, la pré-natalité ou encore la post-natalité seront prises en charge, mais où il ne sera plus possible d’accoucher. La partie "maternité" doit être transférée à l’hôpital de Montreuil, à un peu plus de trois kilomètres des Lilas.

Cette maternité de Seine-Saint-Denis devrait donc s’ajouter à la longue liste des maternités qui ferment. Depuis les années 1970, en France métropolitaine, le nombre de ces établissements ne fait que chuter. Près de 33% des maternités ont fermé en 20 ans, entre 2001 et 2021. En près de 50 ans, depuis 1972, trois quarts de ces établissements ont même disparu.


Parmi les "sacrifiées", on peut citer la maternité de Die, dans la Drôme, fin 2017, celle du Blanc, dans le Berry en 2018 ou encore, celle de Bernay, en 2019, dans l’Eure. Cette tendance à la fermeture n’est pas véritablement liée à la baisse du nombre de naissances en France métropolitaine puisqu’en près de 50 ans, depuis 1972, les naissances ont baissé de "seulement" 20%.


Ce phénomène est plutôt lié aux politiques de santé mises en place depuis les années 1970. Les pouvoirs publics veulent concentrer les accouchements vers les maternités les mieux équipées, pour des raisons de sécurité, disent-ils, au détriment des moins équipées. C’est d’ailleurs pour cela qu’en 1998, les décrets Périnatalité organisent les maternités en quatre catégories, pour mieux faire correspondre "le niveau de risque pour la patiente et le nouveau-né et le type de la maternité d’accueil", explique la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees). 

Dans le détail, une maternité de type 1 est un établissement qui possède un service d’obstétrique. Elle est de type 2a quand un service de néonatologie est sur le même site que le service d’obstétrique. Une maternité passe en type 2b quand elle a, en plus, un service de soins intensifs néonatals. Et enfin, un établissement est de type 3 lorsqu’il possède tous ces services et également, un service de réanimation néonatale. La Drees note que selon le type de maternité, la taille des établissements augmente. En 2020 par exemple, un établissement "de type 1 pratique en moyenne 774 accouchements par an, une maternité de type 2a, 1 410, une maternité de type 2b, 1 961, et une maternité de type 3, 3 142".

Dans son rapport 2022 sur les établissements de santé, la Drees constate que cette politique de restructuration et de concentration des maternités a les effets escomptés, étant donné que les établissements de types 2 et 3 s’imposent au fil des années. En 1996, 43% des accouchements ont eu lieu dans des maternités de types 2 et 3 et en 2020, cela est passé à 81%. Autrement dit, tout cela s’opère au détriment des maternités de type 1, des petites maternités, qui sont aussi les premières visées par les fermetures. "La réduction de l’offre constatée depuis 2002 s’est concentrée sur les maternités effectuant moins de 1 000 accouchements et surtout sur celles de moins de 500 accouchements", précise d’ailleurs un rapport de la Cour des comptes, en décembre 2014.


Un rapport remis en février dernier à l’Académie de médecine préconise d’ailleurs la fermeture d’une centaine d’autres petites maternités, plus exactement celles qui assurent moins de 1 000 accouchements par an. Maintenir ces structures est "illusoire" selon ce rapport. Plusieurs raisons y sont avancées : "La désaffection des usagers pour les structures de type 1 s’amplifie spontanément et parallèlement aux difficultés de recrutement des personnels médicaux et paramédicaux", "le souhait des personnels de travailler au sein d’équipes suffisamment dotées", "le recours croissant et souvent majoritaire à l’intérim qui entraîne des fermetures temporaires itératives" et "une augmentation du risque vital maternel dans les plus petites structures et en l’absence de continuité des soins pouvant être assurée par une équipe d’obstétrique et d’anesthésie 24 heures sur 24".

Au-delà de ces arguments, les difficultés financières rencontrées par ces petites maternités ne doivent pas jouer en leur faveur. Le rapport de la Cour des comptes de fin 2014 évoque notamment "le sous-financement structurel des maternités qui ne peuvent trouver un équilibre qu’à partir de 1 100 à 1 200 accouchements par an en raison d’une déconnexion ancienne des tarifs et des coûts réels".

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.