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God Save the King !

Elizabeth II, 96 ans, est morte ce jeudi 8 septembre 2022, à Balmoral, en Écosse. La reine d'Angleterre régnait depuis 70 ans, 7 mois et 2 jours. Un record de longévité de l'histoire contemporaine pour un monarque. À 73 ans, Charles III, son fils, devient le nouveau roi d'Angleterre. 

Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Les "unes" de la presse française vendredi 9 septembre 2022, au lendemain de la mort de la reine Elizabeth II, après 70 ans, 7 mois et 2 jours de règne.  (CHESNOT / GETTY IMAGES EUROPE)

Après la disparition ce jeudi 8 septembre après-midi de la reine d’Angleterre Elisabeth II, Micro européen consacre son émission à sa vie de souveraine avec l’écrivain, biographe et journaliste, Jean des Cars, auteur de Pour la Reine, hommage à Elizabeth II, paru chez Perrin.  

franceinfo : Jean des Cars, peut-on dire "God save the King" ?

Jean des Cars : Oui, parce que le monde a perdu une personnalité exceptionnelle, Sa Majesté Elizabeth II, qui était le seul chef d'Etat en fonction ayant connu la Seconde Guerre mondiale, une reine de l'image parce qu'elle avait eu l'idée de faire filmer son couronnement pour la télévision. Une femme qu'on était habitué à voir avec ses chapeaux, avec ses drames de famille et qui ne voulait pas être vue diminuée. Ceci est très important. C'est la raison pour laquelle elle n'avait pas voulu être à la séance de rentrée du Parlement pour ne pas que le peuple voit combien elle était fatiguée, combien elle avait du mal à marcher. C'était déjà un signe de transition pour Charles.

Il recevait déjà les "Red Boxes" ?

Absolument. Charles recevait les "Red Boxes", les boîtes rouges, avec les renseignements secrets évidemment cryptés aujourd'hui, dont elle avait connaissance dès 1942, avant la bataille de Stalingrad. 

Son père l'initiait aux affaires de la couronne...
 
Absolument, et donc avec des documents alertant sur telle ou telle situation. Charles, les recevant à son tour, était déjà dans son rôle de futur souverain. On se souvient que le fauteuil, à côté de lui, était remplacé par un petit meuble sur lequel était posée la couronne, couronne que la reine, en 1953, apprenait à porter à son petit déjeuner, pour ne pas la perdre ou ne pas la faire tomber le jour du couronnement.

Donc, Charles était prêt. La reine a tenu à préparer l'avenir et même si c'est très douloureux, il est prêt depuis des années. Je dirais surtout depuis son intronisation en 1969 comme prince de Galles après une cérémonie très fastueuse. Donc il est au courant de tout, tout ce qu'il doit savoir, tout ce dont il ne parlera jamais. Et c'est ça qui est fantastique. La force du silence. Voilà, une page est tournée. La reine faisait partie de notre imaginaire. Il y a d'autres souveraines en Europe, comme par exemple la reine Margrethe II de Danemark, une femme remarquable qui règne depuis 50 ans. Mais LA reine, pour le monde entier, c'était Élizabeth II.

Elle a accompagné des générations avec toujours ce sentiment très britannique de ne jamais se plaindre. Elle était reine le 7 février 1952, en descendant de l'avion qui l'a ramenée d'Afrique...

Elle savait qu'elle irait jusqu'au bout parce qu'il y avait un mot cauchemardesque pour elle, c'était le mot abdication. Ce qu'avait fait son oncle Édouard VIII, devenu le duc de Windsor, qu'elle a revu avant sa mort à Paris, dans le bois de Boulogne à Neuilly, en 1972. Que se sont-ils dit? Il y avait une explication, mais enfin bref, c'est à cause de son abdication que son père est devenu George VI. Et on connaît les difficultés d'élocution qu'il avait depuis le fameux film « Le Discours d'un roi ». Donc Elizabeth II a été élevée dans le sens du devoir et on ne se plaint pas. On ne réclame pas, mais avec un sens de l'adaptation.

70 ans de règne, un règne plus long que celui de la Reine Victoria ?

Oui et elle est le dernier acteur et le dernier témoin de cette époque de la guerre et de l'après-guerre. Des restrictions. Mais elle ne se plaignait jamais, cette femme qui adorait la lecture, le théâtre.

Il y avait beaucoup d'humour aussi. Pour Noël, par exemple, la famille royale chantait "The rain in Spain" de "My Fair Lady" ?

Oui, elle chantait "My Fair Lady". Elle adorait le cinéma. Elle a permis aussi récemment le feuilleton The Crown. C'est d'un grand libéralisme. C'est une femme au destin unique. Le monde a perdu un de ses acteurs et témoins de temps qui sont maintenant lointains.

Et Jean, la première émotion, on peut le dire, furent les funérailles de Philip d'Edimbourg ? 

Oui, je pense que le monde n'oubliera pas le regard de douleur de la reine, alors qu'elle portait ce masque de deuil. Aussi, dans la chapelle Saint-Georges, elle était seule, et cet homme, son mari, elle l'avait rencontré quand elle avait 13 ans. C'était en juillet 1939, et elle a eu le culot de dire : ce sera lui ou personne d'autre. Cet officier de marine balloté dans le gotha, et qui avait beaucoup d'humour, il l’a dit, "N'oubliez pas : mon titre principal n'est pas duc d'Edimbourg, ce n'est pas le mari de la reine, je suis le champion mondial de l'inauguration des plaques commémoratives".

Pour la Reine, hommage à Elizabeth II de Jean des Cars est paru chez Perrin.  

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