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Ma vie d'après. Le commissaire européen au budget et à l'administration

Ces petits riens, ces petits touts, la preuve que rien ne sera plus comme avant, que le "monde d'après" est déjà là. Mercredi, Neila Latrous est un commissaire européen.

Article rédigé par franceinfo - Neila Latrous
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Johaness Hahn, Commissaire européen au budget et à l'administration.
 (VALDA KALNINA / AFI)

Je m’appelle Johaness Hahn, je suis d’origine autrichienne et je suis depuis moins d’un an, depuis le 1er décembre dernier le commissaire européen au Budget et à l'Administration. Et avec mon collègue italien, Paolo Gentiloni, commissaire à l'Économie, nous veillons à ce que les États membres fassent preuve de sérieux, en matière financière et respectent notamment les engagements pris en matière de déficit. Enfin, ça c’était avant le : "Quoi qu’il en coûte" d'Emmanuel Macron, le 12 mars. Depuis l’Union européenne s’est convertie elle aussi au “quoi qu’il en coûte”, avec un plan de relance à 750 milliards d’euros adopté dans la douleur, mais adopté tout de même. C’est de la dette en plus.

Du coup, nous avons demandé à Clément Beaune, secrétaire d’État chargé des affaires européennes, si c’était la fin de la rigueur budgétaire, vous vous souvenez la règle des 3% :"Cela dépend de l'Union européenne dans l'ensemble, pas de chaque pays qui doit respecter les critères. Pas en ce moment, parce que durant la crise, tout le monde en est dispensé et personne ne les respecte parce qu'on doit relancer sans aucun obstacle." 

Une dette qui n'a pas fini de s'envoler, n'en déplaise aux traités

La règle n’est pas morte, mais enfin, on s’en passe très bien en ce moment. C’est encore plus flagrant quand on regarde les comptes. Premier déficit public en huit ans pour l’Allemagne, 3,2% du PIB au premier semestre, juste au-dessus de la limite des 3% fixée par les traités européens. 

À titre de comparaison, la France s’attend à ce que son déficit public grime à 11,4% du PIB cette année ! Quant à la dette, Bercy s’attend à ce qu’elle atteigne des niveaux stratosphériques, 121% du PIB, c’est-à-dire de la richesse produite par la France. La France, pays important, moteur, fondateur de l’Europe.
 
Est-ce à dire du coup que l’Union s’apprête à tourner le dos à des années d'orthodoxie budgétaire ? L’essaysite Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes, ne parierait pas là-dessus :"Vous avez raison, le jour d'après, on est plus très regardant sur les moyens, sur les paquets d'argent que l'on met pour essayer de relancer l'économie. On va fatalement revenir un jour à cette orthodoxie financière. Reste à savoir quand ? Peut-être pas dans les mois qui viennent. Mais dans les deux ans qui viennent, je pense que la Commission européenne sera amenée à resserrer les boulons sauf à ce que les Chefs de gouvernement décident de modifier les traités." 

C’est compliqué, d’autant qu’Emmanuel Macron a déjà tenté de lancer le débat, bien avant le Covid-19, en novembre 2019, quand il jugeait dans l’hebdomadaire anglais The Economist que les fameux 3% relevaient d'un "débat d'un autre siècle".On n’a pas vu de coalition européenne "anti 3%" se lever à l’époque. La négociation du plan de relance a confirmé que nombre de pays, ceux que l’on appelle les frugaux, restent très attachés au sérieux budgétaire. Cela va être compliqué d’obtenir, avant la prochaine présidentielle, un quelconque assouplissement des critères de stabilité européens.

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