Présidentielle en Russie : après le scrutin, l'ampleur de la fraude commence à apparaître au grand jour

Selon des médias russes indépendants, le nombre de voix volées oscillerait entre 22 millions et 31 millions, soit quasiment la moitié des suffrages obtenus par Vladimir Poutine.
Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Vladimir Poutine se rend aux urnes pour voter à Moscou lors d'élections régionales, le 9 septembre 2018. (ALEXEY NIKOLSKY / SPUTNIK)

En Russie, cinq jours après la présidentielle et le score "stalinien" de Vladimir Poutine, réélu avec plus de 87% des voix, on commence, jeudi 21 mars, à avoir une idée de l'ampleur de la fraude. C'est simple, le média russe indépendant Meduza parle de l'élection la plus truquée de l'histoire du pays. Le site d'investigation, qui travaille depuis la Lettonie, estime que sur les 76 millions de bulletins en faveur de Vladimir Poutine, au moins 22 millions sont des faux. Un autre média, Novaya Gazeta Europe, parle de 31 millions de bulletins falsifiés. Quasiment la moitié des voix obtenues par le président seraient complètement bidon, selon ces décomptes. 

Pour révéler l'ampleur de la fraude, il y a une méthode très simple, la méthode Shpilkin, du nom du statisticien qui l'a mise au point il y a une dizaine d'années. Elle se fonde sur l'examen du taux de participation, bureau par bureau. En gros, elle montre que quand la participation explose, c'est toujours au profit de Vladimir Poutine. Le correspondant de franceinfo à Moscou, Sylvain Tronchet, expliquait en début de semaine que certains fonctionnaires zélés avaient appliqué à la lettre les objectifs de participation qu'on leur avait fixés. Si bien que des dizaines et des dizaines de bureaux de vote se sont retrouvés à afficher le même taux, identique au centième près.

Peu de flagrants délits... car peu d'observateurs indépendants !

Sur place, même s'il y avait peu d'observateurs indépendants, certains ont pu parfois voir des bourrages d'urnes. Cette année seuls les partis et quelques institutions avaient le droit d'accréditer des observateurs, donc il n'y a quasiment pas de vidéos de flagrants délits. À Krasnodar, par exemple, pas loin de la Crimée, une responsable de bureau de vote a été filmée sortant de l'isoloir plusieurs bulletins en main. La personne qui tournait avec son téléphone a été immédiatement arrêtée et condamnée à 14 jours de prison pour "offense aux représentants de l'État". Dans le sud de Moscou le journaliste du Monde, Benoît Vitkine, rapporte que là où il avait des observateurs le score en faveur de Vladimir Poutine tourne autour de 60%. Quand il n'y en avait pas, il grimpe à 99%.

Il est vraisemblable qu'il y ait eu des fraudes après le dépouillement, avec des résultats qui ne correspondent pas du tout à ce qui a ensuite été publié, même dans la capitale où les autorités essaient habituellement de rester discrètes. Beaucoup de manipulations ont également servi à affaiblir le score des candidats d'opposition pourtant déjà au ras des pâquerettes. Au final ces élections ont été le théâtre de beaucoup de manipulations grossières sans aucun souci de préserver les apparences. Vladimir Poutine ne cherche même plus à faire semblant.

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