Afghanistan : deux présidents pour un pays plongé dans le chaos
Deux hommes se sont déclarés vainqueurs de la présidentielle afghane, au même moment.
Si la situation de l'Afghanistan n'était pas dramatique, la scène aurait pu être comique. Dans le palais présidentiel, lundi 9 mars après-midi à Kaboul, Ashraf Ghani, devant des invités dont beaucoup de diplomates, est déclaré président à la suite de l’élection contestée de septembre dernier, mais qu’il a remportée.
Une série d'explosions retentit. Un attentat. Ashraf Ghani reste sur l'estrade, déclare qu'il n'a pas de gilet pare-balles et qu'il est prêt à rester sur place, même s'il doit y laisser sa tête. Quelques minutes plus tard, le même palais présidentiel, mais dans une autre aile. Abdullah Abdullah, le perdant de l'élection, se déclare lui aussi président du pays. "Le peuple afghan m'a confié cette responsabilité", explique-t-il devant, lui aussi, des invités. Et le pays replonge instantanément dans une crise constitutionnelle.
Des discussions reportées
En théorie, Ghani est vainqueur, avec un tout petit peu plus de 50% des voix. Mais il y a eu plus de 16 000 recours électoraux, pour dénoncer la corruption, l'achat de voix, le trafic de bulletin, dans un pays plongé dans la guerre civile avec les talibans. Cette crise ne peut plus mal tomber : le 29 février, les États-Unis, qui veulent se retirer du pays, avaient signé un accord avec les talibans, qui régnaient sur le pays jusqu'à l'invasion américaine de 2001. Une fois cet accord signé, les discussions entre Afghans devaient commencer mardi matin, mais elles ne peuvent évidemment plus avoir lieu.
Quelques minutes après cette double intronisation, le porte-parole des talibans a déclaré : "Rien n'est plus important pour ces esclaves que leurs intérêts personnels", renvoyant les deux leaders politiques à leur crise, pendant qu'eux règnent sur une immense majorité du pays. En signant un accord avec les talibans, les États-Unis s'assurent un désengagement militaire, mais plongent l'Afghanistan dans un face-à-face entre hommes politiques décrédibilisés et talibans puissants. Sans compter l'État Islamique, de plus en plus présent qui, vendredi, revendiquait un attentat dans la capitale, tuant 32 personnes.
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