Amina dévoile ses fragilités dans son nouvel album : "La lumière de mes choix"

Amina est chanteuse et actrice. Elle est repérée par le public français lors de sa participation au 36ème concours de l'Eurovision en 1991 avec le titre : C'est le dernier qui a parlé qui a raison. Puis on la retrouve au cinéma. Elle s'est faite très discrète ces dernières années, en partant vivre dans une maison en bois en Suède. Elle revient avec un nouvel album : La lumière de mes choix, soit une très belle collaboration avec l'artiste Léonard Lasry.

franceinfo : La lumière de mes choix est le carnet de sentiments d'une femme libre, cosmopolite. Vous l'êtes, femme libre ?

Amina : Pour moi, la liberté, c'est vraiment de suivre ce que votre cœur vous dit. Parfois, ça marche, parfois ça ne marche pas. Mais c'est ça pour moi, la liberté.

Il y a une chanson, d'ailleurs, qui est assez symbolique de tout ce chemin parcouru, c'est : On est prié de se plaire.

Magnifique ! C'est un duo avec Léonard et je vais vous raconter une petite anecdote qui a fait sourire et un peu grincer les dents de mon manager et de mes amis, à l'époque. J'avais rendez-vous avec Robert Plant. Il voulait absolument faire un duo avec moi, qu'on travaille ensemble et je sais que c'est un artiste immense, superbe, mais ça ne l'a pas fait et je ne suis plus revenue en studio. Il avait une très belle voix, mais je sentais que ma voix ne vibrait pas avec la sienne. Avec Léonard, ça a été une rencontre. Il a un timbre de voix qui me plaît. Quand le timbre de voix vous plaît, c'est que l'être vous plaît.

Il y a une chanson qui s'appelle : Face à nous. On plonge vraiment dans vos origines, c'est un hommage à votre Tunisie natale. Je voudrais qu'on en parle parce que ça renvoie à votre mère qui a été très importante dans votre vie.

Je suis un peu une nomade des temps modernes. Je vais là où mon cœur vibre.

Amina

à franceinfo

Ma mère m'a enseignée le chant. Elle a été une personne très importante pour moi et elle a été une femme très rebelle, c'est-à-dire que quand les femmes en Tunisie ont pu divorcer, ça a été la première à divorcer. Je viens d'une famille très rebelle, très avant-garde, donc moi, je me suis dit : bon, c'est super. Maintenant, la liberté en dehors des codes, c'est quoi pour moi ? Pour moi, c'était vraiment d'assumer mes choix, 'La lumière de mes choix', et Léonard a mis en lumière mes choix à travers les paroles et la musique.

La musique est aussi arrivée dans votre vie par l'intermédiaire de votre grand-mère.

Oui, parce que ma grand-mère chantait des chants traditionnels, mais aussi de la variété italienne. Elle mélangeait l'italien, le tunisien, elle dansait le Charleston avec de bas résille et des baskets dorées. Je viens d'une famille vraiment très drôle.

À 16 ans, vous avez monté votre propre groupe, fait la tournée des lycées. Vous avez compris très vite, vous chantiez du reggae et du jazz, que la musique était la clé pour aller chercher cette liberté.

Je savais que ma voix allait me faire voyager. Et pour moi, voyager, c'est une forme de liberté parce qu'on apprend tellement en voyageant, en rencontrant d'autres personnes qui vivent différemment. Et ça ouvre.

Le résumé de votre vie se situe quand même dans le titre de votre premier 45 tours : Shéhérazade.

Ah oui ! Shéhérazade dans laquelle je rappais en arabe. Et je suis partie à New York avec une petite maquette, j'y ai rappé dans des petits endroits très tôt. Avec des personnalités comme Grandmaster Flash, Afrika Bambaataa, l'un des pères fondateurs de la culture hip hop.

Je voudrais qu'on revienne sur le titre : C'est le dernier qui a parlé qui a raison qui a fait basculer votre vie. Vous représentez d'ailleurs la France à l'Eurovision. Cette chanson, elle représente quoi pour vous et cette aventure aussi ?

J'ai représenté la France à l'Eurovision 91 avec "C'est le dernier qui a parlé qui a raison", une chanson qui parlait de tolérance.

Amina

à franceinfo

En fait, moi, je n'aurais jamais eu l'idée de me présenter à l'Eurovision. On est venu me chercher. Moi, je savais vraiment que j'avais envie de venir avec une chanson qui représentait la France, donc un vrai métissage. Et donc que j'ai écrit cette chanson avec Wasis Diop, Sénégalais. Et il y a donc un côté chaloupé oriental et sénégalais dans la chanson. Il y a eu aussi un accordéoniste tunisien qui est venu faire une très belle mélopée et Joseph Racaille qui a fait des arrangements magnifiques. Pour moi, c'était la France et représenter la France comme ça à l'Eurovision... On ne savait pas du tout qu'on allait avoir un score aussi haut, et on y allait vraiment détendu, en rigolant.

La lumière de mes choix, c'est de la tolérance. C'est le fait que le métissage est aussi au cœur de la vie.

S'il n'est pas au cœur de la vie, c'est la morbidité ambiante. Pourquoi je dis au cœur de la vie ? Parce que dans 'métissage', il y a le mot : sage. Il est sage de se métissée. De toutes façons, on est tous métissés. Quand on regarde les étoiles, il y en a des plus grosses et des plus petites. Il y en a qui brillent plus que d'autres. Elles ne se font pas la guerre.

Il représente quoi cet album ?

Cet album met en lumière des fragilités que je n'aurais pas osé avant. Et je me suis tellement senti en confiance avec Leonard. Petit à petit, il m'a amené vers cette facette de moi. Peut-être que je n'aurais jamais pu le faire avec quelqu'un d'autre, sûrement pas avec Robert Plant, c'est ça que je voulais dire !