Réchauffement climatique : les grands récifs coralliens meurent-ils plus vite que prévu ?

Les récifs coralliens, qui abritent le quart de la biodiversité marine, sont de plus en plus menacés par le réchauffement des océans. Celui-ci qui fait blanchir le corail plus vite que prévu, et les deux plus grands sites, en Australie et au Mexique, sont dans un état alarmant.
Article rédigé par franceinfo - Grégory Plesse, Gwendolina Duval
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Les récifs coralliens du monde entier sont menacés de disparaître complètement d'ici 2050. Récif corallien au large du Costa Rica, le 12 avril 2024. (FLORIAN LAUNETTE & MEGANE CHENE / MAXPPP)

Les océans se réchauffent partout sur la planète et cela pourrait avoir des conséquences dramatiques. L’agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) a déclaré cette semaine son inquiétude quant à cette puissante vague de chaleur marine qui se produit actuellement. Depuis février 2023, les relevés de températures marquent des records aux quatre coins du monde. Même si selon l’agence, il est encore trop tôt pour mesurer précisément les impacts de l’augmentation de la température, les effets sont déjà visibles, notamment sur les coraux qui blanchissent massivement. En la matière, la Grande barrière de corail d'Australie est malheureusement aux premières loges.

En Australie, les jours de la Grande barrière de corail semblent comptés

L'autorité en charge de la protection du plus grand récif corallien du monde a annoncé, mercredi 17 avril 2024, que l'épisode de blanchissement massif en cours est le plus sévère jamais enregistré. C'est la nouvelle plutôt déprimante que viennent de livrer les autorités australiennes. D'après des relevés aériens effectués ces dernières semaines, les trois quarts des récifs observés sont concernés. Ce blanchissement est même jugé extrême sur environ 40% de la Grande barrière de corail, qui s'étend pourtant sur 2 300 km. Cette année, deux cyclones l'ont également endommagée, mais la cause principale de son blanchissement est bien sur le réchauffement climatique et celui des océans. Désormais, ses jours semblent comptés, puisque cet épisode est non seulement le plus violent, mais aussi le cinquième en à peine huit ans.

Mais si l’Australie, en tant que grand producteur d'énergies fossiles, est en partie responsable de ce réchauffement, elle ne peut à elle seule, résoudre ce défi mondial. Si le monde ne parvient pas à contenir le réchauffement mondial sous la barre des 2°C, la quasi-totalité des récifs coralliens dans le monde pourrait disparaître.

Craintes de pertes économiques et mesures contradictoires

Ce serait bien sûr une énorme perte en matière de biodiversité mais aussi un coup dur pour l'économie australienne. La Grande barrière de corail, c'est plus de 64 000 emplois et près de 3,5 milliards d'euros de recettes touristiques chaque année. C'est la raison pour laquelle le gouvernement australien redoute tant la prochaine réunion du Comité du Patrimoine mondial de l’Unesco, au mois de juillet 2024 : au vu des dégâts constatés, on ne voit pas comment la Grande barrière de corail pourra échapper à la liste des sites en péril.

L’Australie a réussi à repousser cette échéance par deux fois déjà, et le gouvernement élu il y a deux ans se montre beaucoup plus volontaire en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Malheureusement, ses actions sont encore jugées trop timides au regard de l’imminence de la menace : tout en s'engageant à protéger les espèces menacées d'extinction et à réduire ses émissions de CO2, il continue par ailleurs de délivrer de nouveaux permis d'exploitation de gisement de gaz naturel, comme autant de clous sur le cercueil de la Grande barrière de corail.

Au Mexique, le scénario catastrophe d'un blanchissement généralisé arrive plus tôt que prévu

Le Mexique est bordé dans les Caraïbes par le système corallien de Mésoamérique, le second plus grand du monde, et entouré des deux côtés par d’autres récifs, sur l’Atlantique et le Pacifique. Le pays est non seulement particulièrement touché par le phénomène de réchauffement des océans, mais il est surpris par la rapidité du phénomène.

C’est la première fois que les scientifiques observent un blanchissement des coraux dans de telles proportions. C’est un blanchissement généralisé, du Nord au Sud, d’Est en Ouest. Les experts estiment qu’au moins 80% des coraux sont touchés et tous s’accordent pour dire que la probabilité de les voir mourir dans l’année est importante. Il s’agit d’un scénario catastrophe qui arrive plus tôt que prévu. Il n’était pas attendu avant 2030 au plus dramatique. Il faut dire que l’eau n’a jamais été aussi chaude autour du Mexique : sur chaque littoral, les eaux superficielles ont atteint une moyenne de 31° au cours de l’été 2023.

S’il s’agit d’une année record, le phénomène n’est pas nouveau au Mexique, le pays subit déjà les conséquences du réchauffement des eaux. La montée du niveau de la mer oblige des villages à se déplacer. C’est aussi bien visible chaque année sur les plages des Caraïbes, quand plusieurs tonnes de sargasse viennent s’échouer. Cette algue marron et flottante naît dans l’océan et se multiplie à grande vitesse dans les courants chauds.

Le phénomène El Nino, ajouté au réchauffement, augmente le risque d'ouragans de catégories élevés

Le Mexique doit également faire face au phénomène El Niño, événement naturel et récurrent, qui a lieu cette année dans la région, et qui a aussi tendance à réchauffer les eaux. Une circulation des courants océaniques au niveau du Pacifique équatorial, fait remonter les eaux chaudes à la surface. L’impact a déjà lieu, c’est très clair dans les courbes, et il s’accumule au réchauffement provoqué par l’homme. Le risque est important car la chaleur des océans alimente la formation des ouragans et le Mexique est sur leur passage.

En octobre 2023, la ville d’Acapulco a été dévastée par Otis, un ouragan de catégorie 5, qui s’est formé sur le Pacifique et s’est renforcé justement en passant au-dessus de zones où la température était plus élevée que dans le reste de l’océan. Au Mexique, la saison des ouragans commence en mai. Avec El Niño toujours en place et le réchauffement global des eaux de la planète, les probabilités de voir apparaître des tempêtes de forte catégorie sont beaucoup plus élevées. 

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