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Election présidentielle au Brésil : les espoirs de la Colombie, du Chili et de l'Argentine, trois pays où la gauche est au pouvoir

Dans le club des correspondants, franceinfo s'intéresse à l'actualité vue depuis l'étranger. Aujourd'hui, direction l'Amérique du Sud pour savoir ce qu'attendent la Colombie, le Chili et l'Argentine de l'élection présidentielle au Brésil. 

Article rédigé par franceinfo - Najet Benrabaa (en Colombie) - Naïla Derroisné (au Chili) - Caroline Vicq (en Argentine)
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Le quotidien O Globo au lendemain du premier tour de l'élection présidentielle au Brésil, le 3 octobre 2022.  (MAURO PIMENTEL / AFP)

Le candidat de gauche Lula est arrivé en tête lors du premier tour de l'élection présidentielle au Brésil, dimanche 2 octobre. Favori des sondages, il n'a que cinq points d'avance sur le président sortant d'extrême-droite, Jair Bolsonaro. Tous les deux seront départagés le 30 octobre lors du second tour. Les gouvernements de Colombie, du Chili et d'Argentine, trois pays dirigés par la gauche, espèrent une victoire de Lula. Et à chaque fois pour des raisons différentes. 

En Colombie, la protection de l'Amazonie au cœur des espoirs

En juin, la Colombie a élu pour la première fois de son histoire un président de gauche, avec l'arrivée au pouvoir de Gustavo Petro. Le pays espère alors du changement, et notamment sur la question environnementale. Depuis plusieurs années, la forêt amazonienne ne cesse de brûler, et notamment à cause de la déforestation liée à l'agriculture et à l'élevage intensifs. D'après l'Organisation des Nations unies (ONU), la Colombie a perdu 7 018 km2 ce forêt entre 2018 et 2021, la plupart détruites en Amazonie. 

La protection de cette forêt est primordiale pour le nouveau président. Il veut agir vite et propose la création d'un fonds d'urgences pour l'Amazonie d'environ 500 millions de dollars par an, sur une durée de 20 ans. Pour ce faire, il compte sur le soutien de ses voisins, notamment le Brésil et le Pérou qui partagent des frontières avec la Colombie. Gustavo Petro veut demander aux pays riches et aux grandes entreprises de payer les agriculteurs pour prendre soin de la forêt amazonienne et récupérer les zones déboisées. L'initiative sera portée à la prochaine COP de l'ONU sur le climat qui se tiendra en novembre en Egypte. Le président colombien espère avoir le soutien d'autres présidents de la région pour peser, et notamment le président brésilien. 

Sur ce sujet, le candidat de gauche Lula a des opinions similaires. Les deux hommes se connaissent et s'alignent aussi sur d'autres sujets. Lula évoque le renforcement de la Communauté des Etats américains et caribéens (CELAC), quitté par le président sortant Jair Bolsonaro car l'institution mettait selon lui "en avant des régimes non-démocratiques." Gustavo Petro espère donc le retour du Brésil dans l'organisation. 

Au Chili, l'espoir de créer un "pôle de la gauche" sud-américaine

Au Chili aussi, le jeune président de gauche, Gabriel Boric, espère la victoire de Lula pour apaiser les relations entre les deux pays, qui pourtant entretiennent d'importants échanges commerciaux. Depuis le début de l'année, les relations avec le gouvernement de Jair Bolsonaro se sont détériorées. Cela a commencé en mars, lors de la cérémonie d'investiture du président chilien : Jair Bolsonaro n'y était pas allé, car il ne voulait pas "créer de problèmes.

Quelques mois plus tard, le président brésilien s'en prenait plus frontalement à Gabriel Boric, l'accusant d'avoir mis le feu au métro lors de la crise sociale qui avait secoué le pays en 2019. Des propos mensongers, "inacceptables et qui affectent la fraternité entre les deux peuples", avait alors déclaré le Chili. Il y a aussi eu l’épisode de l’ambassadeur chilien au Brésil. Gabriel Boric avait désigné à ce poste un membre de sa coalition. Ce dernier avait par le passé déclaré qu’avec Bolsonaro, c’était "le début du fascisme." L’administration brésilienne n’a pas approuvé cette nomination, le Chili se retrouve donc sans ambassadeur.

Au-delà de ces tensions, le président chilien et Lula se rejoignent d'un point de vue idéologique. Gabriel Boric voit ici la possibilité de construire un "pôle de la gauche" pour l'Amérique latine. Il veut renforcer la coopération régionale pour que le continent pèse davantage sur la scène internationale. Même s'il insiste sur le fait de dépasser les clivages idéologiques, le président chilien voit avec beaucoup d'espoir la création d'un axe de la gauche avec les récents gouvernements progressistes de Gustavo Petro en Colombie, Alberto Fernandez en Argentine, Luis Arce en Bolivie, et, peut-être, Lula au Brésil. 

En Argentine, les espoirs des militants féministes et associatifs

En Argentine, autre pays d'Amérique latine dirigé par la gauche et très engagé sur la question du droit des femmes et des minorités, le résultat du premier tour de l'élection présidentielle au Brésil a déçu, malgré la première position de Lula. Les Argentins espéraient sa victoire au premier tour. Il faut dire que les incessantes piques envoyées par Bolsonaro à l'encontre des Argentins, ou encore ses propos misogynes, homophobes et racistes ont contribué à le rendre très impopulaire dans le pays. Dans les milieux associatifs, la réaction est mitigée : il y a d'un côté l’espoir de voir un front progressiste arriver à la tête du pays, mais en même temps, il y a la déception de voir se consolider la droite bolsonariste qu’ils qualifient de "fasciste"  au Congrès.

Ces résultats pourraient aussi influer sur le mouvement féministe en Argentine. Car même si les militants luttent d'abord pour l'extension des droits dans leur pays, il existe bel et bien un féminisme régional sud-américain, comme l'explique la journaliste et militante féministe Laura Salomé : "L’année prochaine, il y a des élections en Argentine. Pour nous, la défaite du bolsonarisme, du fascisme, de l’extrême droite, c’est l’espoir de ne pas voir croître les sièges du même bord en Argentine. Et ces derniers jours, en dialoguant avec les féministes au Brésil, on a pu mettre au point des stratégies sur ce que sera la lutte de demain : un féminisme anti-raciste et anti-fasciste, c’est notre objectif à toutes à partir de maintenant.

De même que les gouvernements progressistes sud-américains rêvent d’un front de gauche dans la région, les milieux associatifs misent aussi sur le rassemblement, faisant de l’élection au Brésil un événement décisif dans le féminisme régional à venir.

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