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Les "bifurqueurs" : face à l'urgence climatique, des étudiants de grandes écoles décident de boycotter certaines entreprises

Ils s'appellent les "bifurqueurs". De plus en plus d'étudiants de grandes écoles refusent de travailler pour des entreprises qui n'en font pas assez en matière d'écologie et appellent à un sursaut face à l'urgence climatique.

Article rédigé par Etienne Monin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Une pancarte brandie lors de la marche de la jeunesse pour le climat à Paris, le 19 mars 2021. (PHOTO D'ILLUSTRATION / THOMAS PADILLA / MAXPPP)

C'était au début du mois de mai, lors de la remise des diplômes de l'école d'ingénieur Agro Paris Tech. Huit étudiants arrivent sur scène, chacun un petit papier à la main. Ils s’adressent à leurs camarades et collègues avec un message de rupture. "Agro Paris Tech forme chaque année des centaines d'élèves à travailler dans l'industrie de diverses manières (...) Choisir ces jobs, c'est nuire en servant les intérêts de quelques uns", dit l'un d'entre eux.

La vidéo a fait rapidement le tour des réseaux sociaux. Ces étudiants se définissent comme des "bifurqueurs". Autrement dit, ils refusent de participer à un système qui, selon eux, détruit la nature et la biodiversité. C’est une sorte de révolte des élites, comme l’explique Julia, l'une des huit étudiants en question : "On ne croit pas au fait de pouvoir changer les choses de l'intérieur. À l'intérieur du système, nous pensons que c'est plutôt lui qui nous changera plutôt que nous qui le changerons.

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Malgré leurs diplômes provenant des plus grandes écoles françaises, ces étudiants ont désormais d’autres projets. Pour certains, ce sera la fondation d'une ferme collective. Pour d'autres, ce sera d'aller à la Zad de Notre-Dame-Des-Landes. Leur idée, c’est que c’est l’échelle locale qui peut organiser la société pour qu’elle redevienne compatible avec les limites planétaires.

"Pousser" pour le climat à l'intérieur des entreprises 

Les ingénieurs agronomes sont-ils les seuls à se révolter ? Non. Cependant, il s'agit d'un premier mouvement radical. Les autres actions sont plus conventionnelles. Par exemple, HEC et les Écoles normales supérieures ont publié des lettres ouvertes tandis qu'un collectif, du nom de "Pour un réveil écologique", a été créé il y a quatre ans pour peser sur les écoles et les entreprises. Son manifeste a été signé par 30 000 diplômés.

L’objectif est de pousser pour le climat de l’intérieur, explique Rémi Vanel, ingénieur membre du collectif : "Nous avons la chance de pouvoir choisir notre entreprise. Nous avons des marges de manœuvre. Nous allons donc pouvoir choisir une entreprise qui est vraiment engagée et dans laquelle nous allons pouvoir changer les choses. Quelle est la stratégie de l'entreprise ? Quelle est la gouvernance mise en place pour traiter ces sujets ?"

"Il vaut mieux boycotter certaines entreprises et aller dans des entreprises qui prennent vraiment ces sujets en compte."

Rémi Vanel, ingénieur et membre du collectif "Pour un réveil écologique"

à franceinfo

D’un côté, il y a une révolte, de l’autre, un réveil. Le point commun, c’est l’engagement montant d’une génération pour le climat. Ces jeunes ne se contentent pas de trier les déchets, explique Théo Rougier, activiste qui participe à l’organisation des marches pour le climat. "Il y a une génération qui est déjà un peu trop dans le système. Ce sont des gens qui ont aujourd'hui entre 40 et 50 ans, qui ont un emprunt, trois enfants à nourrir. Ils ont beau être très conscientisés sur ces sujets, c'est compliqué pour eux de sortir de ce système, explique-t-il. C'est pourquoi c'est dans la génération des 18-24 ans que se fait la bascule. La conscience est répartie, le passage à l'action est générationnel."

Des jeunes plus exigeants sur le climat 

Ces étudiants arrivent-ils à peser sur les entreprises ? Le patron des DRH en France, Benoît Serre, assure que cela fait maintenant partie du paysage. Comme les ingénieurs sont très recherchés, les entreprises doivent se montrer vertueuses si elles veulent attirer les étudiants des grandes écoles. "Toute la nouvelle génération, notamment après la pandémie, est assez exigeante sur ces questions. On s'en rend compte car ils nous en parlent quand on veut les recruter et quand ils sont recrutés. Nous savons que ça fait partie des éléments d'attractivité, ce qu'on appelle la 'marque employeur'."

Les écoles disent aussi qu’elles prennent en compte le mouvement. HEC, par exemple, a révisé récemment son programme pour intégrer cette nouvelle exigence climatique des élites.

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