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Circuits courts, drive, salons virtuels, boutique en ligne collective... Avec le Covid-19, les agriculteurs doivent se réinventer pour survivre

Après les confinements, le couvre-feu, la fermeture des restaurants et l'annulation du Salon de l'Agriculture, les producteurs ont perdu la majeure partie de leur chiffre d'affaires. Seuls ou à plusieurs, ils imaginent de nouveaux débouchés pour sauver ce qui peut l'être. 

Article rédigé par franceinfo - Farida Nouar
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
A Chinon , après le drive, les salons virtuels, les livraisons dans toute la France, Vincent Couly et son père sont a court d’idées pour vendre leurs bouteilles et surmonter la crise sanitaire. (FARIDA NOUAR / RADIO FRANCE)

Il n’y aura pas de Salon de l’Agriculture cette année. Pandémie de Covid-19 oblige, le grand rendez-vous du monde agricole prévu du samedi 20 février au dimanche 7 mars est annulé. Depuis presque un an les agriculteurs, maraîchers, éleveurs...subissent la crise sanitaire. Comment s’adaptent-ils aux salons annulés, aux restaurants toujours fermés, au couvre-feu ? franceinfo vous emmène sur la route des producteurs du Centre-Val de Loire.

Un salon virtuel "pour compenser"

Premier arrêt en Touraine, terre de gastronomie, chez Vincent Couly, vigneron à Chinon. Il produit du blanc, du rouge, du rosé sec issu des 23 hectares de vignes du domaine familial. En temps normal, Vincent Couly reçoit 10 000 visiteurs à l’année pour des dégustations, des visites, des achats à la boutique mais un an après le début de la pandémie, c'est le statu quo. "Même si aujourd'hui on n'est pas en confinement c'est presque le cas puisqu'on on est en couvre-feu : les restaurants, qui représentent 40% de notre chiffre d'affaires, sont fermés. Il n'y a plus de touristes."

Normalement la période de novembre à avril est une grosse saison de salons pour les viticulteurs. Les annulations représentent donc également une grosse perte financière. Alors pour essayer de vendre ses bouteilles, Vincent Couly a eu une idée : "Pour compenser on a créé un salon virtuel. On dégustait les vins, on faisait des commentaires, on a fait des vidéos sur chaque cuvée, sur le domaine, on a fait des livraisons dans toute la France, énumère le producteur. Ça nous a permis de récupérer deux salons et demi, presque trois sur sept ou huit salons", soit 35 à 40 000 euros de chiffre d’affaires sur deux mois grâce à ces salons virtuels. Mais en réalité, c’est peu car sur un gros salon, il réalise d’habitude 20 000 à 25 000 euros de chiffre d’affaires en trois jours.

Après l’idée du drive au premier confinement, après le salon virtuel, après les livraisons directes aux particuliers, Vincent Couly est désormais à court d’idées. "On ne sait plus quoi faire pour réussir à gagner un peu d'argent. C'est même pas gagner de l'argent, c'est comment payer les gens qui travaillent pour nous, soupire le vigneron. Contrairement à d'autres métiers comme la restauration ou l'hôtellerie, où on peut les mettre en chômage partiel, là on ne peut pas parce que l'agriculture, la vigne n'attend pas. On vit au jour le jour, il n'y a pas trop de solution." Vincent Couly reçoit 10 000 euros d'aides de l'État chaque mois mais c'est loin d'être suffisant : "10 000 euros pour payer cinq personnes avec les charges, c'est impossible. Et on ne parle pas de nous payer nous, c'est très compliqué. Il y a quelques petites ventes à droite à gauche mais ce n'est rien du tout."

"On a l'impression de rouler avec le frein à main"

Se réinventer est encore plus difficile avec des produits de niche. C'est ce que montre l'expérience d'Eric Roy qui fait pousser des mini-légumes à Saint Genouph, en Indre-et-Loire. "Je vous présente les petits radis asiatiques, il y en a des rose, des violets, des blancs, nous montre le maraîcher. Nous, habituellement on ne vend qu'à des restaurants gastronomiques ou bistronomiques pour lesquels on fait un travail très sélectif, en direct avec environ 80 restaurants en France. On a pu garder une bonne dizaine d'établissements qui font de la vente à emporter."

Avec le premier confinement, Eric Roy a réussi à vendre un peu de sa production aux particuliers. Coincés chez eux, les Français s’étaient alors pris de passion pour la cuisine mais depuis ce mini filon s’est tari. Et avec ses produits de niche se réinventer, se diversifier c’est impossible. "C'est compliqué de trouver immédiatement une solution de repli parce que cela mettrait en péril un savoir-faire et toute une logique de production et une logique commerciale. Si l'activité repart, il va falloir être prêt, explique le maraîcher. J'ai une quantité qui est limitée parce que l'on a un travail qui est très particulier et en plus on est en bio donc on ne peut pas en faire beaucoup. Ce sont des contraintes qui font que l'on est quasi à l'arrêt, on a l'impression de rouler avec le frein à main."

"C'est l'union qui fait la force"

Pour surmonter la crise, certains ont choisi de se regrouper. À Chambray-lès-Tours, la chambre d’agriculture d’Indre-et-Loire avait créé lors du premier confinement la boutique en ligne "Mangez Touraine" pour offrir aux producteurs locaux, alors privés de leurs débouchés habituels comme les marchés les restaurants, un nouveau mode de commercialisation de leurs produits. Onze mois plus tard, la boutique existe toujours : volailles, fromages, conserveries, légumes vendus par une trentaine de producteurs qui tiennent en binôme sept points de retrait où les particuliers viennent retirer leur commande. 

L’idée est de défendre le local, le circuit court et de bénéficier d’un collectif. "La boutique 'Mangez Touraine' a permis d'écouler pas mal de produits, il m'en serait resté pas mal sur les bras, raconte Gaëlle Pelletier, apicultrice à Chambray-lès-Tours, l'une des adhérentes. Pour moi, c'est l'union qui fait la force. On est quelques producteurs et on s'entraide vraiment quand il y a besoin. Cela compense bien et de toute façon c'est mon seul système de fonctionnement. Le site et les ventes directes aux particuliers, je fonctionne uniquement comme ça."

Un autre point retrait va bientôt voir le jour pour valoriser encore davantage le circuit court et aider les producteurs locaux à surmonter cette crise sanitaire.

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