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Guerre en Ukraine : Matignon pas pressé d'organiser un débat au Parlement

Un an quasiment après le début de la guerre en Ukraine, le gouvernement doit-il débattre de l’engagement de la France dans ce conflit ? Pour l’heure, Matignon temporise. Le Brief Politique de Jean-Rémi Baudot.
Article rédigé par Jean-Rémi Baudot
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
L'hémycicle de l'Assemblée nationale. (Photo d'illustration) (BERTRAND GUAY / AFP)

C’est un courrier qui est arrivé sur le bureau de la Première ministre le 27 janvier dernier. Une lettre co-signée par les députés communistes André Chassaigne et Fabien Roussel réclamant "l’organisation d’un débat en urgence sur les possibilités d’un changement de stratégie dans notre soutien à l’Ukraine". Une lettre restée sans réponse.

"On étudie la question, mais ça n’est pas tranché". Voilà comment répond l’entourage d’Elisabeth Borne. Il y a deux options sur la table : un format à huis clos à Matignon, un simple comité de liaison composé des patrons de groupes au parlement, ou un débat sans vote, qu'on appelle "débat 50.1" en référence à l’article de la constitution. 

Un 50.1 est une prérogative de la cheffe du gouvernement. Une manière pour l’exécutif d’exposer sa stratégie et de recueillir les positions des oppositions. Évidemment, dans ce cas, le débat se fait publiquement. L’enjeu est que chacun d'abatte ses cartes. 

L’opposition réclame de savoir comment et pourquoi les décisions sont prises. Si la France va livrer plus d’armements, et si oui, de quels types. Quand en face, au sein de la majorité, on explique que cela permettra de lever "les ambiguïtés de LFI et du RN".  

"Lever les ambiguïtés de LFI et du RN"

Quand Jean-Luc Mélenchon fustige l’Otan, quand Marine Le Pen dit que la France ne doit pas livrer de canons à Kiev, quels intérêts défendent-ils ? Face à un Poutine belliqueux et manipulateur, peut-on réellement invoquer une conférence sur la paix sans faire, justement, le jeu du Kremlin ? Quand les eurodéputés LFI et RN, à l’exception de Jordan Bardella sont absents lors du discours de Zelensky à Bruxelles, faut-il y voir un manque de soutien au peuple Ukrainien ? Voilà quelques-unes des questions que les membres de la majorité aimeraient aussi pouvoir poser. Et cela explique pourquoi cette demande de débat est globalement soutenue par l’ensemble de l’échiquier politique.

La guerre en Ukraine reste un sujet très clivant, complexe et difficile à suivre. Pour beaucoup d’observateurs, la position d’Emmanuel Macron a elle-même évolué ces derniers mois. "Il a changé", disait Volodymyr Zelensky au Figaro, le 8 février (article pour abonnés)

Et puis, côté français, il y a la question de l’opinion publique. Comment réagit-elle sur la durée ? Il y a une crainte en Macronie : que les Français se lassent et refusent progressivement l’impact que ce conflit a sur leurs vies dans un contexte national compliqué. Certains cadres Renaissance aimeraient donc remettre la question en débat pour expliquer à nouveau les enjeux pour notre sécurité. 

Pour l'heure, donc, Matignon temporise. Entre l’inflation et les débats sur les retraites, le gouvernement est-il réellement pressé de débattre d’un sujet aussi difficile que l’Ukraine ? La réponse est probablement dans la question. 

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