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Le brief éco. Moratoire fiscal : lourd manque à gagner pour les caisses de l'Etat

Les mesures annoncées mardi 4 décembre par Edouard Philippe, pour tenter de calmer la colère des "gilets jaunes" sont évaluées à deux milliards d'euros. Où l’Etat va-t-il trouver cet argent ?

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le ministère de l'Economie à Bercy. (CATHERINE GRAIN / RADIO FRANCE)

Deux milliards d’euros. C’est ce que devraient coûter les mesures annoncées mardi 4 décembre par le Premier ministre, Edouard Philippe, pour tenter de calmer la colère des gilets jaunes. Entre le moratoire sur la hausse de la fiscalité des carburants et le gel des tarifs du gaz pour six mois, la question est de savoir où l’Etat va aller chercher cet argent.

L’Etat va devoir réduire encore un peu plus son train de vie. Cela passera par des mesures d’économies qui restent à définir. C’est ce que dit Matignon. Deux milliards, c’est le bas de la fourchette, le chiffre estimé pour six mois de suspension des mesures. Si le moratoire, et le reste, devait se prolonger – ce qui est très probable vu le niveau de tension qui n’est pas près de retomber –, nous passerions à quatre milliards d’euros l'année prochaine. Et si on extrapole, jusqu'à la fin du quinquennat, en cas de suspension intégrale, ce sont plus de onze milliards d'euros qui ne rentreraient pas dans les caisses de l'Etat.  

Deux milliards d’euros en moins, c’est 0,1% de déficit en plus dans le budget français. Quatre milliards, cela représente 0,2% de déficit en plus. En clair, c’est un coup de canif porté au budget 2019 tel qu’il a été construit. Et même si Matignon et Bercy jurent que les objectifs du gouvernement seront tenus, la limite 3% de déficits par rapport au PIB (la richesse produite sur un an) semble déjà voler en éclat.  

Pistes d’économies

La première réponse est la réduction de la dépense publique. Mais le gouvernement s’est déjà engagé dans cette voie en s’attaquant notamment aux effectifs de fonctionnaires. Difficile d'aller plus loin sur ce plan. Faut-il réduire les aides consenties aux entreprises comme le CICE transformé en baisses de charges ? Emmanuel Macron va-t-il se résigner à revenir sur la politique pro-entreprises au nom d’un rééquilibrage social ? La question est taboue.

Plus loin que les économies : quid des rentrées fiscales ? Si le gouvernement veut continuer à baisser les impôts pour le plus grand nombre – cet objectif est maintenu –, faut-il rétablir l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune), imposer les riches et les multinationales, lutter encore plus efficacement contre la fraude et l’évasion fiscales ? Demander à Bruxelles d'abandonner la barre des 3% de déficit par rapport au PIB ? Jusqu’à présent, Bercy ne dit mot mais toutes les hypothèses sont pesées au trébuchet. L’Etat est dans une impasse et doit réagir vite.  

Prochaine étape

La prochaine étape est le "Grenelle de la fiscalité", grande réunion prévue dans les trois mois. Mettre tout le monde autour de la table : citoyens, acteurs économiques et partenaires sociaux pour imaginer une fiscalité intelligente, non confiscatoire (pour les entreprises créatrices d’emplois) et redistributive de manière plus efficace. Bref, rétablir dans l’esprit des Français ce que l’on appelle le consentement à l’impôt, inscrit dans les gênes de notre pays depuis la Révolution de 1789. Mettre tout le monde d’accord pour payer des impôts, à condition de savoir à quoi ils servent exactement.

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