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Le brief éco. Une taxe uniquement française sur les Gafam, un coup d’épée dans l’eau ?

Le projet de loi visant à taxer les géants du numérique, les Gafam, est présenté mercredi en Conseil des ministres. Une taxe à l'initiative de Bruno Le Maire, ministre de l'Économie.

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Les applications des Gafa sur un smartphone. (LIONEL BONAVENTURE / AFP)

Le gouvernement présente mercredi 6 mars en Conseil des ministres son projet de loi visant à taxer les géants du numérique, ce que l’on appelle les Gafam : Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft. Le texte défendu par le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, était très attendu au nom de l’équité fiscale. 

L’annonce avait été faite en décembre, au moment où les questions fiscales étaient encore au cœur des revendications des "gilets jaunes". Mais l’équité fiscale concerne aussi les entreprises : le taux d’imposition moyen des géants du numérique n’est que de 9% contre 23% pour les entreprises en général. Cela fait ni plus ni moins que quatorze points d’écart. L’Europe tardant à se mettre d’accord sur ce fameux impôt sur les géants du net, Bruno Le Maire estimait que la France ne pouvait plus attendre pour changer la donne. Il a donc pris le taureau par les cornes.  

Taxe rétroactive au 1er janvier 2019

Concrètement, une taxe de 3% sera appliquée – avec effet rétroactif au 1er janvier – et touchera toutes les entreprises qui proposent des services informatiques dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 millions d’euros au niveau mondial. Le seuil a été fixé à 25 millions d’euros et plus pour l’activité réalisée en France, histoire de ne pas toucher les nombreuses start-up dynamiques françaises. Le gouvernement espère en retirer 500 millions d’euros par an. 

Paris se lance dans une affaire très délicate  

Google France, par exemple, a déclaré sur son dernier exercice un chiffre d’affaires de 325 millions d’euros. L’entreprise affirme avoir payé 14 millions d’euros d’impôt sur les sociétés. En réalité, ce chiffre est bien inférieur à l’activité réellement générée en France par le géant américain car Google facture une partie de ses prestations depuis d’autres pays comme l’Irlande. Donc la solution est au niveau européen et pas strictement français. Mais à partir du moment où l’Europe n’a pas de politique fiscale commune, le problème reste entier. Pas plus tard que la semaine dernière, Bruno Le Maire a échoué à convaincre l’Irlande, la Suède et le Danemark de rejoindre la position française. L’Allemagne ne joue pas collectif non plus dans cette affaire : Berlin a peur qu’une taxe sur les géants informatiques américains n’entraîne des mesures de rétorsion de la part des Etats-Unis sur les automobiles allemandes (gros marché à l’export).  

Sans l’OCDE point de salut

Le vrai sujet c’est qu’une taxe sur les Gafam sera réellement efficace uniquement dans le cadre de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique), dont les Etats-Unis et le Canada font partie. Et cela avance enfin sur ce point : pour la première fois, la semaine dernière, les Etats-Unis se sont dit ouverts à un tel impôt s’il était négocié dans le cadre de l’OCDE. Le secrétaire d’Etat américain au Trésor l’a affirmé devant Bruno Le Maire à Bercy. Reste, pour Paris, à transformer l’essai.

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