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Édito
Réforme des retraites : avec la menace du 49.3, le gouverment réactive une tactique politique classique
Et maintenant ? Après le vote favorable du Sénat samedi, le parcours du texte de la réforme des retraites devant le Parlement s’achève cette semaine. Avec, d’abord, la réunion de la commission mixte paritaire, mercredi 15 mars, où sept députés et sept sénateurs sont chargés d’accoucher d’une version commune. Et, puis, le lendemain, un vote sur ce texte final au Sénat le matin et surtout à l’Assemblée l’après-midi. Surtout à l’Assemblée, parce que c’est là que règne le plus grand suspense.
Faute de majorité absolue, le gouvernement a besoin du renfort d’une quarantaine de députés de droite. Au vu des divisions internes à LR, rien n’est moins sûr. Une incertitude qui pourrait bien conduire Elisabeth Borne à recourir à l’article 49.3 qui permet de faire adopter un texte sans vote.
Pourtant, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a pourtant affirmé que le gouvernement n’en veut pas... Mais cela est une tactique politique classique. Elle consiste à répéter jusqu’au bout que l’on veut éviter une telle issue pour en faire porter la responsabilité à d’autres. En l’occurrence au groupe LR, où nombre de députés refusent de suivre la consigne du tandem dirigeant Eric Ciotti-Olivier Marleix qui, eux, voteront la réforme. Le gouvernement va donc mettre en scène sa bonne volonté pendant trois jours et répéter qu’il veut construire une majorité. Pour essayer d’atténuer l’impact du 49.3 s’il s’y résout…
Rogner la légitimité
Ce qui serait une grosse prise de risque politique. En premier lieu, d’abord, au Parlement si une motion de censure était adoptée. C’est possible. Certains députés de droite s’emploient à nouer des passerelles entre les groupes, c’est le cas du député de la Marne, Charles de Courson. Le patron du Rassemblement National Jordan Bardella évoque même des "discussions" avec des élus de droite.
Il reste quand même peu probable que tous les députés de gauche, socialistes et écologistes compris, votent avec l’extrême droite pour faire tomber le gouvernement. Pour l’exécutif, le principal risque n’est sans doute pas à l’Assemblée, mais plutôt dans la rue. Il est de voir, après le recours au 49.3, la contestation redoubler, la CFDT et Laurent Berger se radicaliser, les blocages se durcir, les dérapages violents se multiplier, et au final, le ressentiment de l’opinion croître un peu plus.
L’usage du 49.3 est parfaitement légal. Mais c’est aussi un outil dangereux qui peut rogner la légitimité de la réforme qu’il impose. Et creuser un peu plus la crise démocratique qui ronge le pays.
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