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Histoires d'info. L'indépendance du CSA : réelle ou formelle ?

Le CSA a révoqué mercredi le PDG de Radio France, Mathieu Gallet, condamné le 15 janvier à un an de prison avec sursis et 20 000 euros d'amende pour favoritisme quand il dirigeait l'INA entre 2010 et 2014. Une décision qui intervient après que la ministre de la Culture avait appelé, dans la presse, à son départ.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Les membres de la Haute Autorité se réunissent poiur la première fois le 1er septembre 1982 à Paris. Michèle Cotta est la présidente (2e en partant de la droite). (PHILIPPE WOJAZER / AFP)

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a révoqué mercredi 31 janvier le PDG de Radio France, Mathieu Galletcondamné le 15 janvier à un an de prison avec sursis et 20 000 euros d'amende pour favoritisme quand il dirigeait l'INA entre 2010 et 2014. Une décision qui intervient après que la ministre de la Culture avait appelé, dans la presse, à son départ, et alors que Mathieu Gallet a fait appel de sa condamnation en première instance. 

Se pose alors à nouveau la question de l’indépendance réelle et de l’indépendance formelle du CSA. Cela remonte au début des années 1980. Après quelques tentatives avortées dans les années 1970, François Mitterrand décide d’appliquer sa 94e promesse de campagne, et avec elle la création d’une instance visant à rompre le lien de dépendance entre les médias audiovisuels et le pouvoir politique. L’ancêtre du CSA, la Haute Autorité, voit le jour en 1982. Elle dispose d’une prérogative particulièrement spectaculaire : la nomination des présidents des sociétés de radio et de télévision. Mais à droite, on ne croit pas du tout à l’indépendance de la Haute Autorité, à l'image d'Alain Madelin à l'époque, lors des débats à l’Assemblée nationale  : "Qu'auriez vous dit à nouveau si il y a quelques années nous vous avions proposé, comme gage de l'indépendance de l'audiovisuel, une instance dont trois membres auraient été nommés par Valéry Giscard d'Estaing, trois membres par Alain Poher, trois membres par Jacques Chaban-Delmas ? Votre Haute Autorité, elle offre toute garantie de partialité", avait-il lancé.

En cause la composition de cette Haute Autorité

Neuf membres, trois nommés par le président de la République, trois par le président sur Sénat et trois par le président de l’Assemblée nationale. De quoi s’assurer d’une instance sous contrôle politiquement. Et pourtant, quelques semaines après son installation, la Haute Autorité exprime son indépendance en maintenant à son poste Pierre Desgraupes à la tête d’Antenne 2 qu’on ne peut qualifier de socialiste. Mais ce vent d’indépendance ne va pas durer longtemps. En effet, alors que se profile des législatives difficiles pour le pouvoir, le gouvernement impose la nomination de Jean-Claude Heberlé à la tête d’Antenne 2 désavouant la Haute Autorité.

En 1986, la droite enterre la Haute Autorité

La Haute Autorité laisse la place à la Commission nationale de la communication et des libertés. Le sujet sensible c’est donc la nomination. Elle promet d’être moins politisée. Les présidents de la République, du Sénat et de l’Assemblée nomment deux membres mais, nouveauté, le Conseil d’État, la Cour de cassation et la Cour des comptes en nomment trois chacun. S’ajoutent trois autres membres cooptés et un 13e désigné par l’Académie française (ce sera Michel Droit, pas vraiment un gauchiste). Puis, très vite, en nommant Claude Contamine à la tête d’Antenne 2 ou Roland Faure à celle de Radio France, les promesses d’indépendance trouvent presque immédiatement leur place dans les poubelles de l’histoire.

1989, la gauche crée le CSA

Cela commence mal avec le retour des nominations politiques des neuf membres. Mais coup de théâtre en août 1989, résumé à l'époque par une journaliste : "Comme nous vous l'annoncions hier soir, c'est Philippe Guilhaume, PDG de la SFP, qui a été élu le grand patron d'Antenne 2 et de FR3. Une élection qui a surpris un peu partout. Philippe Guilhaume était considéré comme l'outsider des cinq candidats. Le CSA a incontestablement voulu jouer la carte de son indépendance politique. Si le PDG est connu comme un homme de terrain, il est connu aussi comme étant proche de l'opposition."

Philippe Guilhaume nommé au nez et à la barbe des très mitterrandiens Hervé Bourges et Georges Kiejman ! Et qui plus est de la 2 et de la 3. L’indépendance enfin ! Pas si vite, un an plus tard, l’hostilité de la ministre de la Communication Catherine Tasca met Guilhaume dans une situation financière intenable socialement. Il démissionne. Le CSA, plus docile, nommera en remplacement Hervé Bourges. Indépendance réelle ou seulement formelle ? Près de 30 ans plus tard, cette question fondamentale pour notre démocratie n’est manifestement pas encore tranchée.

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