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Histoires d'info. A l'origine de la demande de l'autonomie corse

Il existe une histoire assez ambiguë entre le continent et la Corse qui permet de comprendre la percée nationaliste d'aujourd'hui.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Portrait de Pascal Paoli, philosophe et général corse. (MAXPPP)

Les nationalistes corses qui ont largement viré en tête à l’issue du premier tour des élections dimanche 3 décembre et s’inscrivent profondément dans l’histoire de leur île. Une île dont l’histoire est marquée par un rapport qu’on pourrait qualifier d’ambiguë à la France et qui permet de comprendre mieux ce qui se joue aujourd’hui avec cette percée nationaliste.

Il faut replonger au milieu du XVIIIe siècle. La révolte corse contre l’occupant génois est à son paroxysme. La République de Gênes qui administre bon an mal an la Corse depuis la toute fin du XIIIe siècle. La révolte des Corses contre Gênes est nourrie au XVIIIe par un fort ressentiment contre cet occupant qui impose à l’île des impôts trop lourds, ne permet pas aux Corses d’avoir des débouchés dans l’administration génoise et rend une justice considérée comme injuste.

La Corse intéresse les philosophes des Lumières

La Corse qui résiste, la Corse qui se rebelle, fascine les philosophes des Lumières, Rousseau en tête à qui on demande même de rédiger une constitution pour la Corse, passionnés par cette demande de souveraineté nationale qui est d’ailleurs une réalité à l’intérieur de l’île, les côtes continuant d’être aux mains des Génois.
Un gouvernement corse, où règne l’ordre et la justice, la fameuse justice paoline, la Justicia Paolina, a nourri la mythologie d’une Corse qui se gouverne bien parce qu’elle se gouverne par elle-même.

Dans cette mythologie, la France occupe une place ambigüe

Pour les uns, la France, c’est celle qui hérite de la Corse en 1768, cédée par la République de Gènes surendettée et qui, après avoir subi un revers à Borgo face aux Corses, remporte la victoire décisive de Ponto Novo en 1769, célébrée chaque année par les nationalistes corses, comme ici en 1970 : "Hier matin à Ponto-Novo, dans la région montagneuse du centre de l'île, près de 500 personnes se sont associées à la célébration du 201e anniversaire de la bateille où Pascal Paoli soutînt héroïquement les assauts des armées françaises avant de succomber avec ses malheureux compagnons. Cette bataille, qui marqua la fin de la nation corse, le 9 mai 1769 a donné lieu à un rassemblement organisé par l'association culturelle dialectale corse."

Pour les indépendantistes, la Corse n’appartient à la France que grâce à la force, à cette victoire militaire. Une légitimité contestable donc. Mais si on parle d’ambiguïtés c’est parce qu’il y a aussi la France de la Révolution française qui en 1789 fait de la Corse "Une partie intégrante" du territoire national ce que Paoli applaudit 20 ans après Porto-Novo.

Pourquoi cet apparent changement d’attitude chez Paoli ?

Simplement parce qu’il y a l’espoir qu’alors être Français, permettra d’être corse, c’est-à-dire de se gouverner dans le cadre de la France et bientôt de la république française que l’on souhaite très décentralisée. Cet idéal finalement girondin d’une Corse restée française mais largement autonome, c’est la Corse des Paolistes et c’est aussi celle d’une grande majorité des Corses qui ont voté nationalistes dimancher. Et qui, à l’image de Gilles Simeoni, ne souhaite pas l’indépendance, mais une large autonomie.

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