Au Japon les autorités veulent protéger le mont Fuji des "globe-instagrameurs"
"Couvrez-moi ce mont Fuji que je ne saurais voir"... La semaine du 29 avril 2024, les autorités de la ville de Fujikawaguchiko vont commencer la construction d'un filet à mailles de 2,5 mètres de haut et de 20 mètres de long, pour cacher la vue du mont Fuji aux touristes. Le mont Fuji est ce stratovolcan, ce géant majestueux, dont les représentations par les peintres nippons au XIXe siècle ont fortement influencé l'impressionnisme européen. Et ce, bien avant les touristes influenceurs, armés non plus de leurs pinceaux, mais de leurs smartphones, à la conquête de la meilleure photo, mais pas forcément la plus originale.
Les globe-trotters qui visitent le Japon, ou plutôt les "globe-instagrameurs", semblent ne pas faire preuve d'une grande imagination. Ils se retrouvent tous au même endroit, dans la même station balnéaire de Fujikawaguchiko, devant la même supérette, "Lawson", typique du Japon, avec une vue sur le sommet du mont Fuji. Résultat, des milliers de personnes, chaque jour, s'agglutinent, rendant impraticable le trottoir devant la supérette, tandis que d'autres grimpent sur le toit de la clinique voisine pour saisir le meilleur point de vue. Au point que les autorités japonaises ont décidé de boucher la vue sur le célèbre sommet.
Des estampes japonaises au point de vue "instagramable"
Une décision qui tombe à pic, alors que débute la haute saison touristique au Japon où le nombre de visiteurs mensuels a dépassé les trois millions en mars 2024 pour la première fois. Dès cette semaine, démarrera donc la construction d'une barrière pour boucher la vue des touristes. Les responsables de la ville de Fujikawaguchiko s'excusent presque de devoir agir ainsi à cause de "certaines personnes qui laissent leurs détritus et ignorent toutes les règles du code de la route", expliquent-ils. On est vraiment très loin du dessinateur nippon Hokusai qui s'emparait de la montagne sacrée en état de grâce et de méditation, avant de réaliser les célèbres estampes qui inspireront un certain Monet. Des estampes intitulées les "Trente-six vues du mont Fuji", sans supérette ni filet géant, bien sûr.
Mais il s'agit là d'un temps où il n'était pas nécessaire de limiter le nombre de randonneurs afin de réduire les embouteillages sur les pentes escarpées, un temps où le mont Fuji n'était pas encore connecté au Wi-fi, celui d'avant les perches à selfie, quand son ascension, divine forcément, était interdite aux femmes. Mais tout cela remonte à loin, très loin, au début du XVIIIe siècle, alors que le volcan Fuji, surnommé le grand magasin des éruptions, venait à peine de plonger dans un profond sommeil, qui dure encore aujourd'hui au point qu'on a parfois tendance à oublier que s'il est endormi, ce n'est que temporairement, et que sa prochaine entrée en éruption n'est qu'une question de temps.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.