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C'est dans ma tête. Avoir 20 ans au temps du Covid

Difficile d'avoir 20 ans en ces temps de crise sanitaire et de virus à rebond. Cette période touche plus particulièrement ces jeunes femmes et hommes en devenir, matériellement et surtout psychologiquement. Décryptage avec la psychanalyste Claude Halmos.  

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
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Temps de lecture : 2 min
Un jeune danse et écoute de la musique lors de la manifestation du 5 décembre 2020 contre la loi sécurité globale à Paris. Les jeunes de 20 ans sont parmi les plus touchés par la crise sanitaire, matériellement et psychologiquement. 
 (RAPHAEL KESSLER / HANS LUCAS / AFP)

le Premier ministre Jean Castex a confirmé jeudi 10 décembre que les bars et restaurants resteraient fermés encore un moment, au vu de la situation épidémique ; même situation pour les théâtres, les cinémas, et tous les lieux culturels. 

Le président Macron s’est adressé, la semaine dernière aux jeunes ; et on sait qu’ils rencontrent de plus en plus difficultés. On a beaucoup parlé de leur besoin de faire la fête, entravé par la fermeture des bars ; mais c’est loin d’être leur seul problème. Nous revenons aujourd'hui avec la psychanalyste Claude Halmos sur les problèmes psychologiques de ces jeunes, qui semblent se multiplier.

franceinfo : Pourquoi cette période atteint-elle les jeunes particulièrement ?

Claude Halmos : Les problèmes des jeunes ne se réduisent pas, loin s’en faut, au fait qu’ils soient privés de fêtes. La période que nous vivons est maltraitante, psychologiquement, pour tout le monde, mais elle les atteint plus particulièrement, parce qu’ils sont dans une période de leur vie qui est une période de construction (Ils sont en train de construire à la fois leur vie adulte, et leur être adulte) ; et que la situation actuelle bloque, si l’on peut dire, ce chantier, sur tous les plans.

De quelle façon ?

La crise actuelle rend leur vie très dure parce qu‘elle aggrave encore leurs difficultés : beaucoup, privés des "petits boulots" qui leur permettaient de vivre, sont réduits à la précarité. C’est-à-dire privés non seulement de tout plaisir, mais même du nécessaire, et en proie en permanence à l’angoisse du lendemain ; ce qui peut les conduire à la dépression.

D’autant que la situation les prive aussi du contact avec les autres, à un âge où la vie de groupe est indispensable, parce qu’elle permet le partage d’idées, de modes, de valeurs, mais aussi un soutien, des uns par les autres. Et bien sûr les rencontres, nécessaires à la vie amoureuse. Et la crise hypothèque aussi leur avenir.

Comment ?

Les jeunes ont besoin, pour aller bien, de pouvoir avancer et se projeter dans un avenir ; c’est-à-dire être sûrs qu’ils pourront entrer dans un monde vivable, et s’y faire une place. Or, la crise aggrave pour eux l’image d’un monde que beaucoup ressentaient déjà, en matière d’économie, de climat, ou de rapports humains, plus qu’incertain. Et surtout, elle bloque le cours normal de leur développement, puisqu’elle entrave leurs études, et leurs recherches d’emploi, c’est-à-dire la possibilité d’avoir, à terme, un emploi et un salaire, qui, conditions d’une autonomie et d’une liberté, par rapport à leurs familles, sont pour eux la clef de la vie adulte.

La crise les maintient donc – et c’est très destructeur – dans une position infantilisante, et de plus, lamine leur confiance en eux, parce que les jeunes, comme leurs aînés, se pensent toujours responsables de leurs échecs dans la vie sociale, même quand ils n’y sont pour rien. Il est donc normal que tous, même ceux qui auparavant allaient bien, souffrent, et il faut les aider.

Matériellement : des associations s’y emploient, et elles ont besoin d’être soutenues ; et psychologiquement. Par un retour à une vie de groupe, et un soutien psychologique qui les aide à retrouver leurs forces, en comprenant que ce qui leur arrive n’est pas dû à leur incapacité, mais à la pandémie qui bouleverse toute la société.

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