Inéligibilité des élus, violences faites aux femmes, tensions à l'Assemblée, guerre en Ukraine... Ce qu'il faut retenir de l'interview de Clémentine Autain
La députée La France insoumise (LFI) de Seine-Saint-Denis était l'invitée du "8h30 franceinfo", mercredi 8 mars 2023.
Clémentine Autain, députée La France insoumise (LFI) de Seine-Saint-Denis, était l'invitée du 8h30 franceinfo, mercredi 8 mars 2023. Inéligibilité des élus, violences faites aux femmes, tensions à l'Assemblée, guerre en Ukraine... Elle répondait aux questions de Salhia Brakhlia et Marc Fauvelle.
Violences conjugales : "Il faut faire attention avec l'inéligibilité automatique"
Les députés ont rejeté mardi soir à l'Assemblée nationale la proposition de loi du groupe Renaissance pour rendre automatiquement inéligibles les élus condamnés pour violences aggravées, et notamment les violences conjugales. Clémentine Autain, pourtant connue pour ses combats féministes, a voté contre le texte. La députée de Seine-Saint-Denis dénonce "une initiative tous petits bras". À la veille de la journée internationale des droits des femmes, "on voit très bien le coup politique, je pense que le féminisme vaut mieux que ça", assure Clémentine Autain.
La députée critique par ailleurs le fond du texte, en expliquant qu'il y avait dans cette proposition de loi "toute une liste (de délits) qui dépassait le cadre des violences faites aux femmes".
Le débat qui a eu lieu en commission a été assez unanime pour dire que cette loi n'était ni faite ni à faire.
Clémentine Autain, députée LFIsur franceinfo
Lors de la campagne présidentielle, Jean-Luc Mélenchon avait pourtant défendu sur un plateau télévisé qu'il fallait "un casier judiciaire vierge pour être élu", mais Clémentine Autain assure qu'il avait alors "outrepassé ce qui était précisément écrit dans le programme".
Pour la députée de Seine-Saint-Denis, "il faut faire attention avec l'inéligibilité automatique". "Pour des affaires de corruption, c'est assez logique", précise-t-elle, car "quand on est élu, on se doit d'être irréprochable sur ce terrain". Mais pour le reste des infractions, "on ouvre potentiellement une boîte de Pandore". "Si, pour des raisons politiques, vous avez fauché des champs d'OGM, vous êtes condamnés. Est-ce que vous ne pouvez plus être élu ?", interroge-t-elle.
Violences conjugales : "A ce rythme-là, ça va devenir l'annexe de Fleury-Mérogis, la Macronie"
Concernant la question des violences conjugales, sans parler d'inéligibilité automatique, la députée insiste sur le rôle des partis qui doivent "prendre des décisions et agir" avant même le dépôt de plaintes, alors que le député LFI Adrien Quatennens, condamné pour avoir giflé sa femme, a été suspendu pendant quatre mois de son parti. "Je crois vraiment que dans la tête d'Aurore Bergé et des siens, il y avait", avec cette proposition de loi, "l'idée de surfer sur l'affaire et, au fond, d'utiliser cette histoire pour polémiquer avec nous", assure la députée insoumise, mais "la Macronie ferait mieux de balayer devant sa porte", en citant notamment les cas de Damien Abad, ancien ministre et toujours député accusé de viol, et Benoît Simian, ancien député condamné pour harcèlement sur son ex-compagne. "A ce rythme-là, ça va devenir l'annexe de Fleury-Mérogis, la Macronie", conclut Clémentine Autain.
Violences faites aux femmes : "Il y a un féminisme Canada Dry du gouvernement, dans les discours, mais pas dans les actes"
Elisabeth Borne va présenter mercredi un plan "égalité femmes-hommes". Deux mesures ont déjà été annoncées : le lancement de pôles spécialisés pour lutter contre les violences conjugales et un projet de loi pour étendre le délai de prescription pour victimes de violeurs en série. Des mesures qui ne "sont pas à la hauteur", selon Clémentine Autain, qui dénonce "un féminisme Canada Dry, dans les discours mais pas dans les actes". "Je veux bien qu'on étende à l'infini les délais de prescription, mais si on se donnait des moyens pour que la parole soit correctement entendue dans les commissariats de police, pour sensibiliser dès le plus jeune âge, ça serait quand même mieux", lâche la députée. Clémentine Autain réitère la demande "d'un milliard d'euros pour augmenter les moyens humains et financiers". "Il faut former les magistrats, les policiers, donner des moyens à la justice", poursuit l'élue.
Réforme des retraites : "Le bras d'honneur, la Macronie le fait tous les jours aux Français"
"Le bras d'honneur, la Macronie le fait tous les jours aux Français avec la réforme des retraites", réagit Clémentine Autain après les deux bras d'honneur du garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, mardi soir à l'Assemblée nationale. La députée voit avant tout dans ce geste du "mépris" de la part d'un gouvernement qui est "en train de perdre les pédales". "Si vous voulez calmer la situation, il faut baisser le niveau de tension et c'est le gouvernement qui a cette responsabilité", poursuit-elle.
Elle accuse l'exécutif de ne pas écouter la population qui manifeste. "Il y a une rupture de confiance entre ceux qui gouvernent et la majorité des Français, et c'est dangereux", ajoute-t-elle. Clémentine Autain appelle l'exécutif à "sortir de ce débat par le haut". Sur l'hypothèse d'une dissolution de l'Assemblée, "il faut toujours être prêt à remettre en jeu son mandat de député, il ne faut pas avoir peur du suffrage", affirme la députée.
Ukraine : "A gauche, nous ne sommes pas assez audibles, assez offensifs"
"Il faut que notre solidarité à l'égard des Ukrainiens soit plus forte", affirme Clémentine Autain, qui a par ailleurs signé une tribune dans le JDD affirmant que Vladimir Poutine était le seul responsable de la guerre en Ukraine. "À gauche, nous ne sommes pas assez audibles, assez offensifs, assez mobilisés pour exprimer notre soutien aux Ukrainiens", poursuit la députée LFI qui "ne sait pas comment expliquer" cette position de la gauche. "Il y a une forme de naïveté" et une "faiblesse sur les questions internationales", reconnaît la députée. L'élue refuse de voir dans ce conflit une nouvelle guerre froide. "Il faut chercher la solution du côté d'un règlement international du conflit, donc le moment est venu de tendre la main aux pays émargeants, aux pays du Sud, parce que c'est là qu'est la clé diplomatique pour gagner", conclut la députée.
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