Attaque de l'Iran contre Israël : la place de la France "c'est d'abord un objectif de stabilité et de paix", estime Dominique de Villepin
"Si la France veut être utile" après l'attaque de l'Iran contre Israël, "elle doit être à sa place, et à sa place c'est d'abord avec un objectif de stabilité et de paix", estime Dominique de Villepin, ancien Premier ministre et ancien ministre des Affaires étrangères, ancien Premier ministre était l'invité du 8h30 franceinfo. Il répondait aux questions d'Agathe Lambret et Jean-René Baudot. Selon lui, "la France n'a pas à être partie prenante" dans le conflit au Proche-Orient. "Notre rôle à nous, si on a à exercer une médiation, à exercer une influence, c'est de pondérer, c'est de modérer", poursuit-il.
Emmanuel Macron a confirmé lundi que la France avait procédé à des "interceptions" à la demande de la Jordanie lors de l'attaque iranienne sur Israël dans la nuit de samedi à dimanche. "Qu'au service des Jordaniens, nous assurions une protection et qu'in fine ce soit Israël qui, en l'occurrence, en ait bénéficié, c'est une chose. Que la France, dans sa rhétorique diplomatique, dise que nous sommes intervenus, que nous sommes parties prenantes, ça comporterait un inconvénient particulièrement grave", détaille Dominique de Villepin qui souligne l'importance de "l'ambiguïté diplomatique". L'ancien ministre des Affaires étrangères estime que le risque est d'introduire la France "dans ce cycle et dans ce risque d'engrenage d'action-réaction".
"Un conflit d'un nouveau type"
Même si un seuil "a été franchi dans les objectifs fixés par l'Iran" avec cette frappe sur le sol israélien, il note que, "dans l'esprit des Iraniens", "il y a sans doute eu la volonté de désamorcer cette escalade, c'est-à-dire à la fois de frapper sur le principe, mais en même temps d'éviter tout dégât significatif". D'après lui, "l'Iran était obligé de riposter" après la frappe imputée à Israël contre le consulat d'Iran à Damas, en Syrie, le 1er avril dernier. Cette nouvelle étape qui a été franchie par l'Iran "peut nous introduire dans un conflit d'un nouveau type", mais Dominique de Villepin recommande d'éviter "cette logique d'embrasement".
Désormais, "c'est Israël qui a, dans la main, l'appréciation de cette escalade et donc la décision d'une riposte", analyse l'ancien Premier ministre. Selon lui, "il y a deux préoccupations pour Israël, deux cibles particulières" : "La première, c'est le programme nucléaire iranien", "la deuxième c'est le Hezbollah qui représente une menace pour le territoire israélien". Dominique de Villepin n'exclut pas de riposte israélienne contre ces deux cibles et rappelle que "dans sa grande solitude, Israël veut d'abord compter sur ses propres forces" pour affirmer une "logique d'action et d'indépendance".
Un "sentiment de solitude
"Face à la tragédie qu'a vécue Israël le 7 octobre, ce sentiment de solitude existe et il est encore davantage aiguisé par le fait que c'est un gouvernement faible qui est aujourd'hui à la tête" du pays, analyse Dominique de Villepin. "C'est un gouvernement qui est fragile, du fait même de cet équilibre entre les ultranationalistes et les autres, donc c'est un gouvernement qui, s'il veut durer, doit constamment rechercher de nouvelles cibles et doit constamment être dans l'action au service 'de la sécurité d'Israël'", poursuit-il. D'où cette "tentation, peut-être, de la fuite en avant".
En effet, l'ancien Premier ministre note "une volonté d'aller jusqu'au bout" d'Israël, notamment dans "sa stratégie sur Rafah" au sud de la bande de Gaza. "Rien n'est pire que d'associer l'ensemble du peuple palestinien au Hamas", assène-t-il, rappelant son attachement à la création d'un État palestinien. "Ces politiques de surenchère militaire" conduisent dans notre "monde de guerres mondialisées, où tous les fronts sont susceptibles de s'unir" au risque "de coaliser des forces contre nous et en particulier d'obtenir une polarisation du monde entre les régimes autoritaires et les régimes démocratiques", détaille-t-il.
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