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Primaire de la gauche : pourquoi y a-t-il aussi peu de sondages ?

Le calendrier politique et un relatif désintérêt des électeurs et des médias expliquent cette absence d'enquêtes d'opinion dans la campagne pour la primaire de la gauche.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Un militant PS distribue des tracts, le 18 décembre 2016 à Paris, pour inciter les électeurs à aller voter à la primaire de la gauche. (ETIENNE LAURENT / EPA)

Manuel Valls, Arnaud Montebourg, Benoît Hamon ou Vincent Peillon ? Qui part favori ? Depuis que les noms des principaux protagonistes de la primaire de la gauche sont connus, aucune enquête d'intentions de vote n'a été réalisée. Un calme sondagier qui tranche avec la frénésie dont ont fait preuve instituts et médias lors de la campagne de la primaire de la droite. Si des enquêtes sur la primaire vont bel et bien être publiées à partir de la première semaine de janvier 2017, une fois les vacances de Noël terminées, la trêve des confiseurs n'est pas la seule raison de cette absence de sondages.

Parce que le casting s'est dessiné tardivement

Un président sortant qui jette l'éponge le 1er décembre, son Premier ministre qui se déclare candidat le 5 et Vincent Peillon qui se lance dans l'aventure le 11 : "Le calendrier nous a été assez défavorable", commente Bruno Jeanbart, directeur général adjoint de l'institut OpinionWay. "Même si on avait une idée assez claire des candidats en lice avant le 17 décembre [jour où la liste officielle des candidats retenus a été publiée], il aurait par exemple été hasardeux d'intégrer ou d'exclure Gérard Filoche de l'enquête. Et après le 17 décembre, il était un peu tard pour lancer un sondage qui aurait été publié pendant la période des fêtes", poursuit-il.

Parce que la campagne est très courte

A droite, les modalités, le calendrier et les principaux acteurs de la primaire étant connus longtemps à l'avance, la campagne s'est étirée sur plusieurs semaines, ce qui a permis aux instituts de multiplier les enquêtes. A gauche, où tout s'est précipité, la campagne ne va véritablement démarrer qu'en ce début d'année, avec trois débats télévisés dans un laps de temps extrêmement court, les 12, 15 et 19 janvier.

Cela ne va pas être facile d'intercaler des enquêtes entre ces dates très resserrées.

Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos

à franceinfo

Pour les sondeurs, la tâche est d'autant plus ardue que l'opinion des électeurs potentiels de la primaire de la gauche est encore loin d'être cristallisée. "On est à peu près sûrs que les trois débats vont beaucoup jouer dans leur choix, plus encore que ceux de la droite", estime Bruno Jeanbart, qui note que certains candidats, comme Vincent Peillon ou Benoît Hamon souffrent encore d'un relatif déficit de notoriété dans l'opinion.

"Lors de la primaire de la droite, les nombreux sondages réalisés avant la phase finale [de la campagne] ont mis en évidence des changements très limités, par rapport aux très fortes évolutions enregistrées lors de la dernière ligne droite. Il nous a donc semblé qu'il n'y avait pas lieu de se précipiter", commente pour sa part Emmanuel Rivière, directeur de Kantar Public France.

Parce que les sondages coûtent cher

Pour certains sondeurs la faible participation attendue lors de cette primaire pose un vrai problème de faisabilité. "Il est très difficile de trouver la cible, c'est-à-dire les électeurs qui se disent certains d'aller voter", explique Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'institut Ifop. "Par exemple, si on estime que la participation sera de 2 millions de votants [ils étaient 4,3 millions à la primaire de la droite], cela implique d'interroger 15 000 à 20 000 personnes, afin d'en extraire un échantillon conséquent", décrit-il.

Conséquence de ces contraintes supplémentaires : ces études s'avèrent longues à réaliser et donc coûteuses. "Pour réaliser de tels sondages, avec autant de personnes interrogées, il faut au minimum compter deux ou trois jours", calcule Bruno Jeanbart.

Parce que les médias s'en désintéressent

Au-delà des difficultés objectives de réalisation, certains instituts n'ont tout simplement pas reçu de commandes de la part des médias, principaux clients en matière de sondages d'intentions de vote. "Pour le moment, ils n'ont pas eu beaucoup d'appétit pour la primaire de la gauche, qui suscite moins d'intérêt et moins d'excitation que la primaire de la droite. Peut-être parce que le vainqueur de la primaire ne semble pas en mesure de gagner l'élection présidentielle ?" s'interroge Gaël Sliman, patron de l'institut Odoxa.

Après la victoire de François Fillon, nous avons eu droit à la polémique classique sur le thème 'les sondages n'ont rien vu venir'. Cela a pu jouer : certains médias ont pu se dire que ça ne valait pas le coup de commander un sondage.

Gaël Sliman

à franceinfo

Inexistants depuis près d'un mois, (le dernier a été publié le 8 décembre par Harris Interactive pour France Télévisions, avant la déclaration de candidature de Vincent Peillon), les sondages d'intentions de vote pour la primaire de la gauche devraient réapparaître en janvier, mais à un rythme peu soutenu.

En revanche, les instituts vont continuer à publier des enquêtes d'opinion qui ne portent pas sur les intentions de vote proprement dites, mais sur la perception de la primaire, la popularité des candidats, ou encore les souhaits de victoire. Des sondages qui ne nécessitent pas de constituer un échantillon d'électeurs certains d'aller voter, et qui sont donc beaucoup plus simples à réaliser.

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