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Loi anti-squat : "Nous essayons de nous attaquer aux impayés très longs", explique le rapporteur du texte

Le texte anti-squat proposé par le député Guillaume Kasbarian cible à la fois les squatteurs et les locataires qui ne paient pas. "Il y a urgence à légiférer parce qu'aujourd'hui, on a un déséquilibre entre un droit au logement et un droit de propriété qui doit être respecté", défend-il. 

Article rédigé par franceinfo
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Guillaume Kasbarian, député d'Eure-et-Loire, le 21 juin 2022. (VINCENT ISORE / MAXPPP)

"Ce à quoi nous essayons de nous attaquer, ce sont des impayés très longs, dans lesquels des petits propriétaires se retrouvent embourbés dans des procédures", argue lundi 28 novembre sur franceinfo Guillaume Kasbarian, député d'Eure-et-Loire et rapporteur d'une proposition de loi anti-squat. L'Assemblée nationale commence lundi l'examen du texte porté par les groupes de la majorité présidentielle, qui prévoit de tripler les sanctions encourues par les squatteurs jusqu'à 3 ans de prison et 45 000 euros d'amende.

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La proposition de loi présentée par Guillaume Kasbarian vise par ailleurs à conforter les propriétaires face aux impayés, prévoyant de raccourcir des délais procéduraux afin que "des petits propriétaires ne se retrouvent pas embourbés dans des procédures pendant trois, quatre, cinq années et se retrouvent eux-mêmes dans une situation de précarité", selon le député.

franceinfo : Est-ce que les propriétaires ne sont aujourd'hui pas assez protégés ?

Guillaume Kasbarian : Il y a deux types de situations. Il y a d'abord les propriétaires qui sont victimes de squat [leur logement occupé sans autorisation par des personnes qui n’en ont ni le droit, ni le titre, et qui sont entrés par effraction]. Aujourd'hui, ils bénéficient d'une procédure que nous avons renforcée en 2020 et qui permet d'expulser les squatteurs en quelques jours seulement. Cette procédure, elle marche.

"Il y a eu 170 squatteurs qui ont été expulsés en quelques jours en 2021."

Guillaume Kasbarian, rapporteur de la loi anti-quat

à franceinfo

Néanmoins, les sanctions restent faibles. Elles sont aujourd'hui plus faibles pour un propriétaire qui sortirait un squatteur lui-même que pour le squatteur lui-même. Nous voulons rééquilibrer l'échelle des sanctions et faire en sorte que, non seulement cette procédure fonctionne, mais, en plus, que les sanctions pénales soient plus lourdes. Et puis il y a un deuxième sujet qui est celui des impayés à répétition, qui parfois pendant des années viennent peser sur des petits propriétaires, avec des locataires qui se maintiennent dans des lieux, y compris en dépit d'une décision de justice, et même si le bail a été résilié. Ces procédures sont très longues et nous voulons faire en sorte que ces procédures soient plus efficaces, un peu plus courtes, de façon à ce que des petits propriétaires ne se retrouvent pas embourbés dans des procédures pendant trois, quatre, cinq années et se retrouvent eux-mêmes dans une situation de précarité.

Et pourquoi cibler dans le même texte les squatteurs et les locataires qui ne paient pas leur loyer ? C'est la même problématique pour vous ?

Pour moi, ce sont deux problématiques qui sont un peu différentes. Mais toutes les affaires récentes et toutes les sollicitations que nous recevons en tant que député viennent souvent de problématiques d'occupations illicites alors que le bail a été rompu, alors que le juge a demandé l'expulsion. Mais il ne s'agit pas pour autant formellement, juridiquement d'un squatteur parce qu'il ne s'est pas introduit dans les lieux de façon illicite. Il s'est simplement arrêté de payer pendant trois, quatre, cinq ans. Un couple, Pierre et Marise à Marseille, se retrouvent en tant que propriétaires, en train de vivre dans une caravane parce qu'ils ont un locataire qui s'est arrêté de payer pendant deux ans les loyers. C'est le cas de Mégane dans la Somme, qui se retrouve obligée d'être SDF parce qu'elle a un locataire qui, pendant quinze mois, s'est arrêté totalement de payer le loyer.

Est-ce qu'il y avait urgence à légiférer ?

Je pense qu'il y a urgence à légiférer. D'une part parce que les squats, c'est effectivement 170 affaires, mais les contentieux locatifs et les impayés, c'est beaucoup plus important. Il y a urgence à légiférer parce qu'aujourd'hui, on a un déséquilibre entre un droit au logement et un droit de propriété qui doit être respecté.

"Si on veut, face à la crise du logement, rééquilibrer les choses, faire en sorte que des propriétaires mettent en location leur logement, on ne peut pas dire aux propriétaires, 'débrouillez-vous avec les impayés !'"

Guillaume Kasbarian

à franceinfo

Il ne faut pas s'étonner d'ailleurs que des propriétaires aient peur de louer leur logement ou choisissent de la location touristique ou Airbnb parce qu'ils se disent une location traditionnelle ne me protègera pas si je tombe sur un cas d'impayé prolongé.

Le gouvernement promet un texte d'équilibre avec des amendements qui doivent être déposés en séance pour faire une distinction entre "locataires réellement en difficulté", et les "locataires de mauvaise foi". Est-ce que vous comprenez ces modifications ?

En commission des Affaires économiques, ce texte a été très largement adopté. Il y a des mesures aussi à l'intérieur du texte déjà, qui permettent d'équilibrer les choses. On a des sanctions qui vont peser sur les marchands de sommeil. On a des dispositifs qui vont permettre de prévenir les services sociaux bien en amont quand un impayé se produit, de façon à anticiper éventuellement une problématique de relogement, de relocalisation de la personne. Et donc cette proposition, elle me semble tout à fait équilibrée, d'autant plus qu'elle ne touche pas à la question de la trêve hivernale et qu'on reste tout à fait dans le respect des procédures de l'État de droit et les procédures judiciaires. Elle va permettre d'accélérer les choses tout en restant très équilibrée par rapport au droit au logement.

Mais cette proposition fait l'objet d'oppositions, notamment à gauche, d'associations qui ont manifesté hier contre le texte…

Les associations dont vous parlez étaient déjà vent debout en 2020 quand nous étions en train de renforcer les sanctions sur les squatteurs et inventer une nouvelle procédure expresse d'expulsion. Donc rien de nouveau sous le soleil. La réalité, c'est que l'immense majorité des locataires paient leur loyer "rubis sur ongle" chaque mois et qu'une petite minorité a parfois des difficultés. La loi ne changera pas grand-chose pour eux parce qu'en réalité, quand vous régularisez quelques semaines, quelques mois plus tard, il n'y aura aucun problème. Si c'est six mois, la procédure ne changera pas grand chose pour eux. En revanche, si temporaire pour vous, c'est deux ou trois ans, effectivement, vous serez concerné.

"Il n'est pas normal d'avoir des locataires qui ne payent pas pendant deux, trois ou quatre ans et des petits propriétaires, à l'inverse, qui sont victimes et se retrouvent eux-mêmes dans une situation de précarité."

Guillaume Kasbarian

à franceinfo

Et ce n'est pas parce que vous êtes propriétaire que vous ne pouvez pas vous retrouver dans une situation de précarité. Ce à quoi nous essayons de nous attaquer, ce sont des impayés très longs, dans lesquels des petits propriétaires se retrouvent embourbés au-delà de un an dans des procédures et ne récupèrent leur logement que trois ou quatre années plus tard. Il s'agit donc d'une minorité de cas, mais une minorité que nous devons régler et une minorité que nous devons protéger côté propriétaires pour pouvoir encourager la mise en location des logements. Arrêtons de fantasmer sur le fait que tous les locataires vont être concernés par cette loi. L'immense majorité des locataires, et heureusement, payent leur loyer tous les mois.

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